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Deuxième ohscrpation. — II convient de rapporter à l'Icthyosc comte, lacciclent bizarre, cfwi est arrivé
Catherine Chcveville, âgée de soixante-dix ans, née à Meluu, et qui a long-temps habité le faubourg St.-Antoine,
à Paris. Cette vieille femme n'avoit jamais eu aucune maladie, pas mi'me la petite vérole, durant le cours de sa
vie ; mais elle étoit d'une maigreur extrême. La peau de son visage étoit très-colorée; celle de son corps étoit
terreuse, et sèche à l'excès ; les veines superficielles étoient très-dilatées, et le sang paroissoit n'y circuler qu'avec
lenteur. Cette femme portoit depuis long-temps à la partie inferieiue de l'extrémité interne de la clavicule une
tumeur de la grosseur d'une petite poii'c. Cette lumeur qui n'éloit dans son principe C|ue comme la tête d'une
épingle avoit acquis ce degi'é d'accroisscmcnt dans plusieurs années ; la tumeur étoit environnée à sa base par une
subslunco cornée qui formoit une espèce de coquillo. Son sommet étoit partagé en deux portions recouvertes d'un
prolongement de la peau, sous lequel on distinguoit les vaisseaux sanguins. Un chirurgien la fit beaucoup souffrir,
en essayant de lui arracher cette tumeur. Il paroit qu'une partie resta implantée dans les tégumens, et qu'elle
donna lieu à un prolongement qui s'accrut beaucoup dans l'espace d'une année. Loi-sque j'eus occasion de voir cette
femme , clic portoit ii la pai'tie antérieure et supérieure de la poiti-ine dans le voisinage de la fourchette du sternum
une production cornée de la longueur de c[uatreà cinq pouces au moins, qui avoit quelque analogie avecime gousse
de haricot. Cette production tcnoit à la peau par un pédicule très-mince, et son poids déterminoit des mouvemens
de tournoiement qui étoient douloureux pour la malade ; quant à l'excroissance cornée, elle étoit absolument insensible
; on la touchoit et on la manioit impunément l'extrémité inférieure néanmoins lui faisoit éprouver des
picottemens qu'elle comparoit à ceux que produiroit une piqûre d'épingle. Catherine Cheveville étoit très-superstitieuse
elle avoit la feniie persuasion que cette excroissance étoit im ver animé qui la rongeoit; elle mourut dans
la cachexie scorbutique.
Troisième ohseri'aiion. — Yoici un iait qui m'a été communiqué par un habile chirurgien de province. Ce
chirurgien m'a envoyé dans le temps deux morceaux considérables d'xme production cornée , lesquels avoient été
recueillis sur la personne de M. Crayon, prêtre, ci-devant curé de Ville-Neuve, aujourd'hui retiré dans rh<3pitai
d'Alby, département du Tarn. Cet ecclesiastique est âgé de soixante-seize ans. Son tempérament est sanguin; sa
peau remplit très-bien ses fondions, elle transpire habituellement beaucoup et avec facilité. Il est né de parens
sains et robustes. Depuis près de quarante-cinq ans, il porte une assez longue corne sur la partie moyenne de
la première pièce du sternum. Ce fut vers l'âge de trente ans, que cette végétation singulière commença à se
manifester ; elle s'accmt progressivement dans ses diverses dimensions, se contoiu-na ensuite comme la corne d'un
. bélier, et dans l'espace de cinq années, elle avoit déjà acquis neuf pouces de longuenr sur deux de circonférence
qu'elle avoit à sa base. M. Crayon éprouva dans la suite un accident ; étant monté sur ime échelle et s'occupant
un jour h tailler une vigne qui rampoit au bord d'une mui-aille, il fit une chûte ; en tombant, sa corne s'accrocha
à l'un des échelons supérieurs, et fut soudainement arrachée; il n'y eut presque pas d'hémorragie. On crut d'abord
que cette excroissance ne reparoîtroit plus ; mais elle végéta de rechcf, en sorte qu'au bout du huitième mois, elle
avoit déjà cinq pouces. M. Crayon s'avisa un jour de la couper à deux pouces environ de sa base. Il a répété
plusieurs fois la même opération. Cette corne appartient exclusivement aux tégumens ; car la peau n'est point
adhérente â l'os, elle conserve sa mobilité naturelle ; je pourrois alléguer d'autres exemples. J'ai vu à l'hôpital Saint-
Louis uue corne cylindricjue et recourbée, laquelle était venue à l'occiput d'un malheureux vieillard. On m'en a
fait également parvenir une qui s'étoit développée à la tubérosité de l'ischioii.
DLXXVII. .T'ai publié les faits majeurs qui concernent l'Icthyosc cornée; qu'on les rapproche maintenant
de ceiix que j'ai précédemment rapportés sur l'Icthyose nacrée; qu'on examine avec soin et qu'on compare
les figures qui représentent ces deux espèces, et l'on sera persuadé sans peine qu'elles appartiennent absolument
au même genre. Que deviennent actuellement les conjectures cliimériques auxquelles on s'est livi-é, pour expliquer
l'origine de cette singulière altération de l'épiderme? je reviendrai sur ce point, dans la seconde partie de cette
dissertation.
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