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s'lilargit cn baiitle circulaire autour de l'un ou de l'autre hyppocondre, ou s'étale on larges plaques sur Ir
dos, &c. Enfin, l'crythéinoïde irrite le dos des mains, le visage, la région sLcruale, &c.
CCV. Toutefois, les Dartres, par une suite nécessaire de leur génie mobile et fugace, peuvent disparoître
spontanément, pour se remontrer ensuite sur un siège différent : ce sont les iurfuracées qui manifestent principalement
ce phénomène d'inconstance et de variabilité. Nous en avons observé une à Phopital Saint-Louis,
x^ui changeoit de place pour la sixième fois. Quoique la Dartre rongeante ait en général plus de fixité que les
autres espèces, on la voit néanmoins dans quelques circonstances ( sur-tout lorsqu'elle est entretenue paç une
cause scrophuleuse ), parcourir en rampant la peau de la face, du col, &c. Elle constitue alors un foyer d'irritation
, qu'elle transporte successivement sur plusieurs endroits, et avec lequel elle finit par usurper un grand
espace.
CCVI. Souvent les ravages des Dartres sont si étendus, que toute la peau se trouve infectée ; quelquefois
même elles font tomber les cheveux ou en altèrent la couleur. Il est des malades qui sont devenus entièrement
chauves par le progrès extraordinaire de ce genre d'affection. Croi ra- t -on que les Dartres se propagent dans
certains cas jusques sous les ongles, et en provoquent la chute? C'est dans cet envahissement universel de
l'enveloppe tegumentaire, que le derme contracte un endurcissement qui provient de la perte totale des forces
vitales. La fonction des cxhalans est bientôt interrompue, et l'on conçoit sans peine quelles suites fâcheuses
doivent résulter d'un accident aussi triste et aussi déplorable.
CCVII. Nous avons déjà dit que les Dartres étoient formées par un assemblage de petits boutons prurigineux,
d'où s'échappoit une humeur ichoreuse ou purulente. Cette humeur est quelquefois si abondante, que tous les
linges dont les malades sont recouverts en sont totalement imbibés, et que tout le corps est, pour ainsi dire,
dans une suppuration universelle. Cette suppuration est d'une odeur fétide et nauséabonde, qui a beaucoup
d'analogie avec celle du bois pourri et vermoulu. Tous les praticiens savent combien il importe de ue point
tarir trop vite la source de ce suintement, qui a un but manifestement salutaire dans le plan curatif de la
nature.
CCVin. Ces éruptions diverses que nous avons décrites plus haut, et qui établissent les caractères spécifiques
des Dartres, excitent toujours sur la peau des démangeaisons très-variées, selon l'intensité de leurs
effets, les époques et les progrès de leur accroissement. Ces démangeaisons sont très-modérées ou très-violentes,
scion le siège de l'affection, et selon que les nerfs sont distribués en plus ou moins grande quantité dans la
partie qui en est affectée. C'est ainsi que dans les Dartres furfuracées, le prurit est presque nul, parce que les
papilles de la peau y sont très-peu intéressées ; il est plus vif dans la Dartre squammeuse et la Dartre pustuleuse
, parce que la peau s'y trouve atteinte de plusieurs points particuliers d'inflammation, et que les tégumens
sont arrosés d'une matière ichoreuse et acrimonieuse, qui bouche de toutes parts les tubes excrétoires de la
transpiration. 11 est plus obtus dans la Dartre rongeante, parce que le siège de la maladie est plus profondément
situé, &c. Les observations particulières que j'ai rapportées, démontrent assez à quel genre de tourmens
les malades sont exposés. Ces assauts de pruri t viennent par accès dans certaines saisons ou dans certains momens
de la journée. Alors les malades ne sont plus les maîti'es de modérer l'impulsion involontaire qui les entraîne.
