Le Surmulot devient plus grand que le Rat * on en a vu de 8 à 9 pouces de long,
depuis le bout du museau jusqu’à la queue, et leur tête avait plus de 2 pouces.
La longueur de la queue est environ d’un huitième plus courte que le corps.
Ce rongeur est moins lourd, moins trapu que la Marmotte ou le Castor, et moins
léger que le Loir ou l’Écureuil* ses mouvements sont vifs et prompts, et il grimpe
et nage avec agilité. Comme nous l’avons dit, il vit sous terre, dans des terriers
profonds qu’il se creuse avec une étonnante facilité. Sa constance dans le travail
lui fait produire des effets qui semblent de beaucoup surpasser ses forces * aussi
pénètre-t-il partout : il perce les murailles, soulève les pavés* et comme les
Surmulots se réunissent toujours en grand nombre lorsqu’ils se jettent dans
une habitation, ils peuvent en attaquer les fondements et la mettre en danger.
Ils se nourrissent à peu près indifféremment de substances végétales et animales*
de grains, de racines, de viande : et quoiqu’on trouve au fond de leurs terriers
plusieurs de ces substances, ils ne font point de provisions, du moins
lorsqu’ils habitent nos demeures. Buffon dit que les vieux mâles restent à la campagne
pendant l’hiver, et qu’ils remplissent leurs terriers de glands, de faînes, etc. :
ce qui ferait supposer que leurs dispositions instinctives varient suivant les circonstances
où ils se trouvent* phénomène si extraordinaire, qu’il aurait besoin
d’être constaté de nouveau pour être cru. Ils s’aident de leurs pieds de devant
pour manger, en portant leurs aliments à leur bouche* ils boivent beaucoup, et
en lapant. Ils font plusieurs portées par an* on dit trois, et chacune d’elles est
de 8 à 12 petits. Lorsqu’ils sont tourmentés dans leur possession par les hommes
ou par les animaux, ils s’éloignent, et quelquefois ils émigrent fort loin* alors
malheur à l’habitation ou au pays qu’ils ont choisi pour retraite : s?ils sont nombreux,
dans un instant tout est bouleversé! Il paraît qu’ils nous ont été amenés
par nos vaisseaux, et que c’est vers le milieu du dix-huitième siècle qu’on les a
vus, pour la première fois, aux environs de Paris : on assure que plusieurs de
nos départements ne les connaissent point encore* et Pallas nous apprend qu’ils
arrivèrent à Astracan, dans l’automne de 17 27, en si grande quantité et en si
peu de temps, qu’on ne pouvait rien soustraire à leur atteinte * ils venaient cependant
du désert de l’ouest, et traversèrent les flots du Yolga, qui sans doute
en engloutirent une partie. Ils ne se sont pas avancés plus au nord : on ne les
trouve point en Sibérie.
Le Surmulot a les dents, les organes du mouvement, ceux des sens et de la
génération entièrement semblables à ceux du Rat. C’est pourquoi nous renvoyons
à l’article de cet animal pour les indiquer* et nous les ferons connaître plus en
détail, en traitant du genre auquel ces espèces appartiennent.
Sa couleur générale est d’un gris-fauve-noirâtre en dessus, plus clair sur les
côtés, et d’un gris très-pâle en dessous* elle résulte de poils gris à leur moitié
inférieure, fauves, sales ensuite, et noirs à leur extrémité, pour la plupart du
moins. De plus, on voit quelques poils entièrement noirs répandus sur toutes
les parties supérieures. Ces poils soyeux, mais principalement ceux du dos, qui
sont les plus longs, sont aplatis à leur partie moyenne, et terminés par une
pointe effilée* quelques-uns mêmes ont presque une roideur semblable à celle
des épines. Des poils laineux, fins et gris de cendre, revêtent immédiatement la
peau. La queue est écailleuse, c’est-à-dire couverte de petits parallélogrammes
d’épidermes rangés en cercles autour d’elle, et de dessous 1 extrémité de chaque
lame d’épiderme naissent quelques petits poils gris. Les poils qui recouvrent
les membres et la tête sont très-courts^ ceux des tarses, des carpes et des doigts,
sont aussi très-courts et blancs. Les moustaches sont noires, et la peau de la
plante des pieds et de la paume des mains, qui est nue, est couleur de chair;
et il en est de même des oreilles et de l’extrémité du museau. Les ongles sont
blancs.
Le Surmulot est le Mus Decumanus des Ouvrages systématiques* et c’est Pallas
qui lui a donné ce nom. Buffon l’appela Surmulot à cause de sa grande taille,
et des rapports qu’il lui trouvait avec le Mulot, beaucoup plus petit que lui.
Septembre 1820.