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p,48 AlALADIES DE LA PEAU.
et l'anxiétc inseparables de ces degoíiEantes éruptions; leur teint pâle et plombe-, l'oedématie générale des membres, qiu
leur laissoit à peine la lormc luimaine, annouçoient le terme prochain de leur existence douloureuse, et cependant elles
recouvroient la santé et revcnoient, pour ainsi dire, à la vie, aussitôt (¡u'unc main bienfaisante venoit soulager leur
infortune et les soumettre à des soins médicaux appropriés. Ainsi, il n'y a rien à espérer dans les psoridcs, des mouvemens
de la nature.
DCCCXXVIII. On observe particulièrement ces maladies, comme je l'ai déjà dit, dans les lieux où des masses d'individus,
réunies dans des espaces trop étroits, ne permettent que diflicilement d'observer les soins ordinaires de la proprohéet
les autres règles de l'hygiène. C'est dans les prisons, dans les maisons de travail, souvent même dans les"
écablissemens pour l'éducation" des enfans du peuple, quand ils ne sont pas tenus avec Tordre et la sévérité nécessaires,
quelles sévissent avec plus de fureur. Un médecin éclairé et judicieux assure avoir fait la remarque que des
deux insectes de la gale et du prurigo pédiculaire, l'un nuisant à la subsistance de l'autre, il est rare de les rencontrer
ensemble. Ce qu'il y a de positif, c'est que certaines professions, celle de vidangeiu's, par exemple, sont fuuestes à tous
les deux ; le gaz hydrogène sulfui-é est ici manifestement l'agent de leur destruction. Nous aurons occasion de signaler,
au contraire, d'autres métiers qui paroissent favoriser la propagation de ces animalcules ; comme aussi d'apprécier les
circonstances d'âge, de constitution et de tempérament qui prédisposent plus immédiatement à la psoride papuleuse
et à la psoride crustacée; mais ces détails trouveront mieux leur place dans le chapitre suivant.
A R T I C L E 11.
Considerations sur le diag-nostic des Psorides, cl sur leurs rapports d'analogie avec quelques autres
maladies cutáneos.
DCCCXXIX. On a long-temps confondu, et beaucoup de médecins confondent encore entre elles ces éruptions.
11 importe donc que leurs caractères spécifiques soient exactement indiqués ici pour que leur détermination soit
aussi dans la circonstance, sûre et facile.
DCCCX.KX. La plus commune des trois espèces, la pustuleuse, présente dans l'état simple,des traits assez prononces,
mais qui deviennent plus incertains lorsqu'on arrive à ses diverses nuances. Le siège qu'occupent ordinairement ses
boutons est déjà une donnée très-utile pour apprécier la nature de la maladie. Ainsi, nous avons vu que ce sont l'interstice
des doigts, le pli des articulations, le creu.x des aisselles, et toutes les parties, en un mot, qui fournissent une
espèce d'abri à la cause propagatrice de la maladie, et en facilitent la contagion, oil se montrent prescjue toujours les
pustules de la gale. Les exceptions, sous ce rapport, sont néanmoins assex communes ; on cite, par exemble, le cas
d'un seigneur italien, qui fut atteint de la psoride pustuleuse au visage, pour avoir applique sur cette partie son
manteau sortant des mains d'un domestique infecté de cette éruption. On voit les nourrices ou les servantes galeuses
en déposer le germe sur les fesses des enfans, parce qu'elles sont dans l'habitude d'appliquer leurs mains sur ces
parties en les portant à la promenade.
DCCCXXXl. Il existe, pour le prurit de la psoride pustuleuse, un trait particulier qu'on ne rencontre point dans les
autres; je veux parler du soulagement et même du plaisir momentanés que faction de se gratter procure au malade. Le
moment de la journée où cette démangeaison devient plus vive, la circonstance de son accroissement par la chaleur du
lit, du foyer ou de l'atmosphère, sont, comme fobserve Wichmann, autant de particularités propres à déceler la
nature de l'affection. 11 semble effectivement, dit cet écrivain, que la chaleur produit alors sur les sarcoptes l'influence
qu'elle a sur tous les insectes, c'est-à-dire qu'elle les excite, les tire de leur engourdis-sement, par où s'explique le
surcroît d'incommodité dont nous parlons. La marche naturelle et la forme des pustules de la gale, mais surtout sa
propriété contagieuse, sont d'autres conditions à l'aide desquelles il devient impossible de la méconnoître.