Ils se grattent jusqu'à se déchirer les tégumens avec leurs ongles. Quelquefois il n'y a qu'une seule partie du
corps qui soit cn souffrance^ mais quelquefois aussi, tout le système dermoïde est en proie à des cuissons
dévorantes. Les uns ont la sensation d'un brasier qui les consume; d'autres éprouvent des élancemens semblables
a ceux que causeroient des aiguilles enfoncées dans les chairs ; plusieurs se croient tourmentés par des insectes, &c.
Il est inutile de rappeler ici tous les détails déjà exposés dans les observations particulières que j'ai recueillies.
Tandis que la surface des tégumens est ainsi en proie à d'affreuses douleurs, le calme règne dans les fonctions
intérieures. En effet, les dartreux que l'on traite à l'hôpital Saint-Louis, ne cessent de dire que tout leur
mal est à la peau; et ils manifestent un appétit pour les alimens, qui est quelquefois insatiable. Toutes leurs
fondions s'exécutent avec une régularité extrême. Aucune excrétion n'est troublée, hormis celle de l'exhalation.
On sait qu'ils ont un violent penchant pour le coït, &c.
CCIX. Dans toutes les espèces de Da r t r e s , la peau est frappée d'un caractère d'inflammation, qui mérite une
attention particulière. Il y a dans la partie qui sert de base à la maladie, une exaltation morbifique des propriétés
vitales, et tous les symptômes d'une phlegmasie plus opiniâtre et plus lente que dans les maladies aiguës.
La peau est d'un rouge foncé et permanent dans la plupart des espèces; ce qui leur a lait donner le nom vulgaire
de Dartres vives, comme pour les distinguer de quelques autres affections herpétiques, dans lesquelles
la peau n'offre point cette intensité de couleur. Le phénomène de cette rougeur s'observe principalement dans
les Dartres squammeuscs.
CCX. Malheureusement les ravages des Dartres ne se bornent point à la peau. Ces éruptions funestes rampent
aussi sur les membranes muqueuses qui tapissent l'intérieur des fosses nasales, do la bouche, du larynx, &c.
M A L A D I E S D E L A P E A U . Bi
Il y avoit, à l'hôpital Saint-Louis, une femme qui avoit perdu la faculté de l'odorat par les suites du vice herpétique;
long-temps même elle fut privée de la perception des saveurs. Journellement nous voyons ces Dartres
se jeter sur les yeux, et altérer diversement ces organes, suivre le trajet du conduit auditif et produire la
surdité. Les praticiens remarquent que la vessie en est fréquemment infectée, et cette observation remonte
jusqu'à Hippocrate. Chez les femmes, elles s'échappent en quelque sorte par la voie des fleurs-blanches, et il
est peu d'organes qui s'imbibent avec plus de facilité de leur virus que la matrice, &c.
CCXI. C'est encore un phénomène très-ordinaire de voir les Dartres se compliquer de l'engorgement des
glandes, soit à la région cervicale, soit aux aisselles, soit aux aines, &c. Alors même, les malades commencent
à tomber dans la langueur et la mélancolie. Quelquefois ils sont minés par une lièvre qui est, pour ainsi dire,
imperceptible. Les digestions sont laborieuses; les votes intestinales se remplissent de vents; le sommeil est
pénible et souvent interrompu. Presque toujours les dartreux se plaignent d'un accablement extrême, d'une
sorte de somnolence, &c.
CCXII. A mesure que le vice herpétique fait des progrès, il survient un état de maigreur considérable.
Le foie et la rate se tuméfient, et lorsqu'on touche le ventre, les malades se plaignent d'une vive douleur.
Chez certains individus, les extrémités inférieures s'enflent, tandis que chez d'autres elles sont extraordinairement
èmaciées. Nous cn avons vu qui étoient fatigués par une toux opiniâtre, à la suite de laquelle survenoit
une légère expectoration de matière muqueuse. D'autres éprouvoient une telle anxiété dans la poitrine, qu'ils
redoutoient la suffocation. Tout e leur peau se résolvoit en matière farineuse, et bientôt ils étoient en proie à
une véritable consomption herpétique.
