les rares précipitations tombant sous forme de neige sur le sol gelé
sont perdues pour les rivières qui atteignent le point le plus bas de
l’échelle.
Les courbes mensuelles (fig. 33), ne suffisent pas à caractériser le
régime de rivières comme les cours d’eau valaques. Il faudrait suivre
jour par jour leurs variations pour faire comprendre leur extrême
sensibilité aux influences météorologiques. La figure 34 donne une
idée des sautes brusques qui les caractérisent.
F igure 34. — Niveau de l’Oltu à Slatina et de la Jalomita à Coçereni pendant
les mois de juin, juillet et août 1901.
U n des faits les plus curieux que révèle l’étude de pareilles courbes
est que les oscillations paraissent généralement plus brusques et
de plus grande amplitude aux stations de plaine, qu’à celles voisines
de la montagne.
Il est permis de croire, que cette apparence paradoxale disparaîtrait
si Ton pouvait substituer aux côtes brutes l’expression en hydrogrades
du niveau des cours d’eau ainsi qu’on le fait pour le Danube h Ce
qui tendrait à le prouver, c’est que le régime de l’Oltu, fleuve d’origine
lointaine et déjà formé lorsqu’il entre en Valachie, n offre pas
les mêmes différences entre îtam nic et Slatina que le Jiu entre Targu
Jiu et Craïova, ou la Jalom ija entre Târgoviste et Co?ereni.
1 On appelle hydrograde la dixième partie de la différence entre le plus haut
et le plus bas niveau observé à une station. Le niveau de la rivière exprimé en
hydrogrades permet donc de comparer deux stations dont le profil et le débit
moyen sont différents.
Le Jiu est une des rivières où l’anomalie signalée est la plus apparente.
On peut se l’expliquer. Lorsqu’il débouche dans la dépression
subkarpatique de Târgu Jiu, la pente qui atteignait 8 mètres par
kilomètre dans le défilé du Surduc, reste encore supérieure à 5 mètres
jusqu’à Târgu Jiu, et ne s’abaisse à l m46 que de Târgu Jiu à Moï1.
Sur ce plan incliné, les eaux doivent s’écouler rapidement, mais le
lit démesurément large, souvent dépourvu de berge sensible d’un
côté permet aux hautes eaux de s’étaler. De plus la gorge du Surduc,
retarde, quand elles ne sont pas trop violentes, les crues originaires
du bassin de Pétroseny jouant le rôle d’une sorte d’écluse.
De Moï à Craïova, la pente de la rivière s’abaisse à 0oe75 par
kilomètre et serait encore plus faible, si l’on tenait compte de toutes
les sinuosités du courant, accompagné souvent de bras morts. Mais
le Jiu reçoit à Moï, Pesceana et Filiasi, des affluents d’origine karpa-
tique qui viennent modifier complètement sa nature. L ’étude des
cartes hydrologiques quotidiennes, montre d’une façon incontestable
que toutes les brusques montées du Jiu à Craïova sont dues au
Gilortu, qui descend du versant méridional du Paringu, à la Tismana
et au Motru. Ces deux dernières rivières, originaires de la région des
monts du Vulcan et de la Cerna, la plus pluvieuse de toute la Valachie,
et la seule où les précipitations soient encore abondantes en
hiver, font après les maigres d’automne, remonter le niveau du Jiu
jusqu’au milieu de décembre. Leur débit est d’ailleurs soutenu par
les sources de la région calcaire de Baïa de Arama — Ponoareîff- Clo-
sani. Grâce à elles, le Jiu est de toutes les rivières valaques celle où les
maigres d’hiver sont le moins sensibles et le moins longs. Les crues
qu’elles amènent à Craïova tiennent généralement plusieurs jours et
ont une influence sensible sur le Danube.
Tout autre, est le caractère des crues dans le cours supérieur du
Jiu. EJles passent comme une vague, sans presque laisser de trace
dans la courbe des niveaux du fleuve, d’autant plus terribles qu’elles
sont plus soudaines et plus inattendues. En août 1900, une crue extraordinaire,
venue de Petroseny a fait monter le niveau du Jiu à
Târgu Jiu à près de trois mètres au-dessus de Tétiage, et détruit
tous les ponts sur la route du Surduc. C’est alors qu’on a pu apprécier
le rôle joué par ce défilé. La masse énorme d’eau, précipitée le 12 sur
1. E. DE Ma rto n n e. La crue du Jiu en août 1900, Ann. Instit. Météorol. de Boum.
1900,