9 s TlìKRAIN CRÉTACÉ. CHAPITRE m. 9«
tracer aucune limite entre elles, ou de découvrir une relation
quelconque d'infra ou de supra position; aussi, tout
en admettant que, malgré leur aspect anormal, les roches
calcaires à fades de grauwacke font ti'ès-probablement
partie du terrain crétacé, je considérerai provisoirement
les micaschistes comme représentant autant d'affleurements
locaux des terrains de ti'ansilion, que les cataclysmes violents
dont cette contrée a été évidemment le théâtre, auront
mis à nu, postérieurement à la formation des roches fossilifères
qui occupent les régions supérieures du mont Lokman.
En effet, près de son sommet, la montagne s'aplatit en
une surface ondulée, dominée de tous côtés par des pics
composés particulièrement de la roche verdâtre compacte ci
aspect de grauwacke; une partie de cette surface revêtue
de dépôts détritiques est consacrée à la culture des céréales,
et c'est au milieu des champs labourés, que se trouvent disséminés
en très-grand nombre des fragments et des moules
de Hippurites cornu-vaccinum ; or., comme les moules qui
pour la plupart représentent ces fossiles, sont remplis de
calcaire noir ou gris sale, de quartz ocreux et de conglomérats
fins, très-compactes, c'est-à-dire de substances
parfaitement identiques avec celles qui composent la charpente
solide de la montagne (y compris les roches à fades
de grauwacke), il ne saurait guère y avoir aucun doute que
les fossiles susmentionnés ont été détachés des roches limitrophes,
à la suite de la désagrégation de ces dernières,
bien que, malgré toutes mes recherches, je n'aie pu découvrir
nulle part in situ des restes quelconques de corps organiques,
découverte que des investigations plus étendues et
surtout plus prolongées ne tarderont probablement pas à
eifectuer.
Des côtés du nord et du nord-ouest-nord, le mont
Lokman se rattache à un rempart qui continue à longer la
vallée de l'Iris, rempart dont le versant est hérissé de
masses de calcaire gris ou noir, qui forme de longues murailles
ou crêtes, descendant depuis le sommet jusqu'au
pied de la montagne. Ces bandes de calcaire noir ou gris
se trouvent séparées les unes des autres par d'auti'es bandes
à surfaces mamelonnées, composées de roches verdâtres, à
fades de grauwacke (p. 97). Les deux zones se distinguent
au loin d'une manière fort tranchée, car la roche
à fades de grauwacke forme des stries foncées à surfaces
ondulées, tandis que les masses calcaires ont une teinte
plus claire et des contours saccadés, anguleux ou colonnaires.
Vis-à-vis du mont Lokman la l'ive gauche de l'Iris est
également bordée de montagnes à contours très-variés ;
souvent elles ne consistent qu'en un petit nombre d'énormes
bancs ou strates, soit verticalement redressés, soit plongeant
au sud-ouest-sud ; parmi ces massifs, fréquemment
couronnés par les ruines de vieux châteaux, il en est deux
c{ui frappent à cause de leur aspect pittoresque; l'un, le
plus occidental et le plus élevé, est désigné par le nom de
montagne aux quarante martyrs, nom qui se rattache à
une légende religieuse, qui rend cette localité un objet de
vénération pour les chrétiens.
Vue du haut du mont Lokman, la vallée de l'Iris avec
la ville d'Amasia, se présente comme un cordon d'émeraude,
se détachant d'une manière tranchée des montagnes pittoresques
qui l'encadrent; c'est peut-être à cause de l'aspect
verdoyant de cette vallée que les Turcs ont donné à l'Iris
le nom de rivière verte (Yeschil Irmak), car la couleur de
son eau n'a rien qui puisse justifier cette dénomination.