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et on met en usage des topiques slinmlans, tels que des vésiccitoires, des syuapisnics, des emplâtres attractifs,
dont l'action appelle, en quelque sorte, vers les legitmens de la tète le dépôt de la nicitière trichoinatique,
laquelle ne tarde pas à se déposer dans les cheveux ou dans les ongles. M. le docteur de Lufontaine fait frotter
les bouts des doigts avec l'essence de cantharides, ou mieux encoi'e avec une Plique fraîchement coupée, et qui
conserve encore son caraclcre contagieux. Cette opération est souvent suivie d'un plein succès.
CLI. Cependant, il pourroit arriver que ces moyens fussent infruclucux. Il faudroit examiner alors quels
avantages résulteroicnt de l'application du moxa. On l'a vu réussir dans une circonstance qui mérite d'être
rappelée. Une demoiselle de Moulins étoit depuis long-temps affligée de la Plique j elle éprouvoit des céphalalgies
si cruelles, et étoit tellement en proie ù la vermine, qu'on se détermina à lui couper les cheveux. Celte
opération fut à peine terminée, qu'il s'écoula des racines de ces organes une humeur visqueuse et roussàtre.
D'une autre part, les cheveux devinrent tellement sensibles à leur base, qu'au moindre attouchement la
malade tomboit en défaillance ; elle éprouvoit de telles fatigues dans les membres, qu'il lui étoit impossible de
marcher. On avoit inutilement essayé l'emploi des bains, des lavemens, &c. Dans cet état extraordinaire, ou
se détermina à appliquer sur les tégumcns de la tête plusieurs cylindres de colon. On assure que, dès le même
jour, la jeune demoiselle se trouva infiniment mieux. Il s'établit une suppuration abondante, qui dura plusieurs
mois, et mit fin à tous les symptômes fâcheux. Peu à peu, le boursouflement extraordinaire du cuir
chevelu se dissipa; en un mot, tous les accidens qui avoient si long-temps alarme les parens de la malade,
disparurent, en sorte qu'à l'aide du moxa on parvint à opérer une entière guérison.
CLII. Au surplus, si ces moyens, malgré l'énergie de leur action, ne parvenoient point à diriger vers
la tête le dépôt de la matière trichomatique, il faudroit pratiquer Tinoculation, d'après l'exemple de iVJ. de
Lafontaine. Celle opération s'exécute d'une manière très-simple. Ou choisit un malade chez lequel cette
affection s'est nouvellement déclarée. On lui fait mettre, pour quelques heures, un bonnet , dont on couvre
ensuite celui auquel on desire communiquer Pinfection. On répète ce procédé autant qu'il le faut pour atteindre
le but qu'on se propose. Il est avantageux de faire coucher les deux individus dans la même chambre ; la
matière du trichoma, transportée trop loin ét exposée à l'air frais, perdroit son activité.
CLIII. Peut-on procéder sans péril a la section des Pliques? Cette question a occupé difFérens Pathologistes,
et tous ne sont point entièrement d'accord sur ce sujet. M. do Lafontaine, avec lequel je m'en suis particulièrement
entretenu durant le cours du voyage qu'il vient de faire à Par is, assure qu'il seroit dangereux do
couper une Plique, à moins qu'elle ne soit déjà en partie détachée, et qu'elle ne communique avec les tégumcns
de la tête que par des cheveux parfaitement sains et nouvellement repoussés. Il veut, en outre, qu'elle
ait perdu son odeur fétide et son aspect onctueux.
CLIV. Lorsque la Plique n'est point compliquée avec la maladie vénérienne ou avec le scorbut, ce que l'on
reconnoît à la cessation des symptômes graves après la crise, Hirschel prescrit les minoratifs, tels que les
sels neutres; les diaphorétiques, et spécialement les préparations antimoniales, &c. Le môme auteur emploie
également ces moyens avant l'éruption du virus trichomatique. Il fait souvent raser et laver la tête à l'eau
froide; il considère ce dernier moyen comme très-utile, parce qu'il imprijne de l'énergie aux propriétés
vitales du cujr chevelu. Quand les symptômes sont très-graves, il recommande l'établissement des cautères,
des sétons, afin d'affoiblir, par une irritation éloignée, le trop grand afflux de la matière trichomatique vers
la tète. Il insiste aussi sur les pédiluves pour remplir la même indication. Enfin, lorsque la Plique n'est point
de mauvais caractère, il la coupe peu à peu, en continuant les remèdes ci-dessus indiqués.
CLV. La méthode de liirschcl renferme des vues très-saines ; celle de M. de Lafontaine nous paroît
toutefois mériter la préférence. On n'entrevoit point, effectivement, quel profit on peut retirer d'une section
prématurée de la Plique, puisqu'elle ne contribue ni à dissiper le mal , ni à l'appaiser. Il seroit, tout au plus,
avantageux de recourir à cette opération, ainsi qu'aux lotions d'eau froide, dans le cas où la maladie proviendroit
d'un excès de malpropreté. Mais certes, Hirschel a trop vaguement indiqué les circonstances qui pourroient
permettre ce genre de traitement. D'ailleurs, pour le mettre en pratique aussi généralement qu'il le propose,
quelles nuances délicates à saisir, sur lesquelles l'oeil du médecin le plus éclairé peut s'aveugler?
