construits ; suivant l’endroit, on dit, c’est la coliba, ou, c’est le conac
de un tel.
En somme, la population bovine des montagnes est très réduite,
tandis que la population ovine est considérable. D’après les données
que nous avons pu recueillir, on peut l’évaluer approximativement
à 100 ou 150,000 têtes, réparties entre 200 stîne environ, et gardées
par plus de 1,000 bergers.
Il est intéressant de remarquer qu’une bonne partie de ces moutons
(la presque totalité, dans le Paringu), appartient à des propriétaires
transylvains, et va passer l’hiver en Roumanie, dans les pâturages
de la plaine voisins du Danube. Chaque année, lorsqu’ils arrivent
à la montagne et lorsqu’ils en partent, les ciobani les conduisent
à la frontière hongroise, où se fait le dénombrement (numuratoarea),
et d’où les toisons immaculées reviennent marquées de rouge ou de
bleu, suivant l’âge et le propriétaire. Ea nuTnaratoare est presque
une fête ; c’est le prélude du départ pour la plaine,; on y va gaiement,
aux sons du fluier, poussant lès troupeaux bêlants ; souvent on trouve,
au poste de frontière, des cabanes installées par quelque aubergiste
audacieux, toute une petite foire. On y rencontre des amis, des
parents.
Une grande partie des bergers qui paissent les moutons sur le
versant roumain des Karpates sont des Transylvains. Depuis l’Oltu
jusqu’au Jiu, à peu près toutes les stîne sont peuplées uniquement
de Poenairi, originaires du village de Poïana. A la question : « E t
toi aussi, tu es Poenar? » répond toujours le même sourire et le
même signe de tête.
IY
C’est à la Saint-Georges (fin d’avril) que les troupeaux arrivent
flana la montagne; c’est dans la première quinzaine de septembre
qu’ils partent généralement pour les pâturages de la plaine, voisins
du Danube, pour la Balta.
Dans les grandes stîne, ce départ est un événement important. On
s’y prépare pendant huit jours. Sitôt les moutons revenus de la
numaratoare, on ramène de la plaine le nombre nécessaire de chevaux
pour transporter les femmes et les enfants, les fromages, les
cojocs de rechange, les haquets et ustensiles de la fromagerie, avec
ce qui reste des provisions de maïs. Le baciu part d abord, avec
quelques chevaux pesamment chargés, emmenant les vaches et les
porcs ; puis ce sont les femmes et les enfants, qu’on voit juchés sur
la montagne de sacs et de cojocs, qui couvrent sans les écraser les
petits chevaux de montagne au pas tranquille et sûr. Ce sont de
curieuses caravanes, qui dévalent ainsi à travers la forêt, par les
sentiers défoncés, gagnant le village d’où ils sont partis cinq mois
avant.
Dans la stîna, il ne reste plus que les brebis et les ciobani, qui
vont les conduire à la Balta. Avant de partir, on démolit les bancs
qui servaient de lit et de table, on décroche la porte branlante et on
va les cacher derrière quelques rochers pour qu’ils ne soient pas
brûlés par les contrebandiers de passage à la fin de l’automne. Puis
on se met en route, lentement, sans se hâter. Les départs s’échelonnent
d’un endroit à l’autre, de sorte que, pendant tout le mois de
septembre, ces caravanes se rencontrent d’un bout à l’autre de la
Yalachie, soulevant sur les routes des tourbillons de poussière, arrêtant
les voitures, qui doivent laisser passer le flot bêlant.
Dans la montagne, on va par grandes bandes : plusieurs milliers
de brebis, dix ou douze ciobani campent parfois auprès d’un torrent,
remplissant toute une vallée. Lorsqu’on débouche dans la région
des collines, on commence à se diviser; chaque cioban prend 100 à
300 brebis et les pousse devant lui. Les uns s’arrêtent quelques jours
au bord de la montagne, les autres continuent tout droit. On met
en moyenne de dix à douze jours pour traverser la Valachie. A partir
de la fin de septembre, les solitudes du Bârâgan. les prairies marécageuses
du bord du Danube, sont peuplées de ces troupeaux, qui y vont
brouter pendant tout l’hiver l’herbe pointant sous la neige.
Les chemins de transhumance des troupeaux étaient, autrefois,
des voies spéciales, comme les caraires de Provence1; maintenant
ils suivent les grandes routes ; ce n’est guère que dans les districts
de plaine qu’on retrouve des pistes coupant à travers champs et
appelées encore le Chemin des brebis : Drumul oilor 2. Les directions
les plus suivies sont marquées approximativement sur la petite
carte ci-jointe. On peut voir que les points d’attraction sont les
plaines de caractère steppique, particulièrement le Teleorman, le
Bârâgan et la plaine du Buzeu.
1. Sur les caraires, voir F o u r n ier , Bull. Géogr. histor. et descriptive. 1900, p. 77.
2. Le Drumu oilor, dans les départements de Teleorman et Oltu, passe ¿ar les
j w B P S i Segarcea cUn deal- Doroôantu, Crângeni,(Diction. Géogr. dêp. Teleorman, p. 286. Miehâilesti, Slatina