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CCCCLXXIV. Il paroît que dans le trailemeiit des Lèpres, le froid entrave puissamment In inardie et
l'aclivité des efforts de la nature; aussi a-t-on constaté, par l'cxp^rience, que les remèdes qu'on adininislre
pendant l'hiver, sont plus nuisibles