n
n d M A L A D I E S DE LA 1» E A U.
Experiences qui tendent à piviwer que le Caneer n'est point de naliire contagieuse.
CCCLXX. Plusieurs éci'ivauis out avancé que le Cancer étoît I'liiinemment transmissible par la contagion.
On rapporte même que Smith, chirurgien de l'iiôpital mililnire de St.-Thomas, à Londres, momuit d'un
Cancer à la langue , pour avoir goiité de l'humeur fétide qui iluoit d'une mamelle infectée. Je sais quo d'autres
Palhologistes ont allégué des faits analogues. Les expériences suivantes semblent néanmoins coutredirc cette
opinion.
Première expérience. — J'ai fait lécher, par un jeune chien , et pendant l'espace de deux mois , un
Cancer considérable occupant toute la lèvi-e inférieure , ainsi qu'une partie de la lèvre supérieure et de la
joue, chez un homme âgé d'environ soixante ans , d'un tempérament bilieux et sanguin. Cet animal
n'en a point été aiTecté ; il n'a rien perdu de sa gaîté naturelle. Il a paru même se repaître avec volupté
de la matière cancéreuse qui ne cessoit de couler de l'ulcère. On a répété l'expérience avec un autre chien.
Même résultat.
Deuxième expérience. — On a appliqué deux morceaux de pain tendre sur deux ulcères cancéi'ciix de
la joue et du sein. On les a laissés pendant laps de temps suffisant, pour qu'ils fussent imbibés de l'immeur
ichoreuse qxii en découloit. Ensuite on les a donnés au chien, qui les a mangés avec avidité. On a répété
l'expérience pendant plusieurs jours. Rien n'est survenu.
Troisième expérience. — Nous avons recommandé au malade de faire avaler au même chien des lambeaux
de diair cancéreuse qui étoient tombés de sa lèvre ulcérée. L'animal les a dévorés sans encourir aucun risque
pour sa- santé. Nous ajouterons même que ce mets lui a causé tant de plaisir , qu'il dédaignoit ensuite le pain
dont on faisoit précédemment sa nourriture la plus habituelle. Nous a-^'ons fait le même essai sur un autre
chien, avec le putrilage recueilli dans im horrible Cancer dont étoit tom-mentée une femme mourante. Le
chien n'a point été incommodé.
CCCLXXI. Personne n'ignore combien peuvent être défectueuses les expériences tentées sur les animaux
vivans. Nous avions à craindre une objection très-fondée. En effet, dans le plus gi-and nombre des cas,
ce qui ariive chez les animaux peut très-bien ne pas avoir lieu chez l'homme , ou se passer du moins d'une
manière différente. Sous ce point de vue, nos conclusions n'auroient point été exactes. Voici le résultat de
quelques nouveaux essais:
' Tremière expérience. —Le lundi 17 octobre de l'an 1808, en présence de plusieurs médecins et élèves
qui suivoient mes visites cliniques à l'hôpital St.-Louis, je me fis inoculer au bras le vinis cancéreux. La
matière ichoreuse fut prise sur un énonne Cancer situé à la mamelle interne droite, chez une femme âgée
de soixante ans , et qui étoit expii-ante. .Te fus imité par M. Eayct, étudiant en médecine ; et dans la
matinée , M. Lenoble se fit pratiquer cinq piqiu-es. M. Durand subit aussi cette opération. Une demi-heure
après cesle expérience, nous éprouvâmes tous une douleur légèrement lancinante, et semblable à celle qui
résulteroit de l'application forte d'une épingle sur la peau. Cette douleur se renouvela plusieurs fois. Il y
eut un aréole rouge autour de la piqûre, et un léger gonflement. Le deuxième jour, cessation de la douleur,
mais augmentation de l'aréole et du gonflement, sur-tout vers le soir. Formation d'un pus blanchâtre. Le
troisième jour, le gonflement étoit à peine sensible. Le quatrième jour , dessèchement du pus , qui s'ctoit
converti en croûte. Vers le cinquième jour, la croûte étoit tombée. Il restoit une légère tache rouge. Ce
phénomène étoit manifestement le résultat de l'irritation produite par la lancette.
Deuxième expérience. — Le lundi suivant 24 octobre, je m'inoculai le virus cancéreux pour la seconde
fois. Je pratiquai pareillement deux piqûres à chacun des bras de M. Bictt, médecin , avec une lancctto
chargée de la matière ichoreuse , puisée dans un horrible Cancer. Pour ce qui me concerne , j'ai obtenu un
résultat analogue à celui de l'expérience précédente. Mais M. Bictt éprouva , le troisième jour , de légères
douleurs sur le trajet des vaisseaux lymphatiques, à la partie interne des deux bras. La piqûre du bras droit
s'enflamma légèrement. Le soir il éprouva quelques horripilations et des frissons in-éguliers. Lo mouvement
fébrile se prolongea toute la nuit , et continua pendant deux jours. Les glandes des aisselles devinrent un
peu douloureuses, ainsi que les glandes du col. Cet état n'a duré que quarante-huit heures. Au bout de
ce temps, les piqûres se sont éteintes et entièrement cicatrisées.
M A L A D I E S D E X A P E A T J . u^
Quelques Observations sur le Traiteineni des Cancers et Ulcères carcinomateux.
CCCLXXII. Le Cancer est une des maladies les plus opiniâtres aux moyens de l'art. Jusqu'à ce jour,
^ue d'essais infructueux pour détruire ce fléau dévastateur ! J'ai répété , à l'hôpital St.-Louis, la plupart
de sexpénences qu'on a publiées. Je n'ai pas été plus heureux que mes devanciers. Je rapporte néanmoins
quelques faits qui m'ont pam de quelque intérêt.
