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2(38 MALADI E S UE LA PEAU.
droit justifier, à cet tjgard, l'enthousiasme de Galien, enthousiasme que partagea depuis un-philosophe moderne, toucliaiit
l'importancc dc'cet organe dans lequel ces auteurs voulurent trouver la soui-ce uuique de la supériorité morale,
qui pince l'espèce humaine si fort au-dessus des autres créatures.
DCCCCXXXIV. Il est certain que les organes des animaux dans lesquels on observe quelqu analogie de sensibilité
avec la main, sont encore bien loin de présenter la délicatesse dont elle jouit dans ses fonctions, même dans les
individus che?. lesquels le travail et les autres influences physiques favorisent le moins leur exercice. Jamais, en effet, la
trompe de l'éléphant, la lèvre supérieure du cheval, le grand pli de la peau, à la manière des espaces interdïgitaires,
ijui est doué dans la chauve-souris d'une sensibilité extrêmement prononcée ; jamais, disons-nous, ces parties, l'admiration
des observateurs et des philosophes, par l'heureuse harmonie de leur forme et de leur organisation, n'ont
pu être comparées sous ce rapport à la main de l'homme. La supériorité de celle-ci tient surtout à la iaculté particulière
aux doigts, dont elle se compose, de pouvoir être opposés; faculté dont est prive le singe lui-memo par
la situation do son pouce. Par. elle et a ta faveur des nombreuses articulations que Ibrnient entre eux les os de la
main et des doigts, cet organe se moule, pour ainsi dire, sur les corps, ou bicu les touche par un grand nombre
de points, d'où la facilité accordée à l'homme d'apprécier plus exactement les formes et les autres qualités physiques
des corps. Toutes les autres dispositions organiques y ont été ménagées avec autaut d'avantage que de précision, ainsi
que nous favons fait remarquer en décrivant l'aspect particulier, l'épaisseur de la peau, mais surtout le développement
des papilles daus cette partie. Partout où se manifeste une sensibilité vive ou énergique, les papilles présentent aussi
un développement plus considérable. Une seule exception existe peut-être à cet égard, et encore est-elle susceptible
de beaucoup de restrictions; car, si le chatouillement, ou cette sensation mixte qui tient à la fois ilu plaisir et de
la douleur, se manifeste dans certaines parties qui ne présentent pas le développement prononcé des papilles dont nous
"avons fait mention, comme cela se voit, par exemple, au défaut des côtes, il ne seroit pas impossible que le caractère
particulier de cette sensation tint à la combinaison des deux systèmes nerveux dont les eifets sont si marqués dans
le centre épigastricpie.
DCCCCXXXV. L'importance particulière inhérente au sens du toucher explique naturellement l'utilité de ces
détails de structure que présente la main, puisqu'ils assurent l'e.xactitude et la régularité de sa fonction. Ce sens préside
en quelque sorte à l'éducation de tous les autres. En effet, dès que l'enfant commence à remuer ses mains,
un instinct naturel le porte à toucher tout ce qui se trouve à sa portée; souvent même, sans tenir compte des distances
cju'il ignore, on le voit diriger ces parties vers les objets les plus éloignés, les étoiles, par exemple, et les autres corps
célestes, comme poussé par le besoin de soumettre tout ce qui l'environne à ce régulateur. Tous les autres sens sont
encore engom-dis, quelques-uns même n'existent pas, comme celui de l'odorat, que déjà le toucher paroit avoir acquis
chez l'enfant un développement remarquable. Il n'en est aucun d'ailleyrs qui soit susceptible de se perfectionner autant
que lui dans les circonstances où les autres viennent à s'afîoiblir ou à se détruire. Les observations d'aveugles dont ce
sens est devenu le guide sûr et habile sont aussi nombreuses qu'intéressantes. Est-il nécessaire de. rappeler le fait de ce
sculpteur célèbre, qui , grâce à la finesse de son toucher, put continuer avec succès l'exercice de son art, après avoir
perdu la vne.^ Tout le monde connoît l'histoire de l'antiquaire Saundersou, qui, également aveugle, distinguoit de
même les médailles avec une grande précision. Parlerons-nous enfin de cel a'.-eitglc-né de Puiseaux, dont on a raconté
les ouvrages faits ù la main, comme formant autant de merveilles.' Tous ces faits sont suflisamment connus; ils attestent
sans doute le haut degré de perfection que le sens du toucher peut atteindre; mais ils ne justifient pas davantage l'opinion
des physiologistes métaphysiciens qui eu exagérèrent beaucoup trop l'influence. Il est surtout bien impossible de
ne voir dans l'actiou des autres sens qu'uu mode particulier, ou une nuance du toucher, aujourd'hui que fanatomiste
découvre dans chaque appareil une disposition du système sensitif tout-à-fait spéciale.
