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poursuivoit. L'acte do la menstrualion fut soudainement arrêté, et une Dartre furruracec se manifesla sur
toute la périphérie tic la peau. Celle maladie disparut huit mois après l'accident, époque à laquelle l'utérus
reprit ses ibuclions. Le môme phénomène a lieu pour le flux liémorroïdal, si nécessaire au dégorgement du foie
cl de la veine des portes. Quand l'issue naturelle de ce flux esl interceptée, le derme se couvre d'éruptions ou
de points isolés de démangeaison, qui se manilcstcnt comme des Dartres. Lorsqu'on les touche, on rencontre
des indurations très-prononcées sous l'épidcrme. Ce phénomène s'éclipse bientôt, quand l'excrétion habituelle
se rétablit. Ce que nous venons de dire par rapport au flux menstruel et héniorroïdal, peut s'appliquer aux
ulcères que la jiature semble avoir lait naître pour débarrasser les légumens ou l 'intérieur du corps de quelque
humeur étrangère. Un homme avoit sous le gros orteil du pied gauche un suintement fétide qui duroit depuis
sou enfance. Il se confia aux soins d'un empyrique qui tarit la source de cet écoulement incommode, à l'aide
d'un topique très-astringent. Mais bientôt on vit se manifester au nez de cet individu une Dartre rongeante
scropluileuse. Los glandes du col furent engorgées, et les progrès de cette aflection furent très-rapides. Le visage
du malade fut aTreuscmcut déiiguré.
CCXXXIX. Tous les âges de l'Iioniiue influt-nt à leur manière sur la naissance et l'aceroissemenl des Dartres j
ou diroit même que le virus herpétique suit en quelque sorte la direction des forces vitales. Dans l'enlance et la
jeunesse, il se manifeste à la tète; dans l'adolesccnec, à la poitrine; chez les adultes, à la région liypocontiriaqne
et abdominale; chez les vieillards, aux extrémités inférieures. L'époque critique de i'àge de retour chez
les femmes, esl sur-tout une cause productrice des Dartres. Mais ces aflectious ne surviennent guère que chez
celles dout la menstruation a subi de grandes irrégularités pendant son cours. Jeanne Guillauuie avoit été réglée
fort lard. A quarante-huit ans, ses règles éprouvèrent une diminution extraordinaire, qui présagèrent leur
prochaine cessation. Aussi - tôt , apparition d'une Dartre erustacée llavesecnte sur la joue droite, qui produisoit
des démangeaisons très-vives. Cette Dartre augmenta et s'étendit vers les fosses nasales. Enfin, les règles disparurent
emièrerncut, et c'est alors sur - tout que l'alfeetion de la peau redoubla d'intensité. Ajoutons à cet exemple
celui de la nommée Beatrix Pérou, qui, à quarante-neuf ans, vit ses règles disparoitre. Depuis cette époque,
elle fut constamment tourmentée par des érysipèles à la face ; on lui donna des soins qui furent sans frui t . Enf in,
il se déclara une Dartre squammeuse à la partie latérale droite de la tète et sur le pavillon de l'oreille. Elle
éprouva aussi un genre d'éruption analogue, entre les épaules et sur la part i e antérieure de la poitrine. Longtemps
elle fut victime d'une démangeaison dévorante.
CCXL. Les causes organiques des Dartres doivent encore être cherchées dans les maladies antérieures. Les
exanthèmes aigus, tels, par exemple, que la petite-vérole, peuvent, par une irritation insolite et continuée,
donner heu à ce mode particulier de phleguiasie cutanée, qui constitue le vice herpétique. Le vulgaire dit alors
que le maUre-grain est resté dans la peau, et qu'il provoque tout le désordre. Tel étoit aussi le langage d'un©
pauvre ouvrière en huge, âgée de dix-huit ans, qui , pendant près de vingt mois, a éprouvé tous les accidens de la
Dartre erustacée flavescentc, laquelle étoit située à la partie externe des bras et à la surface articulaire des deux
genoux. Les démangeaisons étoient extrêmes. C'est en vain qu'on appliqua sur les parties affectées des topiques
émollicns de tous les genres. La Dartre dont il s'agit, ne céda qu'à l'emploi réitéré des douches sulfureuses.
