^.Go MA L A D I E S DE LA PEAU.
lie si Ijonne heure dans le foetus qui %'ient de voir le jour que, tout en reconnoissant la part que les influences
¡)hysiqucs peuveut avoir plus tard sur cette disposition, il n'est pas permis de nier qu'elle ne t ienne à une circonstance
native.
DCCCC. Ou remarque quelques particularite's analogues dans les animaux. Ainsi l'éléphant, qui avoit besoin
d'une base capable de soutenir sans comprimer les nerfs et les vaisseaux le poids enorme de sa masse, offre en
conséquence la plante des pieds protégée par une couche abondante de graisse outre l'épaisseur très-remarquable de
la peau dans cette partie.
DCCCCL On connoît l'aspect particulier et la modiRcation relative de structure existans dans quelques autres
parties de la peau humaine. En général la partie interne des membres est d'un tissu plus mou, moins serre, et dès
lors moins résistant que la partie externe. Ce caractère, qui d'ailleurs se montre dans tous les points que les vètemens
soustraient à l'action de la lumière, est encore plus marqué aux creux des aisselles, aux plis des aines et dans quelques
autres points naturellement protégés et plus éloignés en quelque sorte de la pér iphér ie. La peau du crâne diiTere
notablement de celle de la face; et cette difiéreiice, nécessitée par la diversité de fonctions, est également évidente
dans les conditions pathologiques. Bichat a donc fait remarquer très-judicieusement rinQuence que le tissu plus lâche,
plus épanoui, plus riche en vaisseaux sanguins des tégumens du visage, exerce sur le développement des affections,
et notamment des érysipèles de cette partie. L'un de nous, par sa position dans un vaste hôpital où alïluent tous les
genres de maladies cutanées, a été souvent à même de reconnoitre aussi ce rapport de la texture particulière de la
peau avec la fréquence et le caractère des éruptions qui s'y manifestent.
DCCCCn. On ne trouve nulle part l'enveloppe tégumentaire externe modifiée d'une manière plus sensible que
sm- les points qui , tels que les lèvres, la marge de l'anus, la surface du gland, etc., établissent ses limites relativement
aux membranes muqueuses, ou à l'enveloppe tégumentaire interne. Une ligne rougeàtre, l'amincissement de
son épaisseur, l'enlèvement plus facile de l'épiderme, tels sont les caractères qui distinguent essentiellement sa texture
dans ces parties. Également justiiiée par les phénomènes physiologiques et par les données de la pathologie, cette
différence n e détruit pas néanmoins l'analogie manifeste des deux surfaces. A défaut de la démonstration anatomique,
des faits nombreux et irrécusables d'un autre ordre attestcroient suffisamment cette identité de structure.
DCCCCni. Quelques anatomistes rejettent à la vérité le sentiment de Licbcrkuhn sur l'existence de l'épiderme
dans la muqueuse gastro-intestinale, mais son évidence dans l'oesophage, et la terminaison par un bord frangé de cet
epithcUwn au cardia, dénotent à la fois sa présence et les modificat ions qu'il subit dans l'étendue de la peau interne.
La continuité des deux surfaces ne paroit pas moins incontestable, et si, quelques caractères de dissemblance semblent
exiger certaines restrictions à cet égard, comme pour la .conjonctive à son passage devant la coi'née, pour le prolongement
de la membrane muqueuse du vagin à l'intérieur de la matrice, suivant les observations de JIM. Chaussier et
Ribes, il est au moins certain que partout ailleurs dans leurs points de jonction les deux membranes, interne et
externe, sont absolument confondues. L'observation du polype à bras qu'on retourne à volonté et qui , dans cet état
où ses deux surfaces deviennent alternativement internes ou externes, continue à vivre sans altération notable dans
l'activité de ses fonctions ordinaires, fournit une nouvelle preuve de l'analogie dont il s'agit, alors même qu'on
laisseroit indécise la question de l'existence d'une membrane muqueuse et môme d'une véritable peau chez cet
animal.
