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1G reste tic leur vie. Cette vérité, dit-il, est si comiuc, que les Chiriii^gims ne peuvent exiger hu7' paiewent
que six mois après qu'ils ont ?'emis leurs esclai^es ¿1 leurs maîtres : de nouvelles infections comniimiqueroient
eertainement le Pian, s'il éloit de même nature que k maladie vénérienne. Toutefois, il est très-ordinaire
de voir des Négresses qui déjà ont été parfaitement guéries du Pian, allaiter ensuite des nourrissons infectés
du virus pianique, sans le contracter de nouveau. D'après un semblable phénomène, on seroit ])lus fondé à
rapprocher la marche du Pian de celle de la variole, sur-tout quand on songe, qu'il se développe spécialement
chez les enfans.
DXXIX. On s'étonne que certains écrivains, particulièrement l'auteur du Mémoïi-e consigné dans les Essais
d'Edimbourg, aient voulu trouver la plus grande similitude entre le Pian et la Lèpre des Juifs. Leurs ti-aits
caractéristiques sont loin d'être les mêmes, et il est certainement impossible de les confondi-e. Le Pian se développe
communément avec un appareil fébrile qui n'a point lieu dans les maladies lépreuses. Celles-ci marchent
lentement et par des degi'és presque imperceptibles ; d'ailleurs, les tubercules de l'éléphantiasis ont un aspect
tout diilérent des boutons fongueux et verruqueux qui caractérisent le Pian ruboido. ]S'y a-t-il pas d'ailleurs
dans les diverses lî'pres nne altération chronique de la faculté sensitive, qui ne s'observe jamais dans les autres
maladies cutanées, et particulièrement dans celle qui nous occupe?
ARTICLE IÍL
Considerations sur le pronostic des Pians.
BXXX^ En général, les divers symptômes que provoque l'éi-uplion des Pians, sont.très-peu dangereux,
si on empêche cette maladie de faire des progi-ès, et si on a soin de la combattre dès les premiers temps de son
apparition par un traitement méthodique. Mais souvent des cl u"r urgí ens inexpérimentés la rendent incurable ,
parce qu'ils administi'cnt des remèdes sans lumières et sans discernement. Combien d'accidens cojisécutifs du Pian
ne sont que le malhciu-eux résultat de l'impéritie des gens de l'art !
DXXXI. Dans l'IiistoÎre que nous avons donnée des Pians, nous avons fait observer que ce genre de maladie
produit plusieurs éruptions, dont les unes sont plus i-ebelles, plus opiniâtres, plus douloureuses que les autres.
C'est précisément sur cette considération qu'il faut établir son pronostic. Les pustules que l'on désigne sous le
nom de Petits Pians, sont d'une difficulté extrême pour la giiérison; il vaut mieux, dit-on, traiter les Gros
Pians ou Pians Blaiïcs ^ mais ceux qui résistent davantage sont les Pians Rouges. Ces connoissances sont
familières à tous les Colons.
DXXXIT. T1 ne faut pas, comme l'ont dit plusieurs Pathologistes, porter toujours lo pronostic des Pians,
d'après la violence de la fièvre, où celle de l'éruption. Car, un pareil signe doit faire présmner favorablement des
malades. Dans le cas contraire, lorsque la iiè\Te et l'éruption ne s'opèi-ent point avec la force convenable, on
peut envisager le pronostic comme fâcheux, et assurer que l'économie animale manque d'énergie; il est alors
nécessaire de donner du ton à tout le système, afin de favoriser la sortie et le développement des pustules pianiqucs.
Dans la variole, on cherche à atteindre le même but,
DXXXIII. iNous observons relativement aux Pians, un phénomène analogue <\ ce qui se passe dans les autres
exanthèmes. Les Pians qui se déclarent chez des individus doués d'une constitution gi-êle et délicate, sont moins
pernicieux que ceux qui se manifestent chez des personnes vigoureuses et robustes. On dit également que cette
maladie dlsparoît plus vite chez les femmes c[uc chez les hommes, qu'elle est plus duraljle chez les vieillards, et
qu'elle sévit avec moins de fureur chez les jeunes gens. On assure aussi que sa durée et son danger sont en raison
directe de la multitude des pustules disséminées siu- la totalité de la peau.
A R T I C L E IV.
Des causes organiques cjui ir^íueiit sur le développement, des Pians.
DXXXIV. Les Nègres paroissent naîlie avec une disposition particuHèje à être alTcctés du Pian, comme les
Blanes viennent au monde avee la disposition à contracter la petite vérole. C'est eu quelque sorte uu gei-me iiiorbilique
natif. Ricu de plus absurde qne l'opinion de Moscly, qui i-apportoit l'origine |)i'ernièrc du Ynws de Guinée,
au rapprochement sexuel de l'homme avec les femelles des animaux.
M iV L A D 1 E s DE LA P È .A. U. i6a
DXXXV. Quclqiies voj'agcurs attestent que les individus attaqués du Pian ruboide, se riipproclient beiuieoup
par leurs caractères physiques des individus enclins aux scroplmles ou au rachitis. Ils ont assez ordinairement la
tête ronde et applatie, les angles de la mûehoire saillans, la bouche grande, les lèvres épaisses, les clieveux lins et
mous, etc. Les lempérnmeus doués d'une susceptibihté nei-veuse très-active, en sont aussi très-facilement affcclés.