DCCCXXXIl. Ces notions sur le diagnostic de la psoride pustuleuse |)euvent servir, en quelque sorte, de type pour
estimer des modifications dont elle est susceptible, et établir les signes distinctiis des autres espèces. Qu'au lieu de ces
boutons miliaircs, cristallins, trè.s-rapprochés, qui constitue!)t la gale vulgairement dite canine, il se prc.sente de gro.s
boutons purulens, discrets, formant par leur dessiccation des écailles plus ou moins épaisses, cette différence dans
la forme ne sauroit induire en erreur sur la nature de la maladie qu'indique suffisamment la réunion des autres
caractères; leur absence est comme une démonstration négative pour les autres espèces.
DCCCXXXlll. La psoride crustacée, ou psoriasie, se distingue des précédentes non-seulement par la forme de l'crupdon
elle-même, dont chaque bouton offre ordinairement une petite aréole violette; mais leur siège n'est presque jamais
celui de la psoride pustuleuse, puisque c'est sur les membres inférieurs et supérieurs, particulièrement sur leur face
externe qu'on les rencontre. Une dissemblance |)lus saillante encore, est que le prurit est très-rare dans la psoride crustacée,
et qu'elle ne se transmet point par contagion. M. Devilliers, élève de l'hôpital Saint-Louis, a recueilli sous mes .
yeux l'observation suivante, qui sufHroità elle seule pour donner le diagnostic exnot, et confirme pleinement ce que je'
viens de dire de la psoride crustacée.Le nommé Bonito, âgé de vingt ans, d'un tempérament sanguin, d'une constitution
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robuste, présente derrière les épaules des boutons papuleux, tantôt isolés, tantôt unis par les bords, légèrement
saillants, recouverts d'écaillés très-petites, et tombant sous forme de poussière grisâtre. Démangeaison à |)cu près
nulle. Le début fut l'apparition de petits boutons rouges disséminés sur les coudes, les genoux, d'où ils s'étendirent
aux bras et aux cuisses, pour bientôt envahir le tronc, le cou, le derrière des oreilles; la figure en a été constamment
exempte. En se réunissant, ces boutons formèrent des plaques diversement étendues; de nouveaux se manifestent de
loin à loin, suivent la même marche que les précédens : et c'est ainsi que la maladie s'entretient depuis son origine,
dont la cause demeure tout-à-fàit ignorée.
DCCCXXXV. A leur invasion irrégulière, à l'aspect des aspérités blanchâtres, pleines, sèches, analogues à ce qui
se montre dans le phénomène nommé chair de poule; mais en considérant surtout les régions de la peau, les épaules,
les lombes, etc., où ils se manifestent, on doit reconnoitre assez facilement les boutons de la psoride papuleuse. Il
sera impossible de conserver le moindre doute à son égard, après avoir constaté la démangeaison vive et continue
dont elle est accompagnée. J'ai connu un académicien également distingué par la finesse de son esprit et la noblesse de
son caractère, qui passa les dernières années de sa vie dans les tortures inouies d'un prurigo formicans, dont la
démangeaison lui laissoit à peine quelques instans de calme, et s'cxaspéroit, au contraire, très-souvent par les manoeuvres
du domestique, incessamment occupé à frotter cet infortuné malade.
DCCCXXXVl. H seroit superflu de nous arrêter sur la seconde variété de psoride papuleuse, celle qui constitue la
phthiriasis ou maladie pédiculaire. Quelle que soit son origine, dont nous aurons à nous occuper plus loin, il est évident
que la seule présence de l'insecte particulier qui forme la cause immédiate de la maladie, suffit dans toutes les
circonstances pour déceler sa nature et son caractère.
