'I
II ' •.>::|iiiuin '
V-i MA L A D I E S D E L A P E A U .
los malades éprouvasscul la moiiidre douleur; quand je me scrvois d'une aiguille assez line, les ampoules ie
vidoienl très-dilTicilcuienl, el biculot une quaulilé nouvelle de fluide s'y aceuniuloit, en sorle que nous
les trouvions de nouveau remplies.
Les vésicules ne se montrent point simultanément sur toute la surface de la peau ; elles se succèdent, pour
ainsi dire, les unes aux autres, et leur exsiccation s'opère également d'une manière progressive. Lorscjue
le travail de la suppuration est terminé, elles changent de couleur; elles deviennent d'un rouge noirâtre,
et se changent en écailles ou croûtes légères, qui sont plus ou moins adhérentes aux tégumens : elles offrent
quelquefois l'aspect de plusieurs brûlures , qu'on auroit opérées avec un charbon ardent.
La Dartre phlycténoïde se manifeste avec des démangeaisons aiguës el brûlantes. Ces démangeaisons
surviennent comme des crises, et durent plusieurs lieurcs. Quehiuefois , ce sont des élancemens difficiles
à décrire. J'interrogeois un malade sur le genre de prurit dont il éloit ailecté. il croyoit, disoit- il, être
couché sur un porc-épic, dont les pointes ti'aversoient ses chairs. Ce même individu ne pouvoil approcher ses
mains du siège du mal, à cause de la trop vive sensibilité des papilles cutanées. Alors il lui éloit impossible
d'appaiser ses démangeaisons autrement qu'iivec un linge, dont il se frottoit superliciellement et légèrement
la peau. Ceux qui sont atteints de la Zone, se croient entourés d'une ceinture de feu. Il y avoit à l'hôpital
Saint-Louis un ouvrier qui, non moins malheureux que Prométhée, croyoit sentir des vautours affamés qui
lui rougeoient les entrailles. Ce phénomène n'éloit point inconuu. Herpes p/xecordia exeilejis : le lie est
l'expression énergiqne de Tulpius.
Ce qu'il y a de déplorable, c'est que les démangeaisons ne disparoissent pas toujours, lorsque l'éruption
s'évanouit. J'ai achninistré des soins à un homme qui étoit radicalement guéri d'une Dartre phlycténoïde,
au point qu'un appercevoit à peine sur la peau quelques légères cicatrices. Cependant il a ressenti, pendant
près de huit mois, des cuissons intolérables dans les mêmes parties où existoient auparavant les boutons
vésiculeux. Une jeune dame qui avoit été atteinte de la Dartre phlyclénoïde zoniforme, long-temps après sa
guérison, éprouvoit encore des douleurs analogues à celles qui s'éloient manifestées dès les premiers temps de
l'invasion herpétique sur l'hypocondre droit.
Cette alTection est sujette à de très-fréquentes récidives. On la voit reparoître, comme les autres Dartres,
à des époques plus ou moins éloignées. Souvent les malades quittent l'hôpital Saint - Louis parfaitement
rétablis en apparence ; el quelques mois après , ils reviennent avec les mômes symptômes et les mômes
souffrances. J'ai vu dans quelques cas, lorsque la Dartre phlyclénoïdc étoit desséchée, les vésicules se
rouvrir, et devenir saignantes, causer de nouveau des élancemens insupportables, comme s'il y avoit dans
la peau une multitude d'épingles. Il semble impossible, dans certaines circonstances, d'assigner un terme
à cette maladie cruelle ; elle renaît en quelque sorte de ses propres cendres.
La Dartre phlycténoïde ou vcsiculeuse conduit fréquemment à la mort , lorsqu'elle devient confluente
et qu'elle envahit tout le système des tégumens ; principalement, si elle n'épargne point la membrane
muqueuse qui revêt rintérieur du tube alimentaire. Mais lorsqu'elle n'est que partielle, et qu'elle se borne
à une partie du corps, il est rare qu'elle soit dangereuse.
L'éruption herpétique est quelquefois si universellement répandue, que les individus qui en sont frappés
perdent la faculté de se mouvoir. Toutes leurs fonctions sont embarrassées : aux douleurs locales, viennent
se joindre des souffrances intérieures qui sont d'une violence excessive, des anxiétés, des mouvemens
spasmodiques, de fréquentes défaillances. Du reste, les symptômes qui se manifestent, sont absolument
analogues à la direction que prend le virus herpétique. S'il se porte vers la tête, il y a céphalalgie ,
délire, et un affreux tintement d'oreilles ; s'il gagne la poitrine, il y a des palpitations, et une gène
continuelle dans la respiration ; enfin, s'il s'étend jusqu'aux intestins, il survient un sentiment de tension
et de bnilure dans l'abdomen et dans les aines ; les malades sont épuisés par une diarrhée colliquative, &c.
C'est alors que les urines sont rouges et très-enflammées.
Parlerai - je des ulcérations produites par la Dartre phlycténoïde ? Elles rendent une sérosité noire et
sanieuse : presque toujours elles sont superficielles. Cependant la Dartre rampe dans l'intérieur du corps. J'ai
observé qu'elle suscitoit une toux opiniâtre, et l'expectoration de quelques crachats purulcns. Pourquoi
faut-il que, dans cette déplorable circonslance, la déglutition devienne parfois laborieuse et presqu'impossible?
Ce phénomène s'est présenté à moi dans l'hôpital Saint-Louis. D'autres praticiens ont vu la
gangrène suivre l'éruption de cet horrible exanthème, provoquer la chiite des phalanges, et causer d'affreux
ravages sur tous les membres.
C'est à cause de ces funestes effets, que certains auteurs représentent la Dartre phlycténoïde avec des
couleurs si redoutables, qu'ils ont comparé les éruptions do la Dartre phlycténoïde aux éruptions pestilentielles.
Ce qu'il y a de très - remarquable, c'est que les symptômes fébriles, qui lui servent de cortège, no sont pas ce
qui constitue le danger de la maladie. On a vu dos malades succomber par la seule violence des phlyctènes,
quise multipliant à l'inlini, déchiroient universellement l'épiderme, et le couvroient de plaies livides et noi-
M A L A D I E S DE LA PEAU.
Obserfntions relatives à la Dartre phlycténo'ide.
, 5
CXCIII. Première Observation. — J'ai fait graver dans cet ouvrage la tête de la femme qui fait le sujet
de notre première observation. ( Voyez la Planche XXIIL ) Anne Brundomy étoit âgée de cinquante-sept
ans, lorsqu'elle se présenta à l'hôpital Saint-Louis pour y recevoir nos soins. Elle avoit éprouve peu d'accidens
pendant lo cours de sa vie; mais elle essuya un vif chagrin par la perte d'un époux qui avoit toujours
été l'objet do ses plus tendres affections. Un jour, après avoir éprouvé quelque embarras dan» les voies
digestivcs , elle fut prise spontanément d'une éruption vésiculcuse, qui .s'étendit insensiblement à tout le
système des tégumens. Ces vésicules étoient ovales; elles se multiplièrent si rapidement, qu'elles devinrent
bientôt confluentes : elles u'étoient d'ailleurs environnées d'aucune aréole inflammatoire. Interrogée sur le
genre de douleur qu'elle éprouvoit, la malade nous disoit être en proie à un sentiment général de brûlure
et de cuisson qu'elle pouvoit à peine supporter. L'éruption fît peu à peu des progrès funestes. Des phlyctènes
se formèrent sur la membiane muqueuse de la bouche, de l'oesophage, et de tout le tube intestinal.
II lui sembloit, disoit-elle alors, que des charbons ardens rouloient dans ses entrailles. La malade resta
près de dix-neuf mois dans ce triste état. Enfin, durant les quinze jours qui précédèrent sa mort, elle fut en
proie aux accidens les plus prcssans d'une fièvre adynamique continue. Son visage étoit décomposé; sa langue
sèche et couverte de croûtes^ étoit dans certains endroits ulcérée, et présentoit dans d'autres de petites
ampoules remplies d'un fluide grisâtre. Les dents étoient fuligineuses, l'haleine très-félide. A ces accidens,
se joignoient un pouls fréquent et dur, une tension de ventre qui étoit très - sensible, et un délire violent
et continuel pendant les nuits. La veille du jour où elle expira, les selles étoient abondantes et involontaires,
et la respiration étoit très-gênée.