DCCCCXXXVl. Le toucher fournit à l'homme un moyen sûr de rectifier une foule d'erreurs dans lescfuelles il se
trouve entrahié par les autres sens. Ce service est aussi précieux qu'incontestable dans beaucoup de cas pathologiques,
où seul il peut Ibuniir les élémens d'un diagnostic solide. Il devient aisé de s'en convaincre encore par la comparaison
que permet son état imparfait et, pour aiusi dire, grossier, chez le vieillard, en qui l'enveloppe cutanée de plus
en plus racornie,-a perdu en même temps sa souplesse. Indifférent et presque étranger aux passions qui agitent la
société autour de lui, le vieillard ne vit désormais que par ses besoins naturels et ses appétits; ce qui explique pourquoi,
seul au milieu de l'affoiblisseiuent, souvent même de la perte absolue de tous les autres sens, celui du goût conserve
toute son activité jusqu'au dernier moment.
ARTICLE II.
DE L ' e x h a l a t i o n CUTANÉE.
DCCCCXXXVII. La vieillesse n'apporte pas dans la peau humaine le seul changement que nous venons de signaler
dans l'ordre le plus important toutefois de ses fonctions ; il en est encore alors de non moins remarquables dans
l'exercice de plusieurs autres phénomènes organiques dont elle est le siège. Aussitôt que l'économie animale est parvenue
au summum ou à l'apogée de son développement, il faut s'attendre à la voir se détériorer, et en même temps
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languir par une conséquence tout-à-fait nécessaire à l'exercice des fonctions qui lui sont départies. Cette observation
générale pour l'ensemble des appareils organiques devient plus évidente encore par ce qui arrive alors à la peau. L'extrême
diminution, pour ne pas dire la cessation totale de l'exhalation cutanée à cette époque do la vie, répond au
reste à fétat de constriction et de racornissement qu'a subi particulièrement la couche épidcrmique. Mais combien la
natui e s'est ehcore-monlrée prévoyante et sage, s'il est permis de parler, ainsi, dans cette nouvelle disposition! Dans
les deux modes de transpimlion insensible et de sueur, qui ne sont au fond que deux degrés du même phénomène,
l'exhalation a pour effet immédiat d'enlever à féconomie, d'une part , le produit d'une sécrétion dont le séjour pourroit
lui être préjudiciable, et de l'autre, un excès de calorique qui ne lui seroit quelquefois pas moins funeste. Or, aucune
de ces conditions exubérantes n'existe dans le vieillard qui n'a plus de matériaux nutritifs excédans ù dépenser; car
une alimentation languissante les répare à peiiie, et le foyer de la clialeur vitale étant presque éteint, il a constamment
besoin que la chaleur intérieure ranime sa peau glacée. Il étoit donc bien important que dans cet état où le'travail
nutritif ne se fait presque plus, les déperditions devinssent moins abondantes ou plus difficiles. Tel est justement le but
du changement cju'éprouve l'enveloppe cutanée aux approches de la vieillesse. Ce changement est également marqué chez
• les animaux par f obstacle qu'oppose à l'évaporution lu couche écailleuse qui recouvre certains reptiles, comparativement
à la facilité qu'elle trouve dans la peau lisse et éminemment perspirable des batraciens. Une observation qui a mis cette
circonstance hors de doute est celle des crapauds qu'on a trouvés vivant encore, après être demeurés quelquefois enfouis
dans des troncs d'arbres, ou dans des blocs de pierre durant un laps de temps plus ou moins considérable. L'expérience
tentée à cet égard, dans le sein de l'Académie des Sciences, il y a phis d'un demi-siè.cle, et renouvelée dans
ces dernières années par M. Edwards, a fait voir que le prolongement d'existence acquis aux animaux de cette e-spèce,
qu'on enferme dans des boîtes hermétiquement fermées, sur ceux qu'on laisse exposés à l'action libre de fatmosphèrc,
ne peut être rapportée qu'à l'activité de l'evaporation dans ce dernier cas, et à su lenteur dans l'autre. Une grenouille
qu'on e.xpose ainsi quelque temps à l'action de l'air se dessèche et se momifie assez promptement. Autant en arrive aux
poissons qxi'on retient hors de félément qu'ils habitent ; car cet élément les défend plus efficacement encore que leur
épiderme éca illeux contre les suites funestes de cette décomposition trop prompte. C'est par analogie que, d'après ces
faits, Maupertuis uvoit imaginé que l'application d'un vernis sur la peau de l'homme pourroit bien servir à prolonger
son existence au-delà des bornes ordinaires; conséquence absurde, et dont la subtilité n'a guère pu sauver le
ridicule.