DCCCXXXVII. En continuant le parallèle des psorides, il deviendra de plus en plus aisé de préciser ce que chacune
a de spécial; dès-lors on n'assimilera plus, comme cela arrivoit fréquemment autrefois, toutes les éruptions anomales
à la psoride pustuleuse. Il est certain que celle-ci disparoit quelquefois assez brusquement par l'effet du frisson
fébrile, ou à la suite de quelqu'irritation développée dans l'intérieur de feconomie. Ce phénomène ne tiendroit-il pas
à ce qu'une température basse venant à s'établir soudainement dans la surface cutanée, asphyxie les sarcoptes qui
recouvrent le mouvement et la vie dès que la chaleur périphérique et les autres conditions favorables à leur existence
sont rétablies? Telle étoit l'opinion de Morgagni, et ce que j'ai vu arriver dans plusieurs cas de prurigo pedicularis ^ où
les insectes désertoient les corps dès que se manifestoit le froid de l'agonie, justifie, jusqu'à un certain point, cette
conjecture. On voit du reste qu'elle se concilie parfaitement avec le résultat de la disposition contraire, c'est-à-dire
avec le .surcroît d'activité que le sarcopte reçoit de l'impression du calorique. Uue circonstance qui doit singulièrement
éclaireir le diagnostic en pareil cas, c'est que la psoride pustuleuse reparoit toujours sur les parties où elle existoit
d'abord, et qui sont, comme on sait, les lieux d'élection; tandis que les éruptions diverses auxquelles on attribue
quelquefois un caractère critique, n'ont jamais une station déterminée, et varient, sous ce rapport, autant que sous
celui de leur étendue et de leur figure.
DCCCXXXVIIl. Parmi les accidens qui peuvent compliquer et par conséquent obsciu-cir le diagnostic des psorides,
je noterai les dépôts purulens, les furoncles et autres phénomènes inflammatoires dont le développement
s'allie assez souvent à la maladie éruptive. Bien qu'ils n'aient rien de commun au fond avec la cause essentielle de la
psoride pustuleuse, où on les observe la plupart du temps, leur appréciation peut être extrêmement utile pour établir
le diagnostic exact de la maladie. Cette espèce d'accident ne diffère pas au reste de ce qui se voit toutes les fois qu'une
suppuration plus ou moins ancienne, trop brusquement supprimée, donne naissance à quelque autre travail morbide
que la nature suscite à propos pour prévenir l'irritation des organes internes, comme nous allons le voir, en traitant
du pronostic des psorides. Mais déjà nous voyons par ce qui précède qxie la manifestation des accidens dont je m'occupe
exige toujours l'existence préalable d'une suppuration qu'on ne rencontre véritablement que dans la psoride pustuleuse;
ce qui est un moyen de la distinguer non-seulement do toutes les éruptions cutanées anomales, mais encore de celles
qui ont avec elle le plus d'analogie.
ARTICLE n i .
Du pronostic des Psorides.
DCCCXXXIX. Ce n'est qu'au sein des asiles ouverts à l'infortune et à la douleur par la piété et la philanthropie
qu'on peut rencontrer ces maladies en assez grand nombre, pour être à même d'apprécier exactement leur gravité
respective. La pratique isolée ne sauroit fournir à cet égard que des données imparfaites et absolument incertaines
Il ne pouvoit donc pas y avoir de situation plus Givorable à cet ordre do recherches que celle où je me trouve depuis
tant d'années à l'hôpital Saint-Louis, ce vaste réceptacle de tous les genres de maladies cutanées qui affluent dans la
capitale île tous les coins de l'Europe. C'est là que j'ai pu soumettre à une révision sévère les jugemens divers portés
sur le danger des psorides, et rectifier le long tissu d'erreurs ou de chimères enfantées à cet égard par famour du
merveilleux et par fesprit de système. On ne citeroit pas peut-être, en effet, une seule maladie dont on n'ait attribué
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