suivent jusqu’au mois d’août, qui reçoit encore 8 % de la somme
annuelle. La différence est encore plus sensible si l’on envisage les
jours de pluie qui sont au mombre de 26 en juillet et août pour
Sinaïa, tandis qu’à Bucarest on n’en compte que 1 1 l.
E n comparant les cartes pluviométriques établies pour les quatre
saisons par M. Hepites 2, on peut constater qu’en biver la montagne
n ’est pas sensiblement plus pluvieuse que le reste de la Yalachie. C’est
en été qu’elle prend une supériorité écrasante. En automne et au
printemps, les fortes précipitations ne se rencontrent plus que dans
la région des sources du Motru, de la Cerna et du Jiu. Ce recoin, où
buttent à la fois les vents d’E. et du S., est sans conteste le point le
plus pluvieux de tout l’arc karpatique méridional. S’il en était ainsi
dès le début du quaternaire, on comprend facilement l’abaissement
de la limite des neiges éternelles et l’extension prise dans les monts
de la Cerna par les anciens glaciers.
Nous manquons de données pour apprécier la variation diurne de
la pluviosité, dont la périodicité est encore plus marquée en montagne
qu’en plaine. En général, c’est l’après-midi que les sommets se
couvrent de nuages et que les orages éclatent. On peut compter les
jours de l’année où les cimes restent libres du soir au matin, mais
souvent les nuées amoncelées sur les crêtes, à partir de midi, se dissipent
au coucher du soleil. Tout dépend de l’état général de l’atmosphère
et de la direction du vent, qui dépend elle-même autant des
conditions topographiques, que de la répartition des pressions barométriques.
Ce que l’on sait sur Sinaïa le montre bien. Dans l’étroite
vallée de la Prahova, tous les vents sont en quelque sorte canalisés
et réduits à souffler du N. ou du S. Ces deux directions représentent
à elles seules 49 % dans la rose des vents de Sinaïa.
I I I
Les hautes vallées sont souvent dans le même cas; le vent n’y
souffle guère que dans deux sens opposés, tantôt amoncelant les
nuages qui montent de la plaine, tantôt les balayant sur les crêtes.
Le paysan qui connaît la montagne a là dessus des idées assez
1. Coefficients pluviométriques et jours de pluie (entre parenthèses).
Sinaïa : J. 58 (6) 57 (5) 59 (61 104 (11) 115 (13) 250 (15) 144 (11) 95 (7) 93 (6) 80 (5) 72 (7) 74 (5)
Bucarest : 66 (6) 66 (5) 96 (7) 121 (8)' 111 (8) 218 (10) 116 (7) 73 (4) 78 (5) 73 (6) 87 (5) 95 (8)
2. H e p ite s . Régime pluviomélrique de la Roumanie, pl. II à V.
simples, et qui, somme toute, ne sont pas loin de la vérité. « Quand
le vent souffle d’en haut, alors tout va bien, quand il vient de la
vallée, ça se gâte ! » On dit encore que le vent du Danube amène la
pluie « Bâltâreful aduce ploia. »
Il est bien vrai que les vents du S. sont les vents pluvieux pour
le versant valaque des Karpates. Inkey avait justem ent remarqué 1
que souvent les nuages venus du S. s’amoncèlent pendant plusieurs
jours sur la crête des monts du Yulcan, sans se décider à passer
sur le versant N. C’est un curieux spectacle que de voir ces nuées
monter au galop les pentes sur lesquelles les pousse un vent furieux,
et tout d’un coup culbuter de l’autre côté de la crête en faisant
comme un plongeon, pour se dissiper en fumées. Mais ce régime ne
s’observe que pendant les périodes de pression atmosphérique relativement
élevée. TTn mois passé dans le massif du Paringu pendant
lequel nous avons éprouvé les changements de temps les plus variés,
et plusieurs séjours prolongés en divers endroits dans la haute montagne
nous ont amené à constater que les choses sont plus complexes.
On peut distinguer plusieurs types de temps en rapport avec l’état
du baromètre.
I. Dans le régime des très fortes pressions, les cimes complètement
dégagées se dressent toute la journée dans un ciel d’un bleu éclatant.
Ce régime qui dure rarement plus de deux ou trois jours en
été, conduit presque aussitôt au suivant.
II. Régime des pressions assez fortes. — Tous les matins au réveil,
on voit les sommets libres de nuages. Aussi loin que le regard s’étende,
le ciel est bleu et les crêtes baignées d’une lumière éclatante.
Là où il y a de grands contrastes de relief, la brise de montagne
souffle avec violence. A partir de septembre, les pentes déboisées
sont couvertes d’un frimas si épais qu’on croirait à une chute de
neige ; dans les vallées, la rosée a mouillé les herbes comme une
pluie prolongée, et l’eau dégoutte des branches d’arbres. Si l’on se
trouve à une certaine hauteur, on peut voir des fumées de brouillard
s’élever des vallées pour se dissiper bientôt. Trois ou quatre heures
après le lever du soleil quelques cirrus apparaissent au-dessus de
la plaine, un ou deux cumulus se forment et commencent à marcher
vers la montagne en grossissant de plus en plus, poussés par le vent
qui a complètement changé. A deux heures, ils commencent à s’ac-
1. In k e y . Die Transsylvanisehen Alpen, loc. cit.