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M A L A D I E S D E L A P E A U.
observe, dii reste, que l'altéralion des oagles n'arrive que long-temps après l'altération des cheveux ou
des poils.
XCVII. Toutes ces déformations physiques et extérieures que nous venons de signaler, sont causées et enlretenuos
par la sécrétion cxtraordinairement abondante qui suinte des parties couvertes de villosités, et qui
constitue la Plicjue proprement dite. Cette excrétion, qui afflue sur-tout vers la tòte, nes'cchappo pas uniquement
des pores de la peau du crâne, mais encore des cheveux eux-mêmes, ainsi que l'ont constaté des observations
luici'oscopiques. On a vu, en effet, que les extrémités des canaux capillaires cxhaloient une espèce de
vapeur qui se déposoit et se condensoit ensuite dans leurs interstices. Cette matière est d'une nature iciioreuse
et sanguinolente. Si le dépôt qui s'en fait dans les cheveux est si copieux que ceux-ci ne puissent la contenir,
alors ils se rompent dans leur milieu, et la matière s'écoule au-dehors en très-grande quantité. Elle exJiale
une odeur sui generis, qui est très-repoussante pour l'odorat. Cette odeur a beaucoup de rapport avec celle de
la graisse rancie, comme il m'a été facile de m'en convaincre sur les malades que j'ai observés à Paris, et sur
les échantillons de Pliquc qui m'ont été envoyés par M. de Laibntaine. Il est vrai que cette odeur varie dans
quelques circonstances. M. le docteur Niszkouski a vu chez une jeune demoiselle, une Plique des aisselles qui
étoit très-aromatique, et qui répandoit le parfum de l'ajnbre.
XCVirr. II paroît que la Plique étend particulièrement ses ravages sur les cheveux châtains. Elle affectc
néanmoins assez fréquemment les cheveux les plus noirs, et même ceux qui sont d'une couleur rougeâtre,
comme, par exemple, chez certains juifs. L'expérience prouve aussi que les cheveux blancs ne sont point à
l'abri de l'infection, quoiqu'ils jouissent d'une vitalité moins active que les précédens. Les journaux du temps
ont rapporté qu'on a vu autrefois à Bitche im vieillard, né à une très-petite distance de cette ville, lequel
portoit une grande Plique flottante sur ses épaules, très-hérissée et blanchie par les années. M. de Lafontaine
m'a fait parvenir de Varsovie une Plique en masse, dont la couleur grise démontre l'âge avancé de la personne
qui en avoit été atteinte. C'étoit une malheureuse femme qui avoit tellement souffert des suites d'une goutte
vague, qu'elle avoit perdu l'usage de tous ses membres. Ses forces s'épuisèrent entièrement, et elle succomba
au milieu des plus vives douleurs.
XCIX. Jusqu'à présent, je n'ai retracé que les accidens les plus ordinaires de la Plique. Mais cette affreuse
maladie acquiert souvent le plus grand degré d'intensité j elle revêt une multitude de physionomies j et dès-lors
le caractère de ses symptômes paroît entièrement subordonné à la direction que prend la matière trichomatique
dans l'économie animale. Fait-elle son irruption vers l'organe cérébral, des accès épileptiques se déclarent.
Souvent les malades sont foudroyés par l'apoplexie ; quelquefois ils sont en proie à des transports maniaques.
Stabel cite l'exemple d'une femme qui avoit éprouvé une violente frénésie avec fièvre aiguë, une aliénation
marquée de l'esprit et un délire furieux. Ces désordres ne cessèrent que lorsque les cheveux commencèrent
à se pliquer.