DCCCCXXXVIII. Une conséquence plus légitime à déduire des expériences et des observations que nous venons de
c i t e r , c'est qu'il existe un e connexion intime entre l'exhalation cutanée et la chaleur animale. L'une et l'autre ont été
soumises à des essais réitérés de calcul par d'habiles'et laborieux observateurs dont les travaux, comme on devoit le
prévoir, n'ont jamais donné des résultats identiques. Depuis les célèbres expériences de Sanctorius à Venise, répétées
avec une précision bien supérieure par Lavoisier et Seguin, les auteurs ont très-diversement évalué les quantités de
transpiration insensible produites dans une période de temps donnée. Ainsi, le premier estima que, déduction faite de ce
qui s'échappoit par les urines et par les autres matières excrémentitielles, la perte par la transpiration cutanée étoit
encore de cinq livres. Ûodart arriva par les mêmes expériences à ce résultat d'une once de transpiration insensible
" environ par heui'e ; sa quantité générale étant d'ailleurs à toutes les autres excrétions dans le rapport de douze à quinze.
Robinson renouvela ces recherches sur des individus d'âge très-différent, et crut pouvoir en déduire des règles constantes
pour les quantités d'exhalation cutanée qui , suivant lui, est à l'urine, comme treize cent quarante à mille pendant
la jeunesse, et dans la vieillesse, comme neuf cent soixante-sept à mille. Sauvages, Gorter, Kcil, Rye, Linuings
établirent aussi les bases de leur estimation à cet égard avec toute l'exactitude que comportent des recherclies aussi
compliquées avec des données aussi fugitives. Suivant les résultats obtenus par Lavoisier et Seguin, trente-deux grains
constituent la plus forte quantité de transpiration évacuée pur minuto; dans une heure deux onces trois gros quarantehuit
grains; cinq livres par jour. Huit à dix grains forment son type ordinaire; quantité qui varie d'ailleurs en plus
ou en moins pendant tel ou tel autre acte organique, durant la digestion, par exemple, et durant les alternatives de
santé et de maladie.
DCCCCXXXIX. On sent tout ce qu'ont de précaire des bb.servations et des expériences de ce genre, lorsqu'on connoît
toute fincertitude et te peu de fixité du point de départ. Loin d'être surpris de la dissidence qui règne entre les
diverses appréciations, il Amdroit bien plutôt s'étonner qu'elles eussent plus tie concordance. Seguin et Lavoisier
furent les premiers qui tinrent compte de l'exhalation pulmonaire. On a comparé aussi les difiérentes quantités de
déperdition à celles des matières ingérées; et les bases ne sont pas plus fixes à cet égard que celles dojit nous avons
déjà fait mention. L'inlluence relative des saisons, des climats, a été encore évahiée a^ussi Jjien que celle des impressions
physiques auxquelles les hommes se trouvent naturellement soijmis; et cette enumeration qui ne présente que
le très-petit nombre des difficultés qu'on a eu à vaincre, indique néanmoins la défiance que doivent naturellement
inspirer de pareils documens. Que seroit-ce s'il eût fallu tenir compte de ces dispositions morales toutrà-fait insaisissalîles,
alors cependant que leur influence'se fait sentir si profondément dans l'accomplissement des phénomènes physiques!
De pareils obstacles doivent arrêter bien des expérimentateurs, par la crainte fort naturelle de n'obtenir, après
des recherches quelquefois très-pénibles, que des résultats complètement illusoires.
DCCCCXL. C'est avec juste raison que M. Edwards a pris le parti d(i diriger d>bord son attention à cet égard
sur des animaux pkcés dans des conditions moins variables ; les ayant ensuite modifiées d'une manière plus ou
moins sensible, il u pu en suivre les effets d'une manière également claire et positive. Ces observations, faites avec une
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