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LE TIGRE ROYAL.
C ette grande espèce de Chat s’est acquis une telle réputation de férocité
passe si généralement pour être avide de sang, est si universellement offerte en
exemple dés qu’d s’agit de peindre la passion de la cruauté et de la destruction
que toutes les autres semblent, en comparaison, être douées des qualités les
plus douces et les plus paisibles. Rien cependant n’est moins exact que ces
idees : le Tigre n’est point réellement plus cruel que les autres espèces de Chats,
et na pas une plus grande soif de sang que le Lion, qui l’égale par la taille,
ou que le Jaguar, qui, sous ce rapport, n’en diffère guère. Quelles sont donc
les^ causes qui ont pu faire attribuer exclusivement au Tigre Royal des qualités
qu’il partage avec tous les autres Chats? Par quelle raison surtout inspire-t-il
plus de crainte, est-il plus redouté que le Lion? Ne serait-.ce pas qu’habitant
des régions très-peuplées, les parties méridionales de l’Asie, il a plus souvent
assouvi ses appétits sanguinaires aux dépens de. notre espèce, que le Lion, qui
principalement confiné dans les déserts de l’Afrique, a surtout fait sa nourriture
des Antilopes de diverses espèces, dont les troupes innombrables peuplent
ces vastes solitudes. Je serais d’autant plus disposé à.le croire, que nous devons
tes premières notions que nous ayons acquises sur cet animal, â ces Indiens
timides , qui sont constamment devenus la proie de ceux qui ont voulu les
asservir. .
D’un autre côté, le voisinage de l’homme a dû développer la férocité du Tigre,
par a: nécessité où elle a mis cet animal de défendre incessamment sa vie contre
les entreprises d’ennemis nombreux et puissants; et si on le voit souvent commettre
des meurtres inutiles, et que ne demandent plus ses bei*oins satisfaits,
cest qu ayant acquis la conscience des dangers que la présence des hommes lui
tait courir, il a dû traiter en ennemis tous ceux qu’il a été 4 portée d’atteindre.
Lorsque des Tigres sont réduits très-jeunes en esclavage et traités avec douceur
ils s apprivoisent de la même manière que les Lions et que toutes les autres
espèces de Chats. Ils deviennent confiant et affectueux, recherchent les caresses
et les rendent avec le même empressement, le même abandon que nos Chats les
p us domestiques; et si cette règle souffre quelques exceptions, elles ne sont pas
plus nombreuses qu’elles le seraient pour toute autre espèce sauvage. La nature
ne paraît donc point avoir départi au Tigre un instinct particulier de cruauté,
omme à tous les autres êtres intelligents, elle lui a donné des facultés qui se