énorme du Bucegiu, qui représente encore un autre type de montagne.
Là, dominent les conglomérats cénomaniens, appuyés sur les calcaires
tithoniques de Strunga. Leurs bancs épais et compacts ont
résisté à une érosion séculaire et rien ne peut donner idée des
aspects fantastiques, qu’offrent leurs escarpements gigantesques (v.
planche GY). La forme générale du massif est, comme nous l’avons
vu, en rapport avec la tectonique, mais c’est à l’action glaciaire qu’il
faut attribuer le découpage dans le bloc compact d’arêtes étroites et de
cirques aux parois presque verticales, tel qu’on l’observe tout autour
du point culminant (Omu, 2,510“). L ’amphithéâtre, formé par la
crête en fer à cheval et .sur les flancs duquel ruissellent les eaux
rassemblées par la Jalomij;a, est richement boisé jusqu’à des altitudes
très élevées. Le fond de la vallée offre une succession d’élargissements
où s’étalent des prairies, et de gorges sciées dans le calcaire,
comme celle où se trouve la célèbre grotte et le monastère
hypogée de Jalom ifa1.
Avec le Bucegiu, on n’a pas encore épuisé la série d’aspects variés
qu’offre cette région unique. Il faut gagner par Strunga et Sfîntu
Ilie le massif cristallin du Leota, pour voir le paysage changer complètement.
Plus d’escarpements ruiniformes, plus de brusques dénivellations,
plus de vallées étroites et encaissées ; l’oeil se repose sur
les formes arrondies familières dans les Alpes transylvaines. Le
Leota est en effet le dernier témoin avancé de l’extension du grand
continent cristallin, recouvert ici par un épais manteau de sédiments.
Il peut paraître singulier de vouloir faire une région naturelle
d’un ensemble montagneux aussi hétérogène. Son unité est cependant
dans cette variété même d’aspects, qu’on ne retrouve ni à l’E.
de la Prahova, ni à l’O. de la Dâmbovifa. C’est une région de transition,
et Bétonnante richesse de formes qu’on y observe est en
rapport avec une histoire géologique d’une complexité sans exemple
dans les Karpates valaques. Si, par les formes alpines et l’élévation de
1. Les récits d’excursions à la grotte sont innombrables. Le plan et la description
en ont été donnés par M. P o p o v ici-H a tz e g . La Grotte Bull. Soc. Ingen. Bue., I. Le club karpatique de Sinaïa a lait dfea irSec hdietsu aJmaléonmaigtae,
dmeesntrtusc tqiuoin rdeensd seunpt elrab evs isstiatela efaticqiluee, s mpaaris d edso vnat nldea lreéss.u Illt aetx ilset ep ulunse scelcaoirn dae égtréo tltae sdearnasi t laeqnuceolrlee polnu sp ébneèllter eq puae rn u’ént acito ulalo iprr eomù ilè’oren (ac odme ml’euanuic ajutisoqnu ’dàu m siu-cpoérrpiesu ;r edllue monastère). Bonnes photographies in T o u la . Eine geologische Reise, loc. cit. et
Pax. Grundzüge der Pflanzenverbreitung in den Karpaten.
ses sommets, ce pays rappelle les Alpes transylvaines, tandis que ses
vallées peuplées, sa viabilité, son caractère ouvert, le font rattacher
aux monts du Buzeu, on reconnaît dans cette situation équivoque
comme le pendant d’un passé géologique troublé, ou la région fut
constamment disputée entre le massif cristallin valaque et la mer
qui formait les sédiments karpatiques. C’est aux mouvements de
transgression et de régression, qui ont été la conséquence de cette
lutte, qu’est due la variété de faciès des couches géologiques, et par
suite la variété des aspects du relief.
Zone de transition entre les Alpes transylvaines et les Karpates
Moldaves, les monts du Bucegiu sont devenus, grâce à leur situation
et à leur viabilité, une région de passage, par où communiquent
depuis longtemps, les centres populeux situés de part et d’autre des
Karpates dans la plaine de Kronstadt et dans la région des collines
valaques. C’est par le col de Bran, que la tradition fait descendre le
fondateur transylvain de la principauté roumaine de Valachie. Il
est certain que les relations ont dû être fréquentes entre la principauté
naissante, dont la capitale était Câmpullung, ët les Roumains
transylvains. Actuellement encore, pour le paysan du département
de Musoel, Braçov est la grande ville où l’on va faire ses provisions
d’outils, de vêtements, d’objets manufacturés. La route la plus belle
qui traverse les Karpates valaques est celle qui passe au col de Bran.
Tout du long de cette voie, la population forme une traînée continue
de R ucâr à Kronstadt. Tantôt, elle se concentre en gros bourgs qui
sont presque de petites villes comme Rucar, en villages cachés au
fond d’un petit polié, comme Podu Dâmbovijei; tantôt, elle s’égrène
en habitations isolées qui se blotissent dans les vallées là, où elles
s’élargissent un peu, ou se dispersent sur les pentes fertiles. Nulle
part, les habitations permanentes isolées ne montent aussi haut. On
voit des champs de maïs à 1,200 mètres.
La voie de la Prahova, qui prend de jour en jour plus d’importance,
est de date plus récente. Les gorges de la rivière entre Sinaïa
et Comarnic, n’étaient pas faciles à tourner. Le monastère de Sinaïa
a été le premier centre de peuplement. Ce n’est qu’au siècle dernier
que la population a commencé à remonter vers Predeal l. Le chemin
de fer, la grande route très bien entretenue, le développement des
centres industriels comme Azuga, précipitent de plus en plus ce
mouvement.
1. Diction. Géogr. Dép. Prahova, article Sinaïa, Pubt. Soc. Géogr. Roum.