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superliciels ont pour base immédiate le terrain crétacé.
Malgré l'excellent parti qu'il eût été aisé de tirer de ces
plaines fertiles qui, entre Adabazar et Sukuneri, ont plus
de o lieues d'étendue de l'ouest à l'est, avec une altitude
moyenne de iOO mètres, et dont le développement dans la
direction du nord et surtout dans celle du sud paraît être
encore plus considérable, toute celte région n'est qu'une
vasie et déserte solitude, uniquement animée par le souvenir
des riches populations qu elle a dù nourrir jadis, ainsi
que le prouvent les nombreux débris d'antiques cités, de
voies, de ponts, etc.
Gomme dans la partie de la plaine comprise entre Adabazar
et Sukuneri, les montagnes (d'ailleurs souvent masquées
par les épais fourrés) ne se trouvent nulle part à la
portée d'une observation directe, je ne puis en apprécier la
constitution géologique que par voie d'induction et d'analogie.
Dans la direction du nord, l'horizon est limité par des
hauteui's à contom's doux, qui évidemment se rattachent d'un
côté aux montagnes limitrophes d'Ismid, et d'un autre côté
à celles de la zone crétacée d'Ekhtyoglou et d'Abdi Pacha;
ce qui permet d'admettre avec beaucoup de probabilité que
toutes ces montagnes font partie du même terrain crétacé ;
mais il n'est pas également facile d'étendre cette supposition
à l'égard des massifs beaucoup plus élevés et fort boisés
qui limitent du côté du sud la plaine dont il s'agit, et parmi
lesquels on distingue des groupes qu'on me désigna sous les
noms de Kutchuk Dagh et Krimisi Dagh, groupes probablement
compris dans les deux grandes chaînes appelées
collectivement Rarakaya et Karmulu Dagh; à une distance
considérable au sud-est de ces deux chaînes, on voit surgir
les sommets tronqués du Moudourlou Dagh , dont les flancs
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sont complètement blanchis par la désagrégation des roches
qui composent cette montagne , ce qui la fait apparaître
comme couverte de neige.
Dans l'incertitude où je suis, relativement à la composition
géologique de tous ces massifs, je les ai provisoirement
rapportés aux terrains dans la proximilé desquels
ils se trouvent; en conséquence, j'ai colorié sur ma carte
comme crétacé le groupe montueux de Karmulu, et j'ai
rangé dans le terrain jurassique le massif de Moudourlou,
situé dans les parages limitrophes de ceux qui m'ont foui'ni
des fossiles caractéristiques pour ce terrain.
Sukuneri est un misérable village exclusivement turc
dout l'altitude est de 143 mètres; il est traversé par un
ruisseau à rives limoneuses et à eau presque stagnante qui
atteint à peine le Sakaria. La fraîcheur et l'humidité des
nuits y contrastent fortement avec la température élevée du
jour : opposition qui s'y manifeste également entre les températures
de l'été et de l'hiver, car aux chaleurs estivales
généralement intenses, ainsi que je l'ai expérimenté sur les
lieux, succèdent des froids tellement rigoureux que, pendant
l'hiver, les ruisseaux se couvrent de glace et que la
neige revêt la contrée pendant plusieurs mois. L'altitude
peu considérable de cette partie de la presqu'île bithynienne
ne suffit point pour expliquer la rigidité de ses hivers; ce
phénomène doit particulièrement tenir à l'action combinée
du voisinage de la mer Noire et de la disposition des montagnes,
formant au sud de cette région un rempart presque
ininterrompu, depuis le méridien de Brousse jusqu'à celui
d'Eregli, rempart qui intercepte les vents du sud et expose
la contrée à l'action exclusive des vents glacés du nord.
A une lieue environ, à l'est de Sukuneri, la plaine se