de millions d’étoiles, où le clair de lune brille d’un tel éclat qu’on
reconnaît au loin les pics familiers; les matins où s’étale dans les
vallées la mer des nuages, d’où sortent comme des îles les cimes les
plus élevées, tous ces aspects sont, pour qui n ’a pas fréquenté les
sommets dénudés, autant de mystères inconnus.
La montagne n ’est pas seulement plus pluvieuse que la plaine,
elle l’est autrement, d’une façon plus irrégulière, plus violente, plus
capricieuse en quelque sorte. Certains signes bien connus de quiconque
est familier avec la montagne, peuvent faire prévoir que tel
pic, qui se dresse au m atin dans un ciel serein, sera dans quelques
heures couvert de nuages, mais souvent le Cioban lui-même, qui
passe sa vie sur les hauteurs, répondra avec un sourire sceptique à
l’interrogation du voyageur : « Cine stie ? aça ie la munte ! » Qui
sait ? c’est la montagné !
Nous manquons de données précises pour évaluer l’accroissement
de la pluviosité avec l’altitude. En faisant la moyenne des stations
situées dans la même zòne altimétrique, nous avons trouvé les résultats
suivants :
Zone infér. à 100” 100 à 200 200 à 300 300 à 500 500 à 700 700 à 900
Nombre de stations. 35 44 8 14 10 3
Moyenne 534 "/" 571 778 866 901 876
Si l’on porte en abscisses et ordonnées, les sommes de pluie et les
altitudes, on obtient une courbe qui montre bien les relations de
la pluviosité avec le relief dans la région des collines, mais qui nous
abandonne au moment de passer dans la haute montagne (fig. 16).
Le maximum semble atteint vers
700 mètres et la courbe redescend ensuite
; mais ce résultat ne correspond
certainement pas à la réalité Les
seules stations que nous possédions
au-dessus de 700 mètres, sont en effet,
à part NucÿOara, des stations de vallée
(Sinaïa, Busteni), qui reçoivent beaucoup
moins d’eau que les pentes dégagées,
situées à même altitude. Dans
la zone de 200 à 700 mètres, nous
Figübe 17. — Augmentation des
précipitations avec l’altitude.
Courbe réelle et son prolongement
hypothétique (en pointillé).
avons plusieurs stations qui reçoivent plus de 1 mètre (Iioesci, 220m,
1,143 m/m ; Baia de Arama, 360m, 1,100 m/m ; Ocnele mari, 510m,
1,019 T 5 Besdeadu, 380m, 1,049 m/m ; Topesci, 670m, 1,287m/m.
Il n’est pas de phénomène climatologique pour lequel l’orientation
et la position topographique de la station ait autant d’importance
que pour la pluie. D’une manière générale, on constate en
Yalachie que c’est le pied des escarpements tournés vers l’E. et le S.
qui reçoit les plus fortes précipitations. On peut le vérifier en examinant
la situation de toutes les stations que nous venons de citer.
Si l’on veut prolonger d’une manière hypothétique la courbe exprimant
les relations du relief avec la pluviosité, on doit tenir compte
de ce fait que la courbe remonte brusquement entre 100 et
300 mètres, soit immédiatement avant le point où la courbe hypsogra-
phique de la Valachie présente un ressaut correspondant au contact
moyen des collines et de la terrasse diluviale (v. chap. I er). La principale
rupture de pente de la courbe hypsographique se produisant
ensuite entre 900 et 1,400 mètres, on sera amené à faire faire une
inflexion analogue à la courbe d’augmentation des précipitations.
On sait que la pluviosité n’augmente pas d’une façon constante
avec l’altitude, mais qu’après avoir atteint un maximum, dont la
position dépend d un certain nombre de conditions topographiques
et climatiques, elle décroît avec l’altitude sous l’influence de la
raréfaction de l’air et de réchauffement produit par la condensation
dans l’air ascendant h Cette zone de maximum qui, dans les Alpes
atteint 2,000 mètres paraît s’étendre sur le flanc S. des Karpates
valaques aux environs de 1,600 mètres, la somme annuelle des pluies
y serait voisine de 1,700 mjm.
C est en nous inspirant de ces principes que nous avons essayé de
compléter pour la montagne la carte pluviométrique, sans toutefois
oser faire aucune distinction au-dessus de 1,200 m/m. Nous avons
aussi tenu compte de la présence des dépressions longitudinales telles
que la vallée du Lotru, et la dépression qui sépare les deux chaînes
des Fogarash. Comme le fait est vérifié pour toutes les dépressions
subkarpatiques, ces régions doivent être le siège de minimas, par
rapport aux hauteurs qui les encadrent.
Le régime des pluies n’est pas tout à fait le même dans la montagne
que dans la plaine. D’après ce qu’on observe à Sinaïa, il semble
qu’il incline vers le régime continental; les pluies d’été s’y pourri
r i - ^Ur *a en°ore mal démêlée de la diminution de 1 altitude croissante, voir M la pluviosité avec a nn . Handbuch der Klimatologie, I, pp. 296 et sqq
Sur les relations entre l’augmentation des précipitations avec l’altitude et la
topographie, voir R. Huber. Die Niederschl8.ge im Canton Basel, Zurich, 1894.