Au printemps de 1815, ayant été conduite au Jardin du Roi, elle eut la complaisance
de se dépouiller et de se laisser peindre d’après le nu.
On put vérifier alors que la protubérance de ses fesses n’était nullement mus-
culeuse, mais que ce devait être une masse de consistance élastique et tremblante,
placée immédiatement sous la peau; elle vibrait en quelque sorte à tous les mouvements
que faisait cette femme, et on s’aperçut qu’il s’y formait aisément des
excoriations dont il était resté de nombreuses cicatrices.
Les seins qu’elle avait coutume de relever et de serrer par le moyen de son
vêtement, abandonnés à eux-mêmes, montrèrent leurs grosses masses pendantes,
terminées obliquement par une auréole noirâtre large de plus de 4 pouces,
creusée de rides rayonnantes, et vers le milieu de laquelle était un mamelon
aplati et oblitéré au point d’être presque invisible : la couleur générale de sa
peau était d’un brun-jaunâtre, presque aussi foncée que celle de son visage;
elle n’avait d’autres poils que quelques flocons très-courts d’une laine semblable
à celle de sa tête, clair-semés sur son pubis.
Mais à cette première inspection, l’on ne s’aperçut point de la particularité la
plus remarquable de son organisation : elle tint son tablier soigneusement caché,
soit entre ses cuisses, soit plus profondément; et ce n’est qu’après sa mort qu’on
a su qu’elle le possédait.
Elle mourut le 29 décembre 1815; et M. le préfet de police ayant permis que
son corps fût apporté au Jardin du Roi, l’on procéda à un examen plus détaillé.
Les premières recherches durent avoir pour objet cet appendice extraordinaire
dont la nature a fait, dit-on, un attribut spécial de sa race.
On le retrouva aussitôt; et tout en reconnaissant que c’était exactement ce
que Péron avait dessiné, il ne fut pas possible d’adopter la théorie de «et infatigable
naturaliste.
En effet le tablier n’est point, comme il l’a prétendu, un organe particulier;
plusieurs de ses prédécesseurs avaient mieux vu : c’est un développement des
nymphes.
Les grandes lèvres, peu prononcées, interceptaient un ovale de 4 pouces de
longueur ; de l’angle supérieur descendait entre elles une proéminence demi-
cylindrique d’environ 18 lignes de longueur sur 6 lignes d’épaisseur, dont l’extrémité
inférieure s’élargit, se bifurque, et se prolonge comme en deux pétales
charnus, ridés, de 2 pouces et demi de longueur sur environ 1 pouce de
largeur : chacun d’eux est arrondi par le bout; leur base s’élargit et descend le
long du bord interne de la grande lèvre, de son côté, et se change en une
crête charnue qui se termine à l’angle inférieur de la lèvre.
Si on relève ces deux appendices, ils forment ensemble une figure de coeur
dont les lobes seraient étroits et longs, et dont le milieu serait occupé par l’ouverture
de la vulve.
En y regardant de plus près on s’aperçoit que chacun de ces deux lobes a, à
sa face antérieure, tout prés de son bord interne, un sillon plus marqué que
ses autres rides, qui monte, en devenant plus profond, jusqu’au dessus de leur
bifurcation; là, les deux sillons se réunissent, en sorte qu’il y a à l’endroit de
la bifurcation un double rebord entourant une fossette en forme de chevron;
au milieu de cette fossette est une proéminence grêle, qui se termine par une
petite pointe à l’endroit où les deux rebords internes se réunissent.
FEMME DE RACE BOSCHISMANNE. 5
Il doit être manifeste pour quiconque lira cette description, et mieux encore
pour quiconque voudra comparer ces parties avec leurs analogues dans les femmes
européennes, que les deux lobes charnus qui forment le tablier se composent,
dans le haut, du prépuce et de la sommité des nymphes, et que tout le reste de
leur longueur ne consiste qu’en un développement des nymphes seules.
L’intérieur de la vulve ni la matrice n’avaient rien de particulier.
On sait que le développement des nymphes varie beaucoup en Europe ; qu’il
devient en général plus considérable dans les pays chauds; que des Négresses,
des Abyssines en sont incommodées au point d’être obligées de se détruire ces
parties par le fer et par le feu. On fait même d’avance cette opération à toutes
les jeunes filles d’Abyssinie, au même âge où l’on circoncit les garçons.
Les jésuites portugais qui, dans le seizième siècle, convertirent au catholicisme
le roi d’Abyssinie et une partie de son peuple, se crurent d’abord obligés de
proscrire cette pratique, qu’ils croyaient tenir à l’ancien judaïsme de cette nation;
mais il arriva que les filles catholiques ne trouvèrent plus de maris, parce que les
hommes ne pouvaient se faire à une difformité dégoûtante. Le collège de la
Propagande envoya un chirurgien sur les lieux pour vérifier le fait; et,, sur son
rapport, le rétablissement de l’ancienne coutume fut autorisé par le pape.
Il n’y aurait donc de particulier dans les Boschismans que la constance de ce
développement et son excès. M. Blumenbach assure avoir des dessins de ces
organes, qui lui ont été communiqués par M. Banks, et où il s’en trouve de
8 pouces et plus de longueur. Il paraît qu’il y a aussi des variétés pour la forme.
Autant que je puis me rappeler les dessins que j ’ai vus dans le portefeuille
de Péron, cet appendice y paraissait beaucoup moins profondément bifurqué,
et tenait à la vulve par un pédicule étroit au lieu d’une large base comme celui
que j ’ai observé : il était aussi un peu plus considérable pour le volume.
Quant à l’idée que ces .excroissances sont un produit de l’art, elle paraît bien
réfutée aujourd’hui, s’il est vrai que toutes les Boschismannes les possèdent dès
la jeunesse. Celle que nous avons vue n’avait probablement pas pris plaisir à se
procurer un ornement dont elle avait honte, et qu’elle cachait si soigneusement.
Le voile des Boschismannes n’est pas une de ces. particularités d’organisation
qui pourraient établir un rapport entre les femmes et les Singes; car ceux-ci, loin
d’avoir des nymphes prolongées, les ont en général à peine apparentes.
Il n’en est pas de même de ces énormes masses de graisse que les Boschismannes
portent sur les fessesvet qui, selon les nouveaux voyageurs, nommément Levaillant,
M. Péron, M. Jansens, etc., seraient naturelles et communes à toute la nation.
Elles offrent une ressemblance frappante avec celles qui surviennent aux femelles
des Mandrills, des Papions, etc., et qui prennent, à certaines époques de leur
vie, un accroissement vraiment monstrueux. Dans les Boschismans ces protubérances
ne consistent absolument que dans une masse de graisse traversée en tous
sens par des fibres cellulaires très-fortes, et qui se laisse aisément enlever sur
les muscles grands fessiers ceux-ci reprennent alors leur forme ordinaire.
Levaillant dit que les Boschismannes ont, dès leur premier âge, cette çonfor-r
mation assez bizarre; mais la femme dont nous parlons nous a assuré qu’elles
ne les prennent qu’à leur première grossesse.
C’est un point que je n’ai pu suffisamment éclaircir dans les voyageurs.
J’étais curieux de savoir si les os du bassin avaient éprouvé quelque modi