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LE MANGABEY.
B u f f o n , croyant que cette espèce de guenon était originaire de Madagascar,
lui donna, comme on sait, le nom de Mangabey ; mais on ne tarda pas à se convaincre
que cette origine était fausse, et qu’il ne se trouvait aucune espèce de
singe dans cette île, où une création particulière semble avoir eu lieu. Depuis
cette époque cependant les contrées naturelles à l’espèce du Mangabey n’ont point
été reconnues, quoique ce soit un des singes qu’on amène le plus fréquemment
en Europe, tant les découvertes en histoire naturelle marchent avec lenteur, tant
il est difficile de porter la lumière sur les branches de cette science qui ne
dépendent pas exclusivement de ceux qui les cultivent. Il est vraisemblable
que cette espèce est originaire de l’Afrique, comme les autres guenons; car elle
appartient à ce genre de quadrumanes de l’ancien monde, qui se caractérise
par des molaires postérieurs à quatre tubercules seulement, des narines situées
en arrière du museau, un grand développement des membres postérieurs, et
une queue relevée sur le dos. En effet, le M a n g a b e y est entièrement organisé
comme le Malbrouk et comme le Callitriche. Aussi nous renvoyons à ce que
nous avons dit de ces animaux pour tout ce qui tient à la structure des organes
des sens, du mouvement et de la génération, sur lesquels nous reviendrons d’ailleurs
encore lorsque nous traiterons des caractères qui sont communs à ces
animaux. Npus ne devons parler ici que des caractères spécifiques et des phénomènes
organiques que nous n’aurions pas pu observer sur les espèces précédentes.
Car, quoique chaque individu contienne les caractères de son espèce,
et chaque espèce ceux de son genre, ce n’est cependant que par des observations
détachées, recueillies suivant que des circonstances plus ou moins favorables le
permettent, que l’on parvient successivement à les reconnaître tous.
Nous avons vu un très-grand nombre de ces singes, et nous en avons possédé
plusieurs; et,soit hasard, soit qu’en effet ils aient un naturel plus heureux que les
autres, nous n’en avons pas rencontré un seul qui ne fût familier et doux, malgré la
plus grande pétulance; et à cet égard même ils m’ont paru surpasser la plupart des
autres guenons. Sans cesse en action, ils prenaient toutes les attitudes et souvent
les plus grotesques; on les aurait dit, à la variété et à la vivacité de leurs mouvements,
pourvus d’un plus grand nombre d’articulations que les autres guenons et
déplus de force. C’était sur-tout les mâles qui se faisaient remarquer, et ils mêlaient
constamment à leurs sauts une grimace particulière, qui montrait leurs
incisives, toujours très-larges, et qui ressemblait à une sorte de rire. Les femelles,
plus calmes, étaient aussi plus caressantes. La taille de cette espèce ne devient*