2 L’OURS POLAIRE.
espèce, qui est communément de 7 à 8 pieds d’une extrémité du corps à l’autre.
R était entièrement recouvert d’un pelage blanc qui se composait de poils soyeux
très-longs et très-épais, excepté sur la tête et les membres, où il était assez
court, et de poils laineux formant une bourre épaisse et très-propre à le préserver
des impressions du froid. Le mufle, la langue, la peau des paupières et
les ongles étaient noirs ; la peau des lèvres et de la bouche, d’un noir-violâtre.
Ces couleurs ne changeaient pas, et étaient les mêmes dans toutes les saisons.
On ne le nourrissait que de pain; il n’en mangeait chaque jour que six livres,
et il a constamment été très-gras; ce qui prouve de nouveau que sous ce rapport
le naturel de tous les Ours est le même, qu’on ne peut point les distinguer en
carnassiers et en frugivores, comme on a cru pouvoir le finre ; et que si 1 Ours
polaire a paru avide de chair aux voyageurs qui l’ont rencontré, c’est que, ne
pouvant trouver que de la chair dans les régions élevées qu’il habite, et ne connaissant
point d’autre nourriture, son avidité n’a pu se porter vers d’autres substances.
Il paraît que les Ours se nourrissent de préférence, comme au reste tous
les autres animaux,, des aliments auxquels ils sont habitués; ce qui explique
pourquoi l’on a vu des Ours être très-dangereux pour les hommes et les animaux,
tandis que d’autres semblaient les dédaigner; et pourquoi les Ours"polaires, qui
ne sont à portée de se nourrir que de poissons, passent près des troupeaux
sans les attaquer, lorsqu’ils ne sont pas pressés par une faim violente.
Comme tous les autres Ours, celui qui fait l’objet de cet article avait l’odorat
très-délicat, mais sa vue paraissait être faible; son ouïe ne semblait pas être non
plus très-développée, et son goût n’aurait pu l’être, n’ayant jamais été nourri que
d’un même aliment. Il paraîtrait au reste qu’il en est ainsi pour l’espèce entière,
et qu’excepté l’odorat, tous les autres sens des Ours polaires Sont assez obtus.
La chaleur le faisait beaucoup souffrir, et pour le soulager on lui jetait sur le
corps, en été, de. très-grandes quantités d’eau qu’il paraissait recevoir avec plaisir.
II ne s’était point apprivoisé, et cherchait à nuire à tous ceux qui s’approchaient
de lui; mais il n’attaquait point ouvertement et en menaçant, et c’était avec sa
pate et ses ongles qu’il cherchait à blesser. Il ne faisait entendre sa voix que
lorsqu’on excitait sa colère par des agaceries; dans ce cas, elle était forte, rauque
et toujours du même ton. Le froid de nos hivers n’avait sur lui d autre action
que de diminuer le besoin de nourriture; il ne le plongeait point dans l’assoupissement
léthargique qu’il aurait éprouvé sous l’influence dès hivers des régions
glaciales.
L’allure des Ours polaires est lourde comme celle de tous les plantigrades;
mais il paraît que ces animaux nagent très-bien, et qu’ils plongent long-temps.
On ne parvient à les fatiguer, lorsqu’ils sont à l’eau, qu’après les avoir poursuivis
pendant fort long-temps. Leur nourriture ordinaire sont les poissons, les Phoques,
et toutes les substances animales que la mer rejette constamment sur ses bords.
On assure que lorsque des colonnes ou des bancs de poissons viennent à passer,
ils les suivent et se trouvent alors réunis en grand nombre et comme en troupe;
mais ces animaux vivent sans doute solitaires comme les autres Ours. En effet,
lorsque l’hiver arrive, et que le temps de leur sommeil approche, ils choisissent
le creux d’un rocher, un enfoncement dans la neige, une fente dans un glaçon,
et s’y endorment jusqu’à ce que le soleil du printemps suivant vienne les réveiller.
Pendant ce temps, des masses de neige considérables s’accumulent sur eux et
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les préservent de l’excès du froid, qui, sans nul doute, les ferait périr. Lorsqu’ils
sortent de leur retraite, c’ést-à-dire après cinq ou six moisf ils p a s s en t
éprouver un grand besoin de nourriture , aussi les a-t-on constamment trouvés
fort dangereux à cette époque. “ uuve!>
On ne trouve cette espèce d’Ours que sur l’Océan glacial, mais principalement
dans le voisinage des terres; et ce n’est jamais que par accident qu’il des-
cend de ces froides régions. Quelquefois, au printemps/lorsque les BÜB
détachent des côtes, on en a vu arriver jusqu’en Norwége portés sur des glaçons;
mais en général ,1s ne s établissent jamais en deçà du cercle arctique. Les mâle
quittent les premiers leur retraite, et c’est lorsque les femelles quittent la leur
qu elles mettent bas ordinairement deux petits qui sont nourris par elles, jusqu’à
hiver suivant, avec le plus grand soin. On assure même qu’elles les portent sur
leur dos lorsqu’elles nagent et qu’ils sont las, comme le! Cygnes H plusieurs
autres oiseaux deau, dans le même cas, portent les leurs.
,n: " B P'Usie“ rs W m B blancsi 1 principales sont celle de Martens
(Description du Spitzberg) celle que Collinson envoya à Buffon, et que celui-ci
H H I ■ ■ ■ de ses SuPPléments; celle que Pallas a fait graver
dans le quatorzième fascicule de ses Glanures; celle qu’on trouve dans le dernier
MM T ,S° P I de 'a ména?erie du Muséum d’histoire naturelle de
MM. Lacepéde, G. Cuvier et Geoffroy. Les quatre premières ne donnent qu’une
fort ™ e de cet animal ; la dernière au contraire est d’une perfecdon
remarquable. Elle a été faite1 par Maréchal, et d’après le même individu que l!
nôtre; elle représente cet Ours entièrement de profil, et c’est pour le donner
sous un nouvel aspect que nous l’avons fait représenter de trois quarts.
Août. 1820,
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