offrir un pays relativement peu accidenté, où Fallure générale du
relief dépend, en grande partie, de la disposition d’un réseau hydrographique
très développé, où lés différences climatiques sont dues
à des faits très généraux plutôt qu’à des différences locales de relief ;
contrée habitée par une population assez dense, et qui tend à augmenter
sans cesse, riche de souvenirs historiques et consciente de ses
affinités naturelles.
On ne saurait cependant considérer comme extérieur à la Yalachie
le rem part montagneux qui la sépare de la Transylvanie et du Banat.
Physiquement, la Yalachie est une dépendance des Karpates, comme
la Bulgarie des Balkans. C’est au noyau cristallin qui constitue
encore maintenant presque toute la chaîne, qu’ont été arrachés les
matériaux dont le lent dépôt dans les mers et les lacs saumâtres
de la fin du tertiaire, a formé le sol de la Yalachie. Ce sont les
alluvions des torrents qui ruisselaient à l’époque diluviale, descendant
de la chaîne karpatique, qui, en s’étalant dans les parties en
voie d’affaissement, ont nivelé la grande plaine valaque 1. Actuellement,
c’est au bourrelet montagneux des Karpates, contre lequel
se heurtent les vents d’E., que la Yalachie doit les pluies relativement
abondantes qui l’arrosent, surtout dans sa nartie occidentale,
et permettent à de nombreuses rivières de traverser, malgré des étés
brûlants, une plaine desséchée, pour aller rejoindre le Danube. Sans
ces rivières, dont les vallées abritent une population qui atteint et
dépasse 100 habitants par kilomètre carré, toute la région des plaines
serait à peu près déserte. E n m ettant à part les vallées de Mostistea
et de Jalomita, on trouve, pour la terrasse du Barugan, une densité
de population qui n’atteint pas 10 habitants par kilomètre carré 2.
Historiquement même, les Karpates ont été, en quelque sorte, la
source de vie de la Yalachie roumaine. Ils étaient déjà la citadelle
des Daces « Daci montibus inhaerent. » Ils furent, pendant les invasions
barbares, le refuge de la population romanisée qui n ’émigra
pas au S. du Danube avec les légions d’Aurélien. Au moment où la
domination hongroise tendait à s’implanter en Yalachie, en fondant
le Banat de Severin, elle respectait encore les privilèges des Yalaques
1. L’étude des cailloutis du Bârâgan a montré qu’on avait affaire non à des
alluvions danubiens mais au cône de déjection d’un grand fleuve descendant des
Karpates (cf. chap. XII).
2. Densités de là population de la vallée de Ialomifa, 118 h. p. kmq.; Mostistea,
128 ; Bârâgan à FE de Mostistea, 7, à l’O. 6,8.
établis dans les districts montagneux. Béla lçur réserve la terre de
Lyortioy, qu’ils occupaient de temps immémorial « terra Knezatus
Lyortioy woiwode quam Olahis relinquimus prout lidem hactenus
tenueruwb h » L a légende de la fondation des principautés, qui fait
venir Radu Negru des Alpes de Eogarash, symbolise un fait réel, la
lente conquête de la Yalachie par l’élément roumain descendant des
montagnes vers la plaine. Les plus anciennes capitales valaques, les
sièges des anciens évêchés, Râmnic, Câmpullung, Târgoviste, sont
toutes au pied de la montagne.
Il faut donc accorder une place importante aux Karpates dans une
description de la Yalachie, mais cette place doit être une place à
PatILl semble qu’on doive agir de même avec la vallTé,e danubienne.
Il est difficile, en effet, de la rattacher à la région des plaines
valaques. Ses marécages, son dédale de canaux, d’îles boisées, de
bras morts à demi cachés sous les roseaux, solitudes qu’animent
seules des troupes d’oiseaux innombrables, sa population, exclusivement
groupée sur les hautes berges limoneuses qui dominent souvent
directement le fleuve, tout contribue à en faire un monde a part.
Une division en deux parties, séparées par l’embouchure de l’Oltu,
l’une rattachée à l’Olténie, l’autre à la Munténie, serait contraire
à la réalité. Les contrastes que peut présenter la vallée danubienne
exigeraient plutôt une division en trois sections : section supérieure,
jusqu’à Calafat environ ; section moyenne, où commencent à se montrer
les lacs latéraux, jusqu’à Calara,p ; section inférieure, où s étale
la Balta, le grand dédale de marécages que le pont de Cernavoda
traverse en ligne droite sur une largeur de 15 kilomètres.
La vallée danubienne n’est cependant, pas plus que les Karpates,
quelque chose d’extérieur à la Yalachie. Elle lui appartient naturellement,
beaucoup plus qu’à la Bulgarie prébalkanique et à la Do-
brodgea. Physiquement, l’histoire du grand fleuve est liée à celle de
la Yalachie ; sa vallée suit la grande faille qui a déterminé la formation
de la plaine valaque ; son thalweg forme le niveau de base qui
règle l’érosion des fleuves descendant des K aipates et cisèlent les
collines tertiaires. La masse puissante de ses eaux soutient ces
rivières, indigentes en été, refluant même dans leur lit au moment
des grandes crues. Aboutir à la mer est une nécessité pour un réseau
1. Diplôme de Béla, 2 juin 1247, Urkundenbuch z.- Gesch. Siebenbürgens,
p. XXXVIII.