CCXLL Lorsque la gale a vieilli sur losystême dennoide, et qu'on a négligé de la combat tre par les moyens
le plus communément employés, elle produit souvent des Dartres squammenses très-rebelles. La diathèse herpétique
se développe particulièrement, lorsqu'on a eu recours à des frictions trop irritantes et trop prolongées;
les pommades où l'on fait entrer l'acide arsénieux, l'acide nitrique, le muriate sur-oxigéno de mercure, la
chaux-vive, la poudr e d'Euphorbe, de tabac, &c. sont fréquemment suivies d'un résultat aussi funeste.
CCXLII. Non-seulement les Dartres peuvent succéder à d'autres exanthèmes, mais encore à des maladies
étrangères à la peau. Nous en vîmes survenir plusieurs espèces à l'hôpital Saint-Louis, immédiatement après
cette afiection eatarrhale qui régna cpidémiqucment dans l'intérieur de Paris, il y a peu d'années, et à laquelle
on avoit donne le nom iogrippe. Lin auteur a dit avec raison : Colluvies catarrhosa quoe coclionem eludit, in
culan quaiidaque corrivalur, el herpcUm niiiuirem discrelumveprorital. Il y avoit une femme dans un village
voisin de Par is, qui étoit tourmentée de la lièvre tierce. Nulle complication, du moins apparente. Cette lièvre fut
combattue par les moyens usités, mais principalement par une forte infusion de petite centaurée et par le vin
de qumquina. On la vit se terminer par le développement d'une Dartre furfuracée, qui se manifestoit en
plaques arrondies. Depuis ce temps, la dame a tenté vainement plusieurs remèdes pour se délivrer de cette
é r u p t i o n , qui s'est successivement propagée sur les bras, les cuisses, les jambes, la j.oitriue et le bas-ventre.
Les bains tièdes, néanmoins, lui apportèrent un soulagement durable.
CCXLin. On voit fréquemment les alfections goutteuses et rhumatismales se déployer à l'extérieur du corps
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par tous les caractères de la Dartre squammeuse. A l'époque de la révolution française, M. D**« étoit fort sujet
à l'une et à l'autre de ces maladies. Il perdit sa for tune, et éprouva les plus vifs chagrins. Tout changea dèsiors
dans son économie : la goutte et le rhumatisme disparurent; mais, par une alfreuse métastase, sa peau iut
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M A L A D I E S D E L A P E A U . 87
soudainement recouverte de larges exfoliations herpét iques, qui le faisoient cruellement sonfTrir. Il éloit dévoré
par des démangeaisons brûlantes, qui avoient lieu principalement la nuit. Je commençai à lui faire subir un
traitement, et j'observai que toutes les fois que les Dartres diminuoient d'intensité, il survenoit des douleurs
intérieures dans les entrailles, qui ne lui perraetloicnt aucun repos. Nous nous décidâmes à respecter désormais
celte éruption.
CCXLIV. Une longue irritation, produite par le virus vénérien sur le système dermoïde, peut très-bien
développer des dispositions cachées, et souvent mettre en action un vice herpétique héréditaire. Un iionime,
né de parens dartreux, contracta la vérole, qui d'abord se manifesta chez lui avec tous les phénomènes qui sont
propres à cette maladie. Les accidens syphilitiques s'évanouirent, à mesure qu'on administra lesmcrcuriauxj
mais il se déclara une Dartre squammeuse, qu'il fallut combattre par d'autres moyens. Des Pathologistes peu
attentifs commettent beaucoup d'erreurs à ce sujet, et toutes les fois que des Dartres succèdent à la maladie
vénérienne, ils les traitent souvent comme la maladie vénérienne elle-même. De là, tant de remèdes infructueux
ou nuisibles.