BXXXVJ. L'âge dispose singulièrement à l'invasion du Pian. C'est ain^ que les enlàns y sont plus sujets que
les adultes et que les vieillards ; de-là vient qu'on l'a comparé avec la petite vérole. Loelller a noté que les personnes
qui ont des plaies ouvertes contractent cette maladie avec plus de facilité que les autres. Cet inconvénient
a presque toujours lieu pour les Nègres, lesquels sont habituellement couverts de blessures ou d'ulcères. On voit
combien ü importe de les tenir dairs un état constant de propreté , si l'on veut veiller à leur conservation.
A R T I C L E V.
Des causes extérieures, qu'on croit propres à favoriser le développement des Pians.
DXXXVII. La production du Pian tient sans doute au.\ localités et à des indueuccs atmosphériques, qu'il
eonviendroit de bien étudier. Car, il est constant que les Nègres d'Afrique sont beaucoup plus sujets au Pian que
les Negi-es créoles. Boutins qui a particulièrement observé le Pian d'Amboiue et des îles Moluques, l'attribue en
glande partie à la température du ciel, et au.x vapeurs salines de la mer.
DXXXVIII. La nourriture des Nègres contribue sans auetm doute A la propagation du Pian. Ccu.x de Guinée
usent d'un pam fait avec le mais grossièrement pulvérisé et broyé. L'art d'apprêter les alimcns est mime chcy. eux
dans une telle imperfection, qu'ils préparent des nourritures aussi dégotitantes qu'indigestes avec des feuilles d'arbres
bouUlies jusqu'à la consistance d'un brouet clair, gluant et visqueux. Ils ont l'habitude pcruicieusc de faire pourrir
les poissons avant de les cuire, de les assaisonner d'ailleurs avec des cpices qui no peuvcnt-que nuire aux fonctions
de l'économie animale. Aussi leurs sauces et leurs ragoûts exilaient une puanteur insupportable.
DXXXIX. La plupart se nourrissent de crabes, d'araignées de mer, dont ils font des hachis infoi-mes, en
y ajoutant i l'excès du poivre noir. On les voit dévorer la viande gâtée des rats, des serpens, des crocodiles;
la plupart vivent de sauterelles. On assure mime que les tourmens de la faim les portent jusqu'à dévorer les
cadavres do leurs semblables, ce que ne font pas les animaux les plus féroces. Ils vont ensuite étanchcr leur soif
dans l'eau unpm-e et croupissante des lacs, et se livrent continuellement à leur impulsion pour les boissons
spiritiieuses et fermentées.
^ DXL. Ce qui prouve du reste l'influence directe du genre do nourriture sur la production du Pian ruboide,
c est l'observation que l'on faisoit autrefois, relativement aux Nègres esclaves des Anglais ; on remarquoit qu'ils
étoient plus sujets à tous les fâcheux aceidens de cette maladie, que ceux qui vivoient sous la domination des
Trancáis, parce qu'ils mangoient beaucoup de harengs salés ; ce que je dis de l'efibt des mauvais alimens, s'applique
aussi au Pian fungoïde. Boutins dit très-bien que les habitans de l'de d'Amboine, abusent des poissons de mer,
nouiTiture pesante autant qu'indigeste. Il dit en outre, qu'au lieu de pain, on use dans ce pays de mauvais gâteaux
composés avec la farine d'écorces végétales. Ils boivent également d'une mauvaise liqueur retirée des arbres par
des procédés tout aussi défectueux. Cette liqueur vénéneuse, les euivi-e comme le vin et la bière. Elle trouble la
tète ; de-là vient, à ce qu'on assure, le béribéri, sorte de paralysie si commune dans ces îles.
DXLI. La mal-proprété favorise peut-être la naissance des Pians ; car, les Nègres ont des habitudes trèsnntsiblcs
au système dermoide. Ils se frottent le corps avec un mastic huUeux qui s'oppose au libre exercice de la
transpiration; la plupart ne se recouvrent qu'avee des peaux de quadrupèdes non cousues, qui ue sauroient les
défendre des injures de l'air. Parlerons-nous de la saleté qui règne dans les cabanes, dans les huttes, dans les cases,
oil les Nègres n'ont d'autre plancher qu'un terrain mal-sain et toujours humide? C'est là qu'ils couchent pêlemêle
avec des anûnaux, etc.
DXLIl. Le Pian est cerlainemcnt une maladie contagieuse, puisqu'il a passé des Nègres aux Blancs; Bajon
en cite plusieurs exemples. M. A^alentin qui est un excellent observateur est du même avis. Il y a cpielqucs
années, dit-il, que toute la famille de M. Grec, habitant de la paroisse Ste-Marie, dans l'île de la Martinique,
contracta cette maladie. Une Négresse cpii portoit habituellement l'enfant de sa maîtresse, fréquentoit des personnes
infectées par le vii-us pianiqne. Madame Grec le gagna bicirtôt de son enfant qu'elle allaitoit, et la maladie se
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