C. Si la métastase s'opère vers le système de la respiration , elle détermine l'asthme, l'hydrothorax
les craçhemens de sang, la phthysie puhuonaire, le catarrhe suffocant. Les palpitations suivent les atteintes
du système circulatoire. Enfin, quand le virus de la Plique affectc l'estomac, les intestins ou les autres
viscères contenus dans la cavité abdominale, on voit arriver le ffux dyssentérique, la diarrhée, les coliques,
l'hypocondrie, la mélancolie, &c. La faculté digestive est pervertie. On a vu naître chez certains.individus,
non-seulement un penchant irrésistible pour les boissons spiritueuses, mais aussi des goûts bizarres , dépravés,
eu un mot le vrai pica. M. de Laibntaine avoit fait cette remarque, et je l'ai conlirmce sur les trois individus
malades que j'ai observés par moi-même. On a vu survenir l'inflammation ou l'ulcération du foie, &c. Chez
les femmes, la menstruation est troublée ou interrompue, et communément elle ne reprend son cours régulier
et périodique, que lorsque la Plique vient se manifester à la tête.
CL Stabel a particulièrement observé que les effets du virus trichomatique different à raison des syvStêmes
organiques dans lesquels il pénètre en premier lieu. C'est ainsi que, lorsqu'il s'introduit dans le système lymplialique,
il donne naissance à des engorgemcns glanduleux, très-rebelles aux moyens curatifs. Il se forme des
nodosités et des tubercules dans les articulations, des squirres, &c. La peau se décolore, et acquiert une couleur
terreuse. Il n'est pas très-rare de voir cette maladie produire la carie des os, pénétrer même jusqu'à la
moelle de ces organes. Un juif qui portoit une Plique à la tête, en fut promptement guéri par un charlatan.
Il lui survint un abcès au front, suivi d'une carie, qui, en trois années de temps, avoit acquis beaucoup
d'étendue. Il fut trépané par M. de Lafontaine , I qui parvint à le guérir. Stabel parle d'un einpyrique qui pratiquoit
la médecine en voyageant dans les eampagnes de la Pologne. Il coucha dans un lit qui avoil servi à
une personne atteinte de la Plique, et ne tarda pas lui-même 4 en être infecté. Il eut recours aux plus violens
drastiques. Mais bientôt il ressentit des douleurs vives à la tète et dans les jointures des membres. Toute la
surface du corps se couvrit d'ulcères sordides. La nutrition cessa de s'opérer ; les forces s'anéantirent. Les os
devinrent friables; lorsqu'on vouloit essayer de le lever de son lit, les deux tibia se IVaeturoicnt. Quand il
M A L A D I E S DE LA PEAU
essayoit de lever le moindre fardeau avec le bras, les os de l'épaule se rompoient avec éclat I e, diffé •
ntcdicaux et chirurgicaux furent inutiles ; il mourut dans l 'Lt le plus '
CH. J'ai déjà dit que la Plique étoit annoncée par des symptômes „1,,. •
de plusieurs jours sou invasion; mais quelquefois aussi elle e d l cWe s rs r e . f
exciter la moindre sen.,ation douloureuse. Tantôt elle se forme t ^ e , ", , " " I " —
.„anifeste avec une rapidité inconcevable. L'événement le Z s lége l^ffa '
développement. Il n'est pas rare aussi qu'elle survienne sans'eau Î ^
d'une jeune dame qui dinoit un jour en très-bonne gaité, et qu, en J ^ u t e i n t ^ r b . l t ' t l l m r
assurer, d'après des observât,ons très-exactes, que le virus trichomatique peut se conununiq" pa7,a «én
r a f o n et qu après la natssance .1 peut rester caché un grand nombre d'années dans l 'écono. r a 'hn' l e an
produire aucun effet nutstble, pr.ncipalement lorsqu'on mène une vie régulière et sobre, et quC, vite
ce qut porte attemte a la santé. Ma,s si quelques personnes n'en ressentent aucune in om,L„rité no
d'autres deviennent la proie des accidens les plus funestes. nmouitt notable,
c m . Je n'ai jamais eu l'occasion d'observer les phénomènes de la Plique chez les quadrupèdes On dit cm'il.