CLVI. La coupe des cheveux paroît devoir entraîner d'autres inconvéniens. Il est une vérité pathologique
mcontestable, c'est la susceptibilité de certains organes pour les crises qui suivent ordinairement la terminaison
des maladies. Oler à la matière de ces crises le moyen de les atteindre, c'est lui fermer le chemin, hi contraindre
de changer sa marche accoutumée, &c. Aussi voyons-nous que la crise tricliomatiquc s'opère sur les
ongles des pieds et des mains, sur les os, &c. chez les personnes chauves, parce que celles-ci ne lui offrent
point les cheveux, qui sont les organes qu'elle choisit de prédilection.
M A L A D I E S DE LA PEAU. 49
LES DARTRES.
CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR LES DARTRES.
CLVII. LE sujet que je vais entreprendre est, sans contredit, le plus intéressant dont je puisse traiter dans
cet ouvrage; car les Dartres attaquent tous les âges et toutes les classes de la société : par-tout ces tristes et
repoussantes infirmités dégradent l'homme aux regards de l'homme. Cependant elles sont encore bien mal
connues et bien mal décrites. Tâchons de porter, dans cette matière, le flambeau d'une expérience nouvelle
et d'une observation plus rigoureuse. Les empyriques qui ont osé s'emparer de cette partie si essentielle de la
Médecine-pratique, l'ont infectée d'erreurs et de préjugés : séparons avec soin la pure vérité de leurs hypothèses
futiles et mensongères. Plus le nombre des faits s'agrandit à nos yeux, plus nos recherches doivent tendre à
devenir plus exactes et plus positives.
CLVIII. En effet, ces sortes d'éruptions semblent s'être infiniment multipliées depuis quelques siècles. Ne
seroient-elles pas le funeste résultat des progrès de notre civilisation et des écarts de notre diététique? On seroit
tenté de le croire, d'après le silence que gardent, à ce sujet, les premiers Pères de l'art. Du temps d'Hippocrate,
on les envisageoit comme des phénomènes rares et inouis. Alors sans doute il se manifestoit des exanthèmes
sur le système dermoïde ; mais ces exanthèmes avoient peu d'intensité, et n'étoient en quelque sorte
que le symptôme le plus apparent de certaines fièvres épidémiques. La peau de l'honmie s'est donc altérée
davantage à mesure qu'il s'est corrompu ? Les empreintes qui la souillent, sont une des suites déplorables de ses
déréglemens; car la nature n'a point tissu avec tant d'habileté l'enveloppe du corps humain, pour qu'elle devînt
ia proie des maladies.
CLIX. Les Dartres , attentivement observées , produisent aujourd'hui des symptômes et des phénomènes si
variés, qu'on les distingue aisément les unes des autres, et qu'elles réclament néccssaii'ement une méthode de
classification ; car si dans quelques circonstances, elles se montrent à peine sur le système dermoïde, dans
d'autres cavS elles le recouvrent d'écaillés dures, de croûtes épaisses, de pustules tuberculeuses, de phlyctènes
horribles, d'ulcères sordides, de gerçures énormes, &c. On en voit qui versent, sur des organes voisins, une
sanie ichoreuse et fétide, qui établissent dans le tissu muqueux, des sécrétions vicieuses, des végétations meurtrières
; qui creusent, rongent et consument nos tégumcns, comme ces insectes avides qui dévorent l'écorce des
arbres. Delà vient qu'il n'existe pas une seule, mais plusieurs espèces de Dartres ; toutefois elles conservent
une physionomie analogue, qui les fait rapporter au même genre.
CLX. Ce n'est qu'à l'hôpital Saint-Louis qu'on peut les étudier sous des points de vue si différens; ce n'est
que sur ce théâtre que tout se montre à l'oeil attentif de l'observateur, l'opposition ou l'analogie frappante de
certains caractères physiques, Tinfluence de l'âge, du sexe, du tempérament, celle des conditions, des métiers,
des habitudes, &c. ; c'est là qu'on peut constater mille assertions énoncées dans les livres de l'art, sur l'Jiérédité,
la propagation, les métastases des Dartres ; c'est là qu'on acquiert une telle habitude de la contemplation
de ces objets hideux, qu'on m'a vu souvent signaler et nommer une espèce d'éruption, alors même qu'il en
restoit à peine la plus légère trace sur les tégumcns : tant il est vrai que la vue est celui de nos sens dont la
mémoire est la plus puissante !
CLXI. C'est sur-tout au milieu de cette réunion immense de malades, qu'on apprend à saisir les caractères
communs qui lient entre elles les différentes espèces de Dartres, et en font en quelque sorte une même famille.
Ces exanthèmes chroniques sont en général formés par des boutons pustuleux ou vésiculeux, environnés d'une
aréole rouge, réunis en corymbe ou par groupes, qui enflamment la peau, et provoquent un sentiment de
p r u r i t , de tension ou d'ustion. Bientôt ces boutons se rompent nalurellemcnt ou artificiellement, et laissent
échapper une matière ichoreuse ou purulente , laquelle se convertit en écailles ou en croûtes. Souvent ce sont
des cicatrices indélébiles, qui succèdent à l'altération profonde du tissu dormoïque : enfin, la peau est âpre, et
présente presque toujours une certaine tuméfaction au toucher. Les Dartres ne sont point, du reste, accompagnées
de fièvres comme les autres exanthèmes dépurateurs; et dans les parties voisines de leur éruption, la peauconserve
sa couleur naturelle.
CLXIl. Comme on n'a point encore déterminé jusqu'où peut aller la dégénération du vice dartreux; comme
les idées sont encore peu fixées relativement à son mode de propagation, cette maladie est devenue un objet
d'épouvante et d'effroi pour beaucoup d'hommes. Certains la regardent coimne un ferment corrupteur, qui