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78 MA L A D I E S D E L A P E A U .
expression. Eufm , quelque temps après, l'épiderme se soulevoit et se détachoit par lambeaux. Les tégumens
ne lardoicnt pas à recouvrer leur état ordinaire.
Deuxième Observation. — La nommée Marguerite Ancelin, âgée de trente ans, marchande de fruits, eut
une vive dispute avec son mari, à la suite de laquelle des hémorroïdes se manifestèrent. Deux jours après,
de petites élevures rougcâtres parurent aux aines, sur les mains, les avant-bras, autour du col et sur le
visage. En se déclarant, elles firent éprouver un sentiment do démangeaison à la malade. Le lendemain ,
ces élevures s'étoient élargies, étoient plus saillantes que la veille, et faisoient éprouver une cuisson violente;
bientôt elles se réunirent et formèrent des plaques d'un rouge violet. Sur la main gauche et sur l'avant-bras
du même côté, ces élevures, par leur rapprochement et par leur réunion, formèrent des tumeurs qui, par
leur couleur et leur dureté, ressembloient assez bien à celles que produiroient des piqûres d'abeilles. Un sentiment
de brûlure qu'éprouvoit la malade, l'empêchoit de dormir. L'éruption alla eu augmentant pendant six
à sept jours ; souvent elle occasionnoit un léger accès de fièvre. Il est digne de remarque que cette femme avoit
les cheveux châtains et les yeux bleus, comme l'individu de l'observation précédente. Elle étoit sujette à des
fleurs-blanches, qui diminuèrent uu peu par l'effet de l'éruption cutanée dont nous parlons. D'ailleurs, la terminaison
de l'exanthème s'effectua comme nous l'avons indiqué plus haut.
CXCVII. Si on lit avec quelque attention les faits relatifs aux deux dernières espèces que je viens de décrire,
on sera tenté de les renvoyer, soit à l'érjsipèle , soit à l'érythême. En effet, une affinité frappante semble les
lier à ces éruptions aiguës, aussi bien qu'au genre des Dartres. Il faut en convenir : on éprouvera toujours
quelqu'embarras pour classer ces affections intermédiaires, à moins que les Nosographes ne se déterminent à en
faire uu genre particulier. Cependant j'ai cru appercevoir que ces deux maladies se rapprochent par plus de
traits d'aûinité des maladies herpétiques. En effet, quoique chaque phljctène, considérée en particulier,
observe une marche rapide, néanmoins l'ensemble de la maladie suit une marche chronique. J'ai vu des
vésicules naître et se succéder pendant près de dix-neuf mois, chez une malheureuse femme, dont j'ai déjà cité
l'observation, et qui termina ses jours par le progrès de ce douloureux exanthème.
M A L A D I E S DE LA PEAU.
SECONDE PARTIE
Des Faits relatifs à Vhistoire générale des Dartres.
CXCVIII. Nous venons d'exposer, avec l'exactitude la plus sévère, les phénomènes particuliers qui servent à
établir et à fixer d'une manière irrévocable les caractères distinctifs des Dartres. Rassemblons maintenant les
faits qui sont communs à toutes les espèces. Par cette méthode, nous parviendrons à compléter la théorie d'un
genre d'affection qui s'étend chaque jour davantage chez l'espèce humaine, et qui est, en quelque sorte,
devenu vulgaire à cause de sa fréquence et de l'universalité de ses ravages. Une matière aussi importante est
loin d'avoir été encore convenablement débrouillée, quoique tant d'auteurs s'en soient occupés.
A R T I C L E PREMIER.
Des Phénomènes généraux qui caractérisent la marche des Dartres.
CXCIX. Les Pathologistes indiquent ordinairement, sous le nom général de Dartres, des phlegmasîes cutanées
qui affectent le plus souvent une marche chronique, et qui s'offrent à l'observation sous une multitude de
formes diverses. Lorsqu'elles commencent à se manifester, on apperçoit sur la peau un assemblage de petits
boutons rouges , abondans, épars ou réunis, dont l'apparition est annoncée par un sentiment de tension trèsincommode,
on d'un prurit plus ou moins violent.
CC. Bientôt ces boutons, d'où suinte une humeur ichoreuse, se convertissent en légères écailles farineuses,
ou en larges exfoliations épidermoïques. Quelquefois, ce sont des croûtes épaisses qui couvrent le siège du
mal; quelquefois aussi, la matière de la suppuration agit sur l'appareil tégumentaire, en le corrodant. Dans
certains cas, ce sont des pustules qui s'élèvent et se maintiennent avec leur forme primitive, jusqu'à leur
entière dessication ; dans d'autres cas , ce sont des phlyctènes ou vésicules remplies d'un fluide séreux et transparent,
qui naissent et s'éteignent avec la rapidité de l'érysipèle. Enfin, il est de ces affections dans lesquelles
la peau rougit, se tuméfie, et simule tous les phénomènes de l'érythême, &c.
CCI. La fièvre accompagne rarement ces exanthèmes opiniâtres, à moins qu'une irritation extraordinaire ne
survienne dans le système dermoïde ; c'est ce qui fait que leurs périodes s'écoulent avec tant de lenteur :
Herpes affcctua diuturnus est, et longo tempore senescens, dit Hafenreffer. J'excepterai néanmoins les deux
dernières espèces que j'ai décrites. Mais cette fièvre concomitaute n'a pas constamment un caractère aigu ; elle
se prolonge quelquefois pendant un temps très-considérable.
CCII. Les Dartres se dessinent ordinairement sur le système dermoïde par des plaques ou éruptions arrondies,
et ce phénomène est digne de remarque. Les unes forment des cercles réguliers; plusieurs sont ovales ou
semi-lunaires : on en voit qui représentent des triangles, des crochets, et autres figures bizarres propres à étonner
les observateurs. On disLinguoit sur la peau d'une jeune femme que l'on traitoit à l'hôpital Saiut-Louis, d'une
Dartre furfuracée ( Herpes fuifuraceus ci/vinaius ), des chiffi'cs si bien imités, qu'ils faisoient une illusion
complète à tous les regards.
CCIII. Un caractère non moins frappant des différentes espèces de Dartres, est de s'étendre en exécutant
une sorte de mouvement de reptation sur la périphérie du corps vivant. De là sont dérivées les expressions
diverses auxquelles on a eu recours pour les qualifier : herpes, serpigo, serpentia ulcéra, &c. On a voulu indiquer
par ces dénominations énergiques la marche sinueuse de ces phlegmasies cutanées qui ont quelque analogie
avec celle des reptiles.
CCIV. Quoique les dartres puissent atteindre indistinctement toutes les parties de nos tégumens, chaque
espèce paroît néanmoins occuper un siège d'élection aussi-tôt qu'elle se développe. La Dartre furfuracée attaque
de préférence le voisinage des articulations, la face externe des bras et des cuisses; enfin, les endroits contigus
aux grandes aponévroses. La Dartre squammeuse s'établit, au contraire, sur la face interne des extrémités
supérieures et inférieures , dans le pli des coudes et des genoux, dans les oreilles ou près du vagin , non loin
des organes où s'opère naturellement quelque suinteuicut ou quelque sécrétion. On trouve communément la
Dartre crustacée sur le tissu graisseux des joues. La rongeante dévore les lèvres, les ailes et la cloison moyenne
du nez. La pustuleuse tourmente pour l'ordinaire le menton, le front, le derrière des épaules. La phlycLénoïde
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