fertiles de la zone des collines. La terrasse, elle-même, est loin d’être
partout la steppe presque déserte qu’on observe dans le Bâragan. La
région arrosée par l’Arge^ et la haute Jalomifa forme comme une
zone de population relativement tres dense, qui traverse la "V alacbie
du N. au S., en passant par Bucarest. De pareils contrastes de peuplement
doivent avoir pour cause des contrastes physiques.
Il suffit, pour le reconnaître, de prendre un m atin l’express de
Constanza à Bucarest. Après la traversée du Danube sur le pont
monumental de Cernavoda, commence le Bâragan. Quand le regard
s’est saturé du spectacle monotone de ces grandes plaines, où les
acacias plantés près des gares sont les seuls arbres, les tum uli les
seuls accidents de terrain, où les fourrés de chardons géants alternent
avec les champs labourés m ontrant la terre noire, on éprouve comme
une agréable surprise en approchant de Bucarest. Sans doute, c’est
toujours la même plaine à perte de vue, mais des taillis de chênes
surgissent çà et là, barrant l’horizon, des ondulations du sol apparaissent,
des sortes de vallées sèches à section très large se dessinent ;
une herbe verte y pousse, parfois un petit lac, un ruisselet, marqué
par une traînée de joncs, en occupent le fond. Sur la terrasse même,
une foule de petites mares, entourées quelquefois de bouquets
d’arbres ; sur le bord des vallons, les maisons se groupent. C’est un
autre pays, où il semble que l’eau ait ramene la vie.
Qu’est-ce donc que la plaine valaque, et quelles sont les raisons de
ces contrastes physiques et économiques ?
Le nom de plaine n ’est peut-être pas celui qui convient le mieux
à cette région. Lorsqu’on descend la vallée du Danube, on la voit
presque constamment dominée, a gauche, par des coteaux, plus
humbles sans doute que la haute falaise de la rive bulgare, mais
qui forment cependant une ligne de relief assez nette. C’est le rebord
de la soi-disant plaine, qui domine le Danube de 50 mètres à Fetesei,
de 80 mètres et plus à Giurgiu et Turnu Màgurele. E n réalité, la
« plaine valaque » n’est, en Munténie comme en Olténie, autre chose
qu’un plateau, formé de cailloutis recouverts de loess, et raviné par
un certain nombre de vallées.
L’âge de ces cailloutis est quaternaire, comme celui du loess. Les
coquilles et les mammifères trouvés ne laissent là-dessus aucun
doute 1. Le loess, recouvert de 30 à 60 centimètres de terre arable,
1. Gr. STEFANESCu.Le chameau fossile de Roumanie, Ann. Mus. d. Géol. (1894),
Bue., 1895.
souvent noire, et très semblable au tchernoïzem russe, présente généralement
deux niveaux : un niveau supérieur rougeâtre, un niveau
inférieur blanchâtre ou jaunâtre, plus sablonneux, avec des concrétions
marneuses blanches 1. Parfois, il repose directement sur des
argiles bleuâtres, probablement tertiaires 2 Ou sur des sables plio-
céniques 3 ; le plus souvent il passe, par l’intermédiaire d’une argile
sablonneuse, à des sables et graviers plus ou moins grossiers, qui
reposent presque partout sur une couche argileuse compacte 4.
On conçoit l’intérêt que présenteraient des études détaillées de
ces dépôts. On manque malheureusement trop de données précises
sur leur épaisseur, leur composition, la nature de leur soubassement,
pour pouvoir essayer de reconstruire le réseau de rivières torrentielles
qui les ont étalés sur le fond du lac pontien desséché. D’après
la nature des roches trouvées aux environs de B ucarest5 et dans le
sondage de M arculesti, en Bâragan 6, on peut conclure que la terrasse
diluviale n’est pas une terrasse danubienne. Le Bâragan apparaît
comme le cône de déjection d’un fleuve, qui devait descendre à peu
près de la région où la Prahova et la Jalom ifa actuelles prennent
leurs sources 7. C’est de ce côté que les eaux ont dû le plus raviner
le sous-sol, déposer des m atériaux les plus grossiers et la couche la
plus épaisse d’alluvions. Plus on va vers l’E., plus le loess est sablonneux,
et plus le gravier de base est réduit ; il a complètement disparu
sur le bord de la Jalom ifa8.
1. Gr. S t e f a n e s c u . Relation sommaire sur la structure géologique dans les
Jud. de Tutova, Falciu, Çovurlui, Jalomija et Ilfov, Ann. Mus. Géol. (1895), Bue.,
1898. — L ic h e r d o po l . Bucuresci.
2. Gr. St e f a n e s c u . Relation sommaire... coupe Jalomita à Stoenesci.
3. Gr. St e f a n e s c u . Le chameau fossile... coupe Slatina.
4. Coupe de la carrière de Floresca au N. de Bucarest : I. Sol arable, 0-60 ;
II. Loess argileux rougeâtre, 1-20 ; III. Loess argileux sablonneux, jaunâtre avec
canaux vermiformes et concrétions marneuses blanches, 3 mètres ; IV. Argile
jaunâtre très sablonneuse passant au sable fin, 1”50*; V. Sable grossier à niveaux
ferrugineux et stratification entrecroisée, 2 mètres ; VI. Gravier plus ou moins
grossier contenant quartzile, gneiss,' micaschiste, grès, jaspe, un peu de calcaire,
5-50 (Gr. St e f a n e s c u . Relation sommaire...)..
5. Gr . St e f a n e s c u . Relation sommaire.
6. A lim a n estea n u . Sondagiul din B árágan, Bul. Soc. Geogr. Rom., 1896.
7. L. Mrazec. Remarques sur le cours des rivières en Valachie.
8. Gr. St e f a n e s c u . Relation sommaire.