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couleur brunâtre, lis avoient leur siège, sur divers points de la face, tels que le front, les sourcils, les paupières,
le nez, les joues, la Icvrc supérieure dans toute sou étendue, le menton. Il en survint aux aisselles, aux jarrets,
aux aines, k la hanche droite, aux bourses, à la partie interne des cuisses, aux janibcs, etc. Ces tubercules
ressembloient d'une manièi-e parfaite à des morilles ou aux champignons désignés sous le nom d'agarics ; ils
se multiplioient à un tel point, que nous en comptâmes quatorze sur le visage. Ces tubercules affreux avoient
une grande base ; ils avoient une consistance spongieuse et paroissoient résulter de l'engorgement des glandes
cutanées; ils fournissoient une humeur ichorcuse, roussâtre, qui teignoit le linge, tantôt en vert, tantôt en
jaune. Cette humeur devenoit concrète par l'action de Tair, et formoït à lem- surface une couche croûteuse de
couleui-brune ou grisâtre, ayant un aspect luisant et s'cnlevant d'elle-même, après la dessication. La plupart
de ces tumeurs finissoient par se crever et s'affaisser sur elles-mêmes ; elles laissoient leur place une peau
ilétrie et inerte, que la fille de Lucas coupoit patiemment avec des ciseaux, sans que jamais elle ait contracté
aucun vice analogue à celui de son mallieureux père, et sans que celui-ci éprouvât la moindi-e douleur. Quelques
unes de ces tumeurs avoient ime fomie arrondie, de la grosseur d'une a-^-eline ; d'autres étoient oblongues
et simuloient assez bien des pommes de terre ou des cliampignons. A la suite d'un vif chagrin, il y eut des
vésicules ou ampoules qui pai-vinrent rapidement à leur maturité, et qui n'étoient ici qu'un symptôme secondaire;
la maladie s'accrut considérablement. Lucas fut malade cinq ans, et languit sept mois dans son lit; il
éprouvoit des douleiu-s lancinantes dans les ulcères qui s'étoient formés par la décomposition des tubercules ;
il devint excessivement maigre, et il étoit i-la-fois tourmenté par la lienterie et par un appétit vorace. Il
s éteignit enfin dans les langueurs de la lièvre hectique.
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DVIII. Ce qu'il y a de surprenant dans cette obsers'ation, c'est que le Pian fungoïde, qu'on croit rélegué
à Amboine et spécialement aux îles Moluques, se soit montré siu- un individu des environs de Paris, qui
avoit à la vérité voyagé en qualité de militaire, mais qui n'avoit jamais été exposé aiLX iiiiluences d'un climat
très-chaud. On n'est pas moins surpris que cette maladie ait duré cinq années, sans empêcher Lucas de vaquer
aux exercices de sou état. Il étoit employé dans l'Administration des eaux et forêts. 11 a laissé une femme et:
des enfans qui sont en apparence bien constitués ; l'uu d'enti-'eux est néanmoins sujet à l'alopécie et: à un
gonflemeut des testicules qui augmente par intervalles.
M A L A D I E S DE LA PEAU. 159
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SECONDE PARTIE.
Faits relatifs à l'histoire generate des Pians.
DIX. J'offre maintenant à mes lectem-s dans un même tableau tous les phénomènes qui concernent les deux
mpèces de Pian que j'ai décrites. On pourra mieux se convaincre do leurs rapports nombreux ; ce rapproclicment
a beaucoup d intérêt. "
A R T I C L E PREMIER.
Des phénomènes généraux qui caractérisent la marche des Pians.
Y ^ r «" ¡ " f e ' !<= K » " f""goide ou Pian des îles Molutpes , le Sibbens
d Ecosse, les Thermmthes des auteurs anciens, ne sont absolument que des affections analogues, plus ou moins
modifiées c nuancées par la puissante influence du climat, du tempérament physique des h o i l e s , etc. La
maladie a du recevons différens noms, selon les pays of, eUe s'est développée.
DXI. Les divers Pians commencent à se développer d'une manière à-peu-prùs identique. La peau s'altère
et se tcrmt ; on voit paroître ça et li des éminences fongueuses, qu'on prendroit d'abord pour des verrues - ces
^ r r u e s ne tardent pas à s'accroître. Dans le Pian ruboide et le Sibbens d'Écosse, elles piennent et présentent
quelcpielois 1 aspee d une gi-osse mur e ou d'une gi-ande framboise ; rien de plus distinct que les lobules qui les
constituent. Dans le P,a„ fungoïde, les pustules sont encore plus considérables; elles égalent en circonférence
les champignons dont eUes ont la forme et la striictiu-e ceUuleuse. Ou en voit qid sont véritablement sqtm-reuses.
D X n . A quelque espèce de Pian qu'appartiennent les tumeurs spongieuses dont nous venons de faire mention,
d sen ecoule une matière gluante, souvent comme gommeuse, d W qualité tellement mordicante, que lorsl
qu elle est répandue sur des portions saines du système dermoïde, elle y creuse des ulcères d'un aspect affreux,
dont les ravages s étendent rapidement. Les boutons même des Plans deviennent auta.it de foyers d'ulcération
et Ion voit des mallieureux porter toute leur vie des traces indélébiles de ce mal odieux, lorsqu'ds n'ont pu
y succomber. La peau est si profondément altérée que les cheveux et les poils perdent leur coulem- ordinaire.
D X I I L On a remarqué plusieurs différences dans le volume des pustules produites par le Pian ; et cette
diversité a fait établir des distinctions. Il est assez commun do les voii- s'élargir considérablement, quoiqu'elles
soient surmontées par des végétations fongueuses; ce sont les Gros Pians. Dans d'aulres cas, on n'apperçoit
que des boutons d'une très-petite forme, qui se terminent en une pointe aiguë; on les indique sous le nom
de Petits Pians. Leur couleur est également très-sujette à différer : tels sont les Pians rouges, que l'on regarde
comme les plus redoutables et ceux qu'on aime le moins à traiter. °
DXIT. Les Pians mûrissent, se dessèchent et se remplacent sueccssivement avec une lenteur remarquable.
Mais, alors même qu'ils disparoissent, ils ti-aîncnt à leur suite une foule d'incommodités et d'altérations secoiidaii
es : telles sont les Guignes, sortes de végétations charnues, assez semblables aux fruits dont elles portent
le nom. On a vu quelquefois la peau s'épaissir d'une manière horrible et difforme, et donner naissance A des
tumeurs plates, dont les racines ont été comparées i des pattes de crabes, d'écrcvisses ; dans d'aulres cas, la
peau se recoime d'une éruption squammeuse ou furfuracée. Au siu-plus, tous ces désordi-es n'ont lieu me
sur les tégumens, et les parties intérieures ne sont point encore attaquées; ensuite, les ravages vont plus loin, etc.
DXY. Il en est des Pians comme de tous les autres genres d'éruption ; plus les tubercules sont petits, plus
ds sont dissémmés en grand nombre ù la surface du système dermoïde. les tubercides d'un gi-and volume se
déclarent commtmément aux parties de la génération, i l'anus, aux aisselles, au euh- chevelu, parce que la
peau s'y trouve d'un tissu plus spongieux que par-tout ailleurs. Ils simulent quelquefois de la manière la plus
surprenante, les gi-ands accidens de la maladie vénérienne ; la plupart sont environnés d'une aréole bleuâtre, et
se recouvrent de larges croûtes. Jîcaucoup diminueat et s'applalissent giaducUement, sans arriver à suppuration.
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