ont une analogie tres-frappante avec ceux que l'on remarque chei, l'homme. La douleur se peint d-,, s „
physionomie, et s exprime par leurs gestes inquiets. Les chiens sur-tout sèment par-tout l'épouvante „a eè
quils paroissent etre enragés. Lorsqu'ils marchent, leur queue traîne entre leurs jambes leur gu^ule est
ecumante. Ils n aboient pas, mordent tout le monde, même leurs maîtres, cessent de prendre de la n„un
ture, se heurtent aveuglément contre les mur s , &c. Il est vrai qu'ils ne redoutent pas l'eau ; au contraire ils en
boivent beaucoup dans cette maladie. Il est pourtant nécessaire d'ajouter que leur morsure ne donne point h ra.e
Il en est de même des loups, des renards, des chats, des brebis, &c. Les chevaux s'aObiblisscut • ils perdant
leur courage et a vivacité sont incapables de tout travail, ne mangent point, mais sont tounnemés par une
soif inextmguible. Il faut bien que la Plique imprime une grande dégéuération au bétail, puisque les bouchers
relusent d acheter, pour la consommation des villes, les boeufs qui en sont affectés. Les pelletiers et les cor
roycurs ne réussissent jamais à donner à leur peau l'apprêt convenable. La corne même de ces animaux est
m e r c T ê u l ' u S L é' '' ' "''J"'» <lo c o i l
CIV. Je viens de rapporter les phénomènes principaux qui, le plus communément, caractérisent la naissance
e développement et la terminaison des différentes espèces de Pliqucs;mais lorsque ces phénomènes neproduisen't
leurs terribles effets que dans l'interieur du système humain, il est souvent difficile de les distinguer et de les
reconnoitre, parce qu ils prennent le masque des autres maladies. Que faut-il faire alors ? Il importe de s'assurer
de tous les signes qui peuvent confirmer l'existence de la Plique : ainsi, on examine s'il n'y a point quelque
disposition héréditaire a cette maladie, si le malade n'auroit pas pu la contracter par la voie de la contagion
On cherche a apprécier quels sont les dangers auxquels il s'est exposé. Il est des signes qui sont encore plu^
concliians, comme, par e.xemple, les céphalalgies et les sucm-s visqueuses qui se manifestent quelquefois i la
tête, la malpropreté des cheveux , les petites écailles qui se forment, &e. Il faut avoir égard aux ongles qui
présentent des alterations très-remarquables, qui offrent une grande rudesse au toucher, qui ont une couleur
livide, et qui quelquelois sont dans une sorte de fonte et de décomposition. L'assemblage de ces divers signes
et de beaucoup d'autres, indique presque toujours, d'une manière certaine, l'existence du virus trichomatique
sur-tout quand on habite les lieux où cette maladie a coutume de se manifester. '
A R T I C L E II.
Ves rapports d'analogie obse/rés entre la Plique et les autres Maladies.
CV. Le tableau des phénomènes do la Plique doit nous ramener nécessairement à la considération de ses
rapports d'analogie avec les autres maladies. Certains auteurs ont cru appercevoir une similitude frappante
entre cette affection et la Teigne. L'identité du siège et de quelques-uns de ses effets, tels que l'altération des
ongles, l'apparition des écailles sur le cuir chevelu, &c. semble confirmer cette similitude. D'autres jugent
qu'elle diUère peu de la maladie vénérienne, par les douleurs ostéocopes dont elle est aceompagnéc Plusieurs
d'entre eux ont cru que, dans les cadres de Nosologie, il eonvenoit de la placer à côté de la Goutte, à cause des
douleurs articulaires et des nodosités qui se forment aux pieds et aux mains. Enfin, quelques-uns les comparent
au rhumatisme. Ce qu'il y a de vraisemblable, c'est que l'éruption de la Plique, qui paroît en quelque sorte critique,
et sa chute spontanée sur-tout, qui met souvent fin à toute maladie ; le danger qu'il y a d'en iaire l'excision
prématurée, &c. ; tous ces phénomènes ont certainement une liaison intime avec la chute spontanée des cheveux
dans nos climats, ù la suite de beaucoup de maladies aiguës et quelquefois même chroniques; chute qu'il est quelquefois
très-dangereux de hâter, comme le docteur Lanoix l'a très-bien démontré, et qui est ordiuah-ement
accompagnée ou précédée d'une augmentation de sédiment dans les urines.