DCCCCIV. Mais il est possible d'arriver à la même conclusion sans en chercher les preuves hors de l'espèce
humaine. On a vu, par exemple, les membranes muqueuses soumises par une circonstance accidentelle quelconque
à faction de l'air atmosphérique, ainsi que cela arrive quelquefois dans les chutes du rectum, et dans les anus contre
n a t u r e , etc., prendre, et même assez p romptement , toutes les apparences de la peau. Celle-ci, soustraite au contraire
pendant un temps plus ou moins long à l'impression des agens extérieurs, ne tarde pas à revêtir l'aspect et jusqu' à un
certain point le rôl e des membranes muqueuses. C'est ce qui se voit dans les plis existans aux articulations des membres
lorsque ceux-ci se ti'ouvent depuis quelque temps dans un état de ilexion continue. Des faits très-intéressans de ce
genre ont été cités par Hébréard, qui d'ailleurs a fait ressortir avec une nouvelle évidence la conformité des deux
organes par des rapprochemens physiologiques et pathologicpies multipliés. Nous avons vu nous-mêmes à l'hôpital
Saint-Louis un polype muqueux du vagin ayant plus de vingt ans d'existence, dont la part i e qui faisoit saillie au dehors
ofi'roit tous les caractères de l'enveloppe cutanée.
DCCCCV. L'étude assidue des maladies si variées dont elle est le siège nous a fourni de fréquentes occasions de
constater l'intimité des rapports existans entre les deux surfaces. Ainsi, nous avons signalé, les premiers, les traces
d e l'inflammation herpétique dans la muqueuse gastro-intestinale. Qui ne sait aujourd'hui C|ue les boutons de la
variole peuvent tout aussi facilement se développer à l'intérieur des membranes muqueuses gaslriijue et pulmonaire
que sur la peau? Il en est de même de ces irritations érithémateuses que l'on rencontre presque aussi fréquemment
sur l'une que sur l'autre surface; et, quant à leur mode chronique, nous avons, dans le cours de cet ouvrage, cité
divers exemples, particulièrement celui de la dartre sfjuammeuse que l'on rencontre assez communément à l'intérieur
des fosses nasales, de la bouche, etc., et c|ui sert à justifier encore l'identité précédemment établie. Une autre source
d e preuves à cet égard, mais ([ue nous nous contenterons de signfiler pour le moment aux observateurs physiologistes,
M A L A D I E S DE LA PEAU. aCl
xi'est celle des affections auxquelles la peau et les membranes muqueuses se trouvent soumises par l'influence triuic
sympathie réciproque.
DCCCCVL C'est sur ces faits et beaucoup d autres observations plus ou moins analogues que se sont établis les
deux sentimens contraires relatifs à la génération ou à l'ordre de développement des deux divisions de l'enveloppe
tégumentaire. Autant qu'il est permi s de se prononcer sur une question aussi diflicile que celle des formations organiques,
nous pensons avec la plupart des anatomistes de nos jours, et particulièrement avec M. F. Mcckcl, que les
membranes muqueuses ont la priorité d'origine, et qu'ensuite par une progression successive du centre à la périp
h é r i e , leur tissu s'avance et se modifie pour constituer l'enveloppe cxitanée. Il est constant que, jusqu'à la sixième
semaine de la vie foetale, les ouvertures naturelles par lesquelles s'établissent les communications des deux organes
n'existent pas encore; le canal intestinal est déjà déroulé que la peau n'est pas même distincte. La formation de ces
ouvertures a r r ive- t -el le, comme paroit l'admettre l'anatomiste que nous venons de citer, pai- ime déchirure lente et
graduée du tissu des deux membranes; ou bien celui de l'interne ne fait-il que se replier, pour ainsi dire, sur luimême
sans altération dans la continuité des mailles qui le composent, toujours est-il certain que la progression dtdéveloppement
de la surface au centre n'est plus soutenable.
