Dès longtemps ces populations ont dû jouir d’une certaine tranquillité,
les razzias des pachas de Yiddin qui désolaient la plaine
et remontaient parfois le long de l’Oltu jusqu’à Râmmc, n allaient
pas jusque-là. C’est à peine si quelque vieux paysan se rappelle « le
temps des Turcs. »
Aussi la population est-elle ici plus serrée que partout ailleurs
en Olténie. Elle oscüle entre 80 et 100 habitants par kilomètre carre.
Peu de gros bourgs et d’habitations isolées, mais un grand nombre
de petits villages, de 400 à 500 habitants en moyenne, qui s’établissent
au pied de la montagne, au débouché d’une vallee, sur la
terrasse de caüloutis entamée par la rivière, ou sur le flanc d une
des croupes qui séparent deux dépressions. Pas de grande ville, les
difficultés des communications ne prêtent pas à la circulation ; mais
toute une série de marchés qui sont connus au loin. Târgu Jiu doit,
comme son nom l’indique son importance aux foires qui s’y tiennent
deux fois l’an et aux marchés qui y attirent chaque semaine toute
une population de bergers, marchandes de fruits et petits artisans.
Des foires importantes se tiennent aussi à Cârbunesci et à Yaidem
au printemps, à Brâdiceni au mois de septembre.
Ainsi par son relief, son histoire géologique, son climat, son hydrographie,
sa population, la zone des dépressions subkarpatiques mérite
d’être considérée comme un tout à part. On doit cependant ne pas
oublier que chaque dépression a son individualité. La plus éten ue
et la plus profonde est celle dont Târgu Jiu occupe le centre et
qu’arrose le Jiu, débouchant de la montagne à Bumbesci. Elle semble
encore exercer une sorte d’appel sur toutes les eaux qui descendent
des Karpates entre Tismana et Polovraci et c’est à peine si le Gilortu
échappe à son attraction.
C’est à l’O. du Jiu qu’on trouve le mieux réalisé le type des
dépressions subkarpatiques, telles que nous les avons décrites. Ce
sont de larges plaines nettement limitées et séparées par des dos de
terrain d’une élévation relative, variant entre 30 et 80 mètres. Leur
altitude moyenne est à peu près celle de la dépression de Târgu Jiu.
Les. cours d’eau y entaülent faiblement la terrasse de cailloutis et
ont une allure divagante.. A l’E. du Jiu, on trouve au contraire des
plaines relativement peu étendues, d’une altitude moyenne supérieure
à 500 mètres, à peine séparées l’une de l’autre par des ondulations
presque insensibles et entaillées profondément par des
rivières qui parfois entament la roche en place. A Polovraci, l’Oltejn
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s’est scié une gorge profonde jusque dans le sarmatique et le flysch
tertiaire plissés et recouverts par les cailloutis pliocènes 1. A Yäideni,
le Luncaveju a creusé son lit dans les grès du flysch éocène fortement
plissés. Il paraît évident que l’affaissement a été ici moins notable
qu’à l’O. du Jiu et l’érosion y est actuellement très intense.
A l’E. de l’Oltu, nous retrouverons les dépressions subkarpatiques
de moins en moins nettement accusées ; leur véritable aire d’extension
est dans le département de Gorj, entre Tismana et Bumbesci.
A l’E. du Jiu, on a plutôt de hautes terrasses auxquelles on peut
donner le nom de terrasses subkarpatiques et dont le type le plus
parfait est la terrasse de Polovraci. Mais malgré des différences de
structure physique, on reconnaît aisément une parenté d’origine et
d’aspect avec les plaines de Tismana et' de Brâdiceni. Le sol est
aussi fertile, la population aussi dense et aussi active.
Les centres d’attraction ne peuvent cependant être les mêmes. A
l’E., les foires de Yäideni et de Cârbunesci attirent les paysans ;
mais à partir de Polovraci, c’est surtout vers la vallée de l’Oltu que
descendent les carufe aux jours de marché; Râmnie, Târgu Ocna
et Kîureni, la ville des grandes foires internationales sont connues
des plus petits enfants. A l’O., Târgu Jiu est la métropole, mais du
coté de Tismana, on est plutôt attiré vers le bourg commerçant de
Baïa de Arama. Caché derrière un rideau de hautes collines que
le Motru traverse en une vallée étroite, au milieu d’un bassin
d accès difficile, lorsqu on vient du S., Baïa de Arama est une petite
ville tout entière tournée vers la montagne et qui marque à peu près
la limite de la zone des dépressions subkarpatiques avec ce que l’on
a appelé le H aut plateau de Mehedinpi.
II
Pour comprendre la nature de cette région, on fera bien de gravir,
par une claire matinée, quelqu une des crêtes calcaires qui dominent
la vallée de la Cerna, vers Herculesbad (Sulija ou Lunca Câinelui).
En tournant le regard vers l’E., on voit, au-dessous d’un abrupt bien
marqué, s’étaler une sorte de plateau mamelonné, qu’entaillent des
vallées étroites et profondes. L ’ensemble a l’allure d’une espèce de
cuvette très légèrement concave et inclinée vers le S., au centre de
1. IC. K. Redlich. Geologische Studien im Gebiet des Olt Rumänien, Jahrb. K. K. Geol. Reichsanstalt, XLIX, 1899, p. 1. und Oltetzthales in