Première ohsemation. — On a beaucoup loué , depuis quelques années, l'application topique de la petite
joubarbe {sedum acre). J'ai répété cette expérience. Madame***, d'un tempérament sanguin-bilienx, et
d'un caractère mélancolique , avoit constamment joui d'une santé robuste. Elle avoit nourri quinze enfans
sans en être mcommodée ; seulement on avoit remarqué qu'à chaque sevrage, la mamelle du côté gauche restoit
quelques jours engorgée. L epoque critique s annonça par quelques irrégularités dans la menstruation vers la
fin de septembre 1806 , le volume du sein augmenta considérablement; mais aucune douleur ne se faisoit sentir
dans cette partie. On conseilla , dans les premiers temps, quelques applications répercussives et plusieurs
saignées du bras. Ces moyens ne firent qu'accroître les accidens. La maladie fit des progrès. Il se déclara
des douleurs vives. Il se foi-ma tm Ulcère qui s'étendit avec la plus grande rapidité, et qui rongcoit les
chairs environnantes. Lorsque je fus appelé , pour visiter cet Ulcère, il étoit large , surmonté de tubercules
inégaux, dont les uns étoient très-volumineux et affectoient la forme de choux-fleurs. Les boi-ds étoient
ii-réguliers et renversés. Il s'en écouloit mie suppuration blanchâtre et fétide. La peau voisine de l'Ulcère
étoit rougeâtre, violacée , ridée et contractée en quelques endi-oits , parsemée d'une grande quantité de tiibercules,
qui se répandoient jusque sur le dos et les épaules. L'état de la malade empiroit visiblement h
çhaqite variation de température. Il survenoit fréquemment des hémorragies par les extrémités artéricilcs qui
étoient à découvert. Un mouvement fébrile continuel cousumoit les forces. Dans cet état désespéré, nous
nous décidâmes , M. Bictt et moi, à tenter l'emploi de la petite joubarbe , déjà préconisée ])our la giiérison
des Cancers ulcérés. Après beaucoup de précautions, Madame *** put garder des cataplasmes faits avec
des pulpes de cette plante, quelques heures dans la journée. Après un long usage de ce topique , la plaie
devint moins hideuse , la suppuration moins horrible , et les hémorragies cessèrent. Il est probaljlc que, si
on l'eût employé à une époque moins avancée de la maladie , le remède eût obtenu un plein succès ; car
la femme se félicitoit tous les jours du inieux qui s'étoit opéré dans toutes ses fonctions ; mais l'épuisement
dans lequel elle étoit tombée, par des souffrances antérieures, la fit succomber.
Deuxième observation. — Je ne veux point passeï' sous silence im fait intéressant dont j'ai été le témoin.
Une jeune femme, qui avoit tout au plus atteint l'âge de vingt-huit ans, me consulta pour un Cancer
qu'elle portoit à la mamelle gauche : les bords en étoient durs, et couverts de beaucoup d'aspérités : l'humeur
qui en découloit , étoit d'un jaune paille, mais n'étoit pas très-fétide. Le tissu cellulaire étoit rénitent
autour de l'Ulcère, et présentoit des vaisseaux noirs et tuméfiés. Les souffrances ne se manifestoicnt que par
intervalles. M. Lombard, habile chirurgien , venoit alors de pubfier des essais heureux sur les effets de la
joubarbe dont je viens de faire mention. Je proposai au médecin habituel de la malade, ce moyen , qui
fut mis en usage avec un succès inespéré. Il est vrai qu'il fallut tenniner la guérison par le caustique de
Kousselot. Depuis cette époque, il n'est resté à cette dame, qu'une cicatrice infoime et de couleur violacée,
laquelle est plus ou moins vivement douloureuse, selon les influences atmosphériques.
Troisième observation. — J'ai rapporté, dans mes Nouveaux Elémens de Thérapeutique et de Matière
médicale , l'observation d'un homme âgé de soixante ans, qui étoit toiu-menté d'un Ulcère carcinomateux,
lequel coiTodoit les fosses nasales. Les cataplasmes de joubarbe détergèrent l'Ulcère avec une étonnante rapidité.
Ce n'éloit plus qu'une plaie vermeille; mais le malade ne voulut pas continuer le remède.
Quatrième observation. — Il ne s'agit ici que d'un Ulcère carcinomateux survenu au ne/.. Martin Dock,
domestique , âgé de cinquante-sept ans , d'un tempérament bilieux , et d'une constitution ruinée par la
misère, n'avoit éprouvé d'autre affection notable que celle pour laquelle il se rendit à l'hôpital St.-Louis,
dans le mois de février 1808. Cette affection commença par un petit bouton situé à la parlio moyenne et
latérale du nez. Dans le principe, il n'y avoit point de douleur. Le malade n'éprouvoit qu'une sensation
de tiraillement à la peau. Après avoir été stationnaire pendant plusieurs mois, le bouton se convertit soudainement
en Ulcère ; et, dans l'espace d'un an , il occupa le côté droit du nez , la joue, et la paupière
coiTespondante. Le malade, alarmé, se rendit à l'hôpital St.-Louis. La surface de l'Ulcère étoit irrégulière,
blanchâtre dans le fond. Ses bords étoient itTéguliers et durs ; il en découloit une petite quantité de matière
ichoreuse. Nous eûmes recours au caustique de Uousselot, mis en usage avec tant de succès par le célèbre
h
Bji I
'4 ; III . b