DCCCCVII. Les changemens que la peau subit depuis l'instant où elle commence à prendre un caractère marqué
dans l'embryon méri tent d'être appréciés. D'abord incolore, mince et transparente, elle acquiert vers le milieu de la
grossesse un degré sensible de consistance et se recouvre bientôt d'une substance grasse et caséiforme qui , suivant
l'âge du foetus, ou le terme de l'accouchement, se montre plus ou moins abondante à sa naissance. A cette époque,
molle, rougeàtre, tomenteuse çt par conséquent assez analogue aux membranes mucjueuses, la peau pi'end progrès'
sivement une densité de mieux en mieiLV appropriée au milieu dans lequel l'individu est appelé à vivre et aux fonctions
qui plus tar d lui seront départies. C'est par ces gradations qu'elle arrive chez l'adulte à l'état de composition qu'on lui
connoît et dont nous allons maintenant exposer les caractères.
CHAPITRE DEUXIEME.
DE LA STRUCTURE DE LA PEAU.
DCCCCVIII. Cette membrane est composée de deux feuillets; l'un intérieur et constituant le tissu essentiel,
fondamental de la peau, a reçu le nom de corium ou derme; l'autre, visible extérieurement, porte celui iXcpiderme.
Comme le mot seul l'indique, celui-ci forme une sorte de gaine au premier et le suit dans tous ses enfoncemens ou
plicatures. Ses formes var ient d'une manière très-sensible non seulement dans la série animale, mais sur les divers
points de sa surface chez le même être. Qui n'a pas été frappé de cette différence, en comparant l'épiderme mince,
souple, uni des batraciens, aux écailles épaisses, sèches et rugueuses qu'il présente chez les jwissons; et dans l'homme
lui-même, tout le monde ne connoît-il pas la difference existante cîiti'e l'épiderme du talon ou du gros orteil, par
exemple, et celui de la face dorsale de ces parties? Quoique l'épiderme conserve généralement une épaisseur assez uniforme
dans toute son étendue, il y a néanmoins quelques exceptions Aicilement appréciables à cet égard. Ainsi, les
points de sa surface qui se trouvent exposés à une pression plus considérable de la par t des agens extérieurs sont constamment
protégés par un épiderme d'une épaisseur et d'une densité plus considérables. Cette disposition se montre à
la plant e des pieds dans l'espèce humaine; elle devient plus saillante encore et a reçu en conséquence le nom de callosités
chez quelques anim¿uix, tels que les singes de l'ancien continent^ les chameaux et les dromadaires, où elles sont diversement
situées. Telle est sous ce r appor t chez l'homme la disparité d'épaisseur que l'épiderme présente dans les parties
indiquées et le reste du corps, que c'est uniquement là que sa formation par couches superposées est véritablement
appréciable; partout ailleurs une lame unique paroît constituer sa texture. Cette circonstance peut expliquer dès lors,
conune on le sait, le peu d'action des vésicatoires et autres épispastiques sur cette région du corps, nonobstant l'innombrable
quantité de nerfs dont elle est pourvue.
DCCCCIX.. L'épiderme suit nécessairement toutes les modifications qu'éprouve le feuillet profond de la peau
auquel il adhère étroitement par sa face interne. On le trouve sillonné par des rides plus ou moins apparentes, dis-
])Osées en général assez irrégulièrement, excepté à l'extrémité pulpeuse des doigts, où elles décrivent des courbes
concentriques. Une circonstance qui ne doit pas être négligée, c'est l'espèce d'antagonisme, si l'on peut le nommer
a i n s i , qu'on observe entre le développement de l'épiderme et celui des autres élémensprotecteurs del à peau, les poils,
par exemple. Il est constant en effet que là où ces derniers abondent , l'autre présente une ténuité remarquable; et réciproquement
où les premiers, les poils, les plumes, etc., sont plus ou moins en défaut, l'épiderme acquiert toujours un
degré notable d'épaisseur et de consistance. Cette particularité est déjà appréciable chez l'homme; mais elle devient
bien plus marquée quand on prend dans l'échelle animale deux termes un peu éloignés de comparaison, comme les
petits rongeurs et les pachydermes. Dans quelques autres animaux les poils et la couche épidermiquc se combinent
pour former un épiderme tout-à-fait particulier, comme il arrive chez les cétacés; mais partout on admire cette
facilité qu'a la nature d'étendre et de varier ses effets sans vain étalage, ni stérile multiplication de moyens.