LE BISON D’AMÉRIQUE.
C e t t e espèce de boeuf a plusieurs fois été amenée en Europe pour être
offerte à la curiosité, publique ; on en a des figures assez exactes et elle a été
assez bien décrite par quelques voyageurs et par quelques naturalistes. Cependant,
malgré les observations dont cet animal a été le sujet, on désirait
encore de le connaître plus en détail , afin de pouvoir le comparer, dans
toutes ses parties, avec les espèces de boeufs sauvages de l’Europe, et décider
s’il doit ou non faire une espèce distincte et exclusivement propre à l’Amérique.
Jusqu’à ces derniers temps on avait été assez disposé à ne voir dans ce Bison
qu’une variété de l’aurochs; c’est même à cette idée qu’il doit le nom de Bison,
donné par Pline à un boeuf sauvage de la Germanie, distinct de l’Urus et
qu’on ne reconnaît plus aujourd’hui. Linneus, et même Gmelin, abandonnant
le Bison des anciens, considérèrent celui d’Amérique comme une espèce propre
à ce continent, et il en fut de même de Brisson qui crut retrouver le véritable
Bison dans un boeuf de l’Allemagne ; mais Exlèben donne de nouveau le Bos
jubatus de Pline comme synonyme du Bison d’Amérique; et Buffon ne voulut
voir entre ce Bison et l’aurochs que des différences de variété. Pallas lui-même
n’osa pas prononcer sur la nature de ces différences , quoiqu’il fût porté a*
les regarder comme spécifiques. Enfin c’est cette dernière façon de voir qui
a été définitivement adoptée, quoiqu’on n’ait point encore, à ce que nous sachions
du moins, de description comparative et suffisamment détaillée, de
l’aurochs et du Bison. Nous allons tâcher de suppléer à ce qui manque dans
les descriptions du Bison américain, pour qu’on puisse établir une comparaison
exacte entre ces deux animaux.
L’individu que nous possédons a été envoyé à notre ménagerie en 1819 par
M. Milbert, voyageur du Gouvernement aux États-Unis; pris jeune, il fut apprivoisé
et vint en Europe sous la conduite d’un nègre qui en avait toujours
eu soin, et auquel il obéissait, à l’aide toutefois d’un anneau passé entre les
narines, comme ceux dont on se sert pour maîtriser les buffles et les ours;
il était habitué à être lavé, peigné et bouchonné ; mais il ne souffrait ces
soins que de la part de ceux qui le nourrissaient et qu’il voyait chaque jour;