CCXIII. Insensiblement les Dartres arrivent à leur troisième période; les viscères du bas-ventre contractent
des obstructions inguérissables. Il peut quelquefois survenir imc infiltration générale, dont les effets sont constamment
funestes. C'est dans ce triste état que j'ai vu succomber plusieurs malades à l'hôpital Saint-Louis. Il
n 'y a alors dans l'économie animale aucun viscère, aucune glande, qui ne participe à l'infection. Lorsque nous
avons procédé à l'ouverture des cadavres, nous avons fréquemment rencontré dans la cavité abdominale des
indurations qui avoient presque acquis une consistance stéatomateuse. D'autres observateurs ont eu l'occasion
de faire des remarques analogues.
CCXIV. Il est assez ordinaire de voir disparoître tous les caractères extérieurs de l'affection herpétique,
sans que cette affection diminue d'intensité et d'énergie. Il arrive même dans ces sortes de cas des altérations
particulières du système nerveux, dont les Nosographes ne font aucune mention. Ce désastre a lieu principalement,
lorsque les Dartres ont été répercutées par une médication imprudente. Nous avons observé successivement
trois sujets devenus maniaques, à la suite de ces éruptions trop promptement supprimées. Ce trouble des facultés
intellectuelles s'est spécialement manifesté chez un charretier envoyé de sou département à l'hôpital Saint-
Louis comme lépreux, lequel étoit atteint d'une Dartre squammeuse humide {Herpes squanunosusmadidans).
Cette Dar t re, qui avoit commencé d'abord par n'occuper qu'une très-petite surface, avoit gagné peu à peu
l'universalité des tégumens. Le dévoiement se déclara, ainsi que la fièvre hectique. La respiration étoit embarrassée
, et le danger du malade étoit ù son comble. Tout-à-coup la nature des symptômes changea : les Dartres
se séchèrent ; mais cet infortuné perdit absolument l'exercice de sa raison. Sou délire étoit triste; il versoit
continuellement des larmes. Il languit encore dans le même état au moment où j'écris ces lignes. L'irritation
dartreuse paroît s'être entièrement concentrée sur le cerveau.
CCXV. C'est particulièrement dans l'âge avancé, que les Dartres éclatent avec une violence extrême. En
effet, l'exhalation est presqu'anéantie chez les vieillards. Les vaisseaux n'ont ni la même flexibilité, ni la mémo
vigueur que dans la jeunesse. Il est d'ailleurs des individus chez lesquels la diathèse dartreuse est devenue en
quelque sorte une habitude de leur économie. Toutes les humeurs sont, pour ainsi dire, imprégnées de ce
funeste virus. Ces desquammations furfuracées sont alors une excrétion nécessaire. Beaucoup de personnes les
regardent comme le résultat d'un acte dépuratoire de la nature animée ; mais une déperdition si abondante
finit par épuiser les forces et par déterminer la mort. Les malades succombent dans une agonie déchirante.
CCXVI. La complication des Dartres offre un champ vaste au médecin observateur; mais aussi de quelle
patience ne faut-il pas qu'il soit doué pour étudier séparément chacun des symptômes, et analyser ceux qui
sont propres à la maladie simple ou à celles qui la compliquent! La maladie vénérienne, par exemple, est une de
celles qui coexistent le plus souvent avec les affections herpétiques. Elle communique à celles-ci des caractères
particuliers, et quelquefois difficiles à démêler. Les observations que j'ai recueillies à l'hôpital Saint-Louis, sur
cette complicalion, sont en très-grand nombre : je me contente de citer le fait suivant. Victoire Koucher,
lingère, âgée de dix-hui t ans, devint enceinte, et contracta en même temps la maladie vénérienne, pour
laquelle on lui fit subir un traitement. Il s'étoit développé aussi une Dartre squammeuse, qui ne céda point à
l'adaunislratiou du mercure, et qui excitoit de violentes démangeaisons. L'éruption herpétique existoit sous
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