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30 mètres au-dessus des eaux, et le chemin de fer actuellement
en construction perce les escarpements de l’Armàsaru en trois
tunnels, dont l’un atteint presque un kilomètre.
L ’hypothèse d’une faille doit être écartée pour expliquer la
percée de l’Oltu, comme pour celle du Jiu. Tout au plus pourrait-
on admettre une cassure superficielle dont il ne reste plus trace h
Inkey admet qu’à une époque peu éloignée, dont il ne cherche pas
à fixer la date, l’Oltu, au lieu de traverser les Karpates, s’écoulait
par Hermannstadt vers le Maros, et attribue à l’érosion remontante
d’une rivière valaque la capture du fleuve transylvain 2. L histoire
de l’Oltu serait ainsi assez semblable à celle du Jiu dans sa
dernière phase.
La voie la plus vraisemblable par laquelle on peut supposer que
l’Oltu ait jadis coulé vers le N„ est celle que forment les larges
vallées du Krummbach et du Weissbach, les flancs et le fond en
sont malheureusement ensevelis sous un manteau de loess qui rend
impossible leur étude détaillée. D’Hermannstadt a Salzburg ("V i-
zakna), où se trouve le partage des eaux, on- voit la terrasse de
cailloutis recouvrant les formations salifères exploitées à Salzburg,
s’incliner lentement vers le N. (Hermannstadt 427, terrasse du
Krummbach 419, Yizakna 400 mètres). Cette puissante terrasse
est sans rapport avec les ruisseaux qui la sillonnent actuellement.
Il n’est pas impossible que le point où la capture s est effectuée
soit le bassin sénonien et tertiaire de Brezoiu, qui se continue à
l’E. de l’Oltu jusqu’à Tisesti. L’Oltu miocène, affluent du Maros,
devait recevoir des Karpates un affluent important, peut-être le
Lotru lui-mêmé, qui rassemblait les eaux de la région Brezoiu-
Tisesti actuellement encore très arrosée. Le défilé de la Tour Rouge
est en effet beaucoup moins étroit que celui du Cozia. Lorsque,
d’un point dominant la plaine d’Hermannstadt, on regarde vers le
S. le panorama de la chaîne karpatique, la percée de l’Oltu n’étonne
nullement, car on voit la crête s’abaisser lentement vers la vallée;
seulement on a l’impression qu’un fleuve débouché la, et non qu il
va s’engouffrer dans la montagne (fig. 14).
1. Inkey . Die Transsvlvanischen Alpen, loc. cit. — Lehmann. Die Südkarpaten,
Zeitschr. d. Ges. {. Erdkunde, Berlin, 1883. C’est pourtant à la théorie tectonique
que se tiendrait encore Rehmann (Géographie de l’ancien domaine polonais,^ I. Les Karpates, Lemberg, 1895 (polonais), d’après l’analyse de Eugène R ômeb (Mitt.
K. K. Geogr. Ges. Wien., 1896, pp. 151 et sqq.),
2. Inkey. Die Transsylvanischen Alpen, loc. cit.
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Toute autre est l’impression lorsqu’on contemple des environs
de Calimanesci, la chaîne du Cozia, rempart qui semble exclure
toute percée fluviale. Les vallées qui traversent la chaîne du Cozia
en descendant de la crête principale des Fogarash offrent d’ailleurs
généralement des gorges d’une sauvagerie extraordinaire. Telles
les célèbres Cheile Argeçsului (gorges de l’Arges) qu’on traverse par
un sentier de chèvre, véritablement vertigineux.
F igure 14. Vue de la chaîne karpatique prise du Sesul Ungurilor,
près Hermannstadt. Dessin d’après nature.
y La Tour Rouge, entrée du défilé de l’Oltu ; w Negoiu.
Il est donc vraisemblable que la percée de l’Oltu à travers la
chaîne méridionale des Fogarash est de date récente. Si l’histoire
de la formation du fleuve, tel qu’il existe actuellement n ’est pas
encore élucidée dans tous ses détails, il est cependant assez probable
que le bassin de Brezoiu-Titesti peut être considéré comme le
théâtre de la capture, à laquelle la Y alachie doit d’être arrosée par
les eaux de l’Oltu transylvain.
Plus encore que l’Oltu, le Buzeu s’écarte du type de vallée de
traverse étranglée, que réalise le Jiu. Comme celui-ci, il se forme
dans une plaine située en arrière de l’arc karpatique, mais c’est
à peine s’il reste vingt kilomètres emprisonné dans une véritable
gorge. A Gura Sireului, la vallée s’est déjà dégagée ; jusqu’à son
débouché en plaine, elle ne cessera de s’élargir, perm ettant à de
vastes cônes de déjections de se développer à côté de terrasses alluviales.
Le fleuve entaille à peine en deux ou trois endroits la roche
en place.
D’un point élevé, on a l’impression que les hauteurs bordant la
vallée, sont comme ensevelies à moitié sous un manteau alluvial
qui s’accumule dans une dépression en voie d’affaissement. Il est
en effet très vraisemblable, que la percée du Buzeu a été déterminée
par l’affaissement qui affecte ici, non seulement la bordure
des Karpates, mais une partie de la chaîne elle-même h
1. Voir E. de Martonne. Sur la formation des vallées et les CR. Ae. Sc., loc. cit. mouvements du sol,