CCXLV. Pourquoi multiplier les faits? Concluons que le vice dartreux s'échappe d'une multitude de
sources dans l'économie animale, et qu'il s'y propage par mille racines; que la peuu, sympathisant par la
plus intime correspondance avec l'universalité des organes, lout ce qui peut altérer leur libre exercice, et
troubler l'action des exhalans, peut aussi déterminer l'apparition des Darlrea. On ne sauroit assez le répéter :
très-souvent ces sortes d'éruptions ne sont que la crise des maladies intérieures. La nature se dépure par ces
plilegmasies cutanées. On a pu se convaincre de cette vérilé, lorsque j'ai l'ait ment ion des rapports d'analogie
qui rattachent les Dartres aux autres affections inorbifîques doni l e corps vivant est susceptible.
A R T I C L E V.
. Des Causes extérieures qu'on croit propres à favoriser le développement des Dartres^
CCXLVI. IL est une foule de causes extérieures qui contribuent à la production et au développement des
Dartres. La première de toutes est sans contredit le pays qu'on hiibite. Qui pourroit méconuoître une telle
influence! Il est des climats où les Dartres sont, pour ainsi dire, endémiques. Tant d'individus étrangers
viennent solliciter des soins à l'hôpital Saint-Louis, qu'il nous a été facile de nous convaincre de cette vérité.
Dans certaines contrées, le système dermoïde contracte uue irritabilité morbilique par le seul effet d'une température
excessive; car une transpiration trop abondante est aussi favorable à la diathèse herpétique, qu'une
transpiration habituellement interceptée. Les voyageurs s'accordent sur cette observation. M. Labillardièrc
remarque, par exemple, que le ciel brûlant de l'ile d'Amboyne est très-propre à déterminer les exfoliations
de l'épidcrme. « Cinq de nos hôtes, dil-il, avoient le corps couvert de Dartres farineuses. Les écailles se détachoient,
et ne tardoient pas à être remplacées par d'autres. Leur couleur blanchâtre formoit un contraste fi'appant
avec le reste de la peau, qui est d'une teinte naturellement cuivreuse ».
CCXLVH. liCs Dartres paroissent aussi se manifester ou s'accroître par le renouvellement des saisons. C'est
au commencement du printemps et au milieu des intempéries de l'automne, que ces maladies sont plus abondantes.
Car si ces deux saisons se montrent salutaires j)our les personnes saines, elles se montrent funestes pour
les cacochymes, et réveillent, en quelque sorte des venins assoupis. La nommée Angélique Dénon, âgée de
treize ans, avoit une Dartre furfuracée qui revenoit régulièrement dans les premiers jours de mars et de
septembre. Je ne dirai point, comme beaucoup d'auteurs, que durant les chaleurs de l'été, les humeurs excré-
"mentitielles de l'économie animale s'assczublent, s'épaississent sous l 'épidcrme, deviennent acrimonieuses, parce
que la partie la plus subtile s'en évapore, &c. Toutes ces idées hypothétiques tiennent au verbiage des écoles ;
mais il est certain qu'à l'époque de la Canicule, on voit arriver à l'hôpital Saiut-Louis un grand nombre de personnes
qui se sont exposées à l 'ardeur du soleil, en vendant des bouquets, des subsistances ou des rafraichissemens
sur les boulevards. Un homme travailloit à planter des pieux au moyen de la sonnette; ses mains, constamment
exposées à l'air et au vent, se couvrirent d'ampoules ou vésicules qui se rempl irent d'une sérosité purulente. Ces
vésicules furent remplacées par des croûtes et des gerçures profondes. La peau augmenta d'épaisseur, devint
coriace et s'enlevoit par petites plaques. Le malade ayant discontinué son genre de vie, ne tarda pas à se rétablir.
Les ouvriers (pii se livroieul aux mêmes occupations que lui, étoient sujets à la même indisposition.
CCXLVin. On trouve journellement dans les alimens et les boissons une cause bien active de la propagation
des Dartres dans l'espèce humaine. C'est une observation comnuuie de voir des dartreux éprouver des
démangeaisons plus vives, lorsqu'ils ont mangé quelque nourriture échauffante ou indigeste. Du temps de la
disette révolutionnaire, lorsque le peuple mangeoit à Paris des viandes gâtées, et qui souvent appartenoient à
des animaux m o r t s de quelque maladie, les Dar t res sévirent avec intensité. Dans les pays où l'industrie n'apporte