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schisteuse), elles changent tellement d'aspect que, sans les
quelques alvéolines et bivalves éocènes qu'elles renferment,
on eût éprouvé de la répugnance à les considérer comme
faisant partie des calcaires blancs crayeux, horizontalement
stratifiés, qui dans tout le reste de la vallée d'Aratch caractérisent
le terrain tertiaire inférieur. Ici, au contraire, la
roche est compacte, de teinte rose ou rouge de cliair, éclatant
sous le marteau comme une dolomie, et. de plus, elle
est souvent disposée en couches fortement redressées. Ce
calcaire éocène, à aspect et à allures si anormaux, finit par
disparaître sous les dépôts puissants de sable, qui s'accumulent
à mesure que l'on gravit le plateau très-accidenté
et profondément raviné de Tascbbounar, par lequel se
trouve fermé du côté de l'est-nord-est l'embranchement
septentrional de la vallée d'Aratch. Ce plateau, c[ue j'ai
rangé provisoirement dans le terrain de transition, est dans
tous les cas d'un âge antérieur à celui des dépôts éocènes
qui occupent presque exclusivement la vallée d'Aratch, et
dont j'ai approximativement fixé la limite orientale à 1 lieue
environ à l'ouest-sud-ouest du village Taschbounar.
La portion du plateau de Taschbounar que l'on traverse
pour se rendre d'Aratch à Kastamouni n'est qu'une bande
assez étroite qui s'allonge du sud-est-sud au nord-ouestnord
et sépare les dépôts éocènes de l'Aratch Sou de ceux
du Gueuk Irmak. Cette bande de terrain de transition (?)
ne paraît être qu'une saillie locale du massif de l'Ilkas
Dagh, laquelle probablement formait un promontoire dans le
golfe éocène, dont l'Ilkas Dagh était le rivage méridional.
Aussi, à mesure qu'on remonte la vallée d'Aratch pour se
rapprocher du plateau de Taschbounar, on voit s'accumuler
les galets et blocs de roches du terrain de transition (?),
lesquels représentent peut-êti'e les premiers dépôts littoraux
do cette partie de la mer éocène.
V I .
Le plateau de Taschbounar peut avoir environ 3 lieues
de largeur de l'ouest à l'est. On descend par son revers
oriental dans la vallée de Kastamouni dont la physionomie
frappe vivement les yeux du géologue, en le transportant
comme par enchantement dans ces vastes et souvent énigmatiques
régions de grès et marnes rouges (avec ou sans
dépôts de gypse) cjui jouent un rôle si important dans toute
l'Asie Mineure et qui, dans la vallée de Kastamouni, de même
que partout ailleurs, se présentent sous la forme de montagnes
arides à contours arrondis ou linéaires, coloriées de
teintes diverses, ce qui donne à la contrée, lorsqu'on l'aperçoit
d'une certaine hauteur, l'aspect d'une gigantesque
nappe fortement ondulée et diversement boursouflée, aspect
tellement original qu'il suffit de l'avoir vu une fois pour ne
plus jamais l'oublier.
Mais ce qui assure à la vallée et surtout aux environs
immédiats de Kastamouni une véritable importance aux
yeux de Texplorateur de l'Asie Mineure, c'est qu'il y trouve
la solution d'une question qu'il a été tant de fois dans le
cas de s'adresser sans pouvoir obtenir une réponse satisfaisante,
la ciuestion de savoir à quel âge appartiennent tous
ces dépôts de grès et de marnes bigarrés qui se produisent
presque sur tous les points de la péninsule anatolicj:ue. Or,
si des considérations d'analogie ont pu le porter à ranger
ces dépôts dans le terrain tertiaire inférieur, ainsi que j'étais
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