Deuxième Obse/vation. — Il y avoit à l'hôpital Saint-Louis, un commissionnaire, nommé Pierre Roger,
lequel étoit âgé d'environ soixante ans. Il fut attaqué d'une Dartre phlycténoïde. Elle se montra sous la
forme de pustules séparées, et de la grosseur d'une noisette, sur le moignon, ainsi que sur les parties
antérieures et postérieures de l'épaule droite, à la manière d'une écharpe. Le côté interne du bras en étoit
également affecté. On en voyoit aussi sur le col et sur le cuir chevelu. Ces vésicules, remplies d'un fluide
transparent, s'affaissoient en se ridant, ou se crevoient spontanément, et laissoient le tissu réticulaire à nud.
Quelques jours après le dessèchement de l'éruption, la peau présentoit des maculatures rougeâtres, comme
si ou l'eût brûlée avec le feu ou avec l'acide nitrique concentré. Les démangeaisons ne furent pas trèsvives
; mais il y avoit sur toute la peau un sentiment de tension très-incommode. J'observai encore qu'il
survint un flux de sang par le rectum. Cet homme avoit été exposé très-long-temps aux vicissitudes des
saisons, et dans l'état de détresse où il se trouvoit, il n'avoit pu se procurer môme les choses les plus nécessaires.
Troisième Observation. — Nous avons observé la Dartre phlycténoïde zoniforme chez le nommé Jean-
François Lecler, âgé de cinquante-huit ans, qui faisoitl'ofïice d'infirmier dans les salles de l'hôpital Saint-Louis.
Il fut attaqué, dans le mois de juillet, des premiers symptômes qui appartiennent à cette variété. Il éprouva
des démangeaisons très-vives vers la région lombaire. Plusieurs vésicules se manifestèrent sur cetle région ;
il s'en forma d'autres autour de l'ombilic, et sur les fausses côtes du fîanc droit. Elles s'accrurent, et
devinrent très-saillantes. En se réunissant k d'autres, elles formèrent des plaques peu étendues. La peau
étoit très-rouge et très-enflammée. Le malade y ressentoit des douleurs lancinantes qui l'empêchoient de
dormir. Dans le commencement, les vésicules étoient tendues, très - élevées, transparentes, et contenoient
un fluide séreux ; ensuite elles devinrent jaunâtres et le fluide plus épais ; elles finirent par se dessécher ; mais
la place qu'elles occupoient, est constamment engorgée ; elle offre des maculatures d'un rouge foncé, qu'on
croiroit indélébiles.
Quatrième Observation. — Autre exemple de la même variété. J'ai observé la Zone chez une jeune dame, qui
a bien voulu permettre qu'on dessinât, avec la plus sévère exactitude, le genre d'éruption dont elle éloit atteinte.
Consultez la Planche XXIV. Cette Zone étoit composée de petites vésicules plus ou moins rapprochées, qui
se rcmplLssoient d'une sérosité ichoreuse. L'exanthème alloit en montant, depuis l'ombilic jusqu'au milieu
de la colonne épinière. La malade soulfroit des crampes intolérables à la région épigastrique , et les eflets de la
brûlure dans toute leur énergie. La langue étoit chargée, et la malade n'avoit aucune appétence pour les
alimcns. Le sommeil étoit interrompu. Ce qu'il y avoit de remarquable, c'est que les glandes des aisselles et des
aines étoient un peu engorgées. Les boulons vésiculeux étoient dispersés par plaques, et il y avoit entre ces
pla(|uos des intervalles libres. Croira-t-oii que depuis deux années cette Dartre n'a cessé de reparoitre au
renouvcjlcmcnt de toutes les saisons, et qu'alors même que les phlyctènes s'évanouissent, la malade est en
proie aux douleurs les plus cuisimtes, qui suivent absolument le trajet de la ceinture dartreuse ?
Cinquième Ohseruaiion. — L'observation que je vais rapporter est intéressante, à cause de la forme
y