DISCOURS PRÉLIMINAIRE.
PREMIÈRE SECTION.
Coup-d!oeil général sur les Maladies qui sont le sujet de cet Ouvrage.
1 " . J 'ENTRE dans une carrière presque déserte, où peu d'hommes ont pénétré avant
moi, où aucun travail antérieur ne m'a servi de guide , où tout est nouveau pour l'observation,
où tout est problême pour la pensée. J'ai frayé moi-même la route que je parcours.
Qu'on juge des nombreux obstacles dont il m'a fallu triompher !
II. De toutes les parties intéressantes dont traite notre art , aucune sans doute n'a été plus
négligée C[ue celle dont je m'occupe. Les ouvrages que nous possédons, n'ollrent que des
idées incertaines, un amas immense de théories dangereuses ou du moins superflues. On y
puise à peine quelques faits disposés sans méthode et sans ordre. On n'a pas même approfondi
fétude des objets qui sont journellement sous nos yeux. J e n'en veux pour preuve qu'une
multitude d'affections jjsoriques qu'on confond presque toujours au détriment des individus
qui les éprouvent. Un médecin célèbre a eu raison de dire que,dans une semblable matière,
les auteurs eussent mieux servi la science, s'ils s'étoient bornés à transcrire leurs propres découvertes
, au lieti de copier servilement les erreurs commises par leurs devanciers.
S. III. Placé sur un théâtre où ces maladies se présentent et se renouvellent sans cesse , j'ai
pu mieux qu'un autre débrouiller la confusion introduite dans les travaux des anciens; j'ai [>u
suivre la marche, les périodes, le déclin, les recrudescences, les métamorphoses des divers
exanthèmes. C'est dans les hôpitaux que leurs traits caractéristiques se prononcent avec
plus d'évidence et d'énergie , parce qu'on les contemple dans toutes les époques de leur
existence.
S. IV. J'ai eu besoin sans doute d'une patience infatigable pour démêler des faits aussi
nombreux dans un champ si vaste pour l'observation médicinale. En elTet, quelle inconcevable
variété dans les dégradations de tout genre dont nos tégumens sont susceptibles ! Tantôt
c'est fépiderme seul qui s'altère, se résout en une substance farineuse, ou se détache en petites
exfoliations furfuracées, semblables aux lichens ou aux mousses parasites qui souillent l'écorce
des vieux chênes ; tantôt ce sont des lames écailleuses plus ou moins étendues , plus ou moins
épaisses, plus ou moins dures, plus ou moins régulières ; tantôt cette même membrane est parsemée
d'éruptions papuleuses ou pustuleuses, miliaires ou perlées, vésieuleuses ou phlycténoides,
etc. Quelquefois c'est simplement le système dermoide qui se décolore sans s'élever
au-dessus de son niveau , et qui nous montre tour-à-tour des taches rouges, brunes, noires,
jaunes, livides , ou d'une nuance verdâtre comme la chair des cadavres en putréfaction.
D'autres fois aussi il se déprime dans certains endroits de sa surface, et présente des excavations
profondes. Mais plus souvent les maladies cutanées laissent transsudcr une matière
ichoreuse ou purulente qui se concrète en une masse croùteuse, pour tomber, renaître, et
pour tomber encore. Ces croûtes, dont la figure varie ii l'infini, représentent des cercles,
des losanges, des prismes, des cylindres, des tubercules ou des mamelons proéminens qui
simulent les sucs lapidifiques cristallisés. On en voit qui s'étendent insensiblement, et s'arrondissent
en zones relevées par des bords affreux, ou qui rampent comme les serpens en lignes
smueuses et longitudinales. Mille autres accidens peuvent survenir. Il est des circonstances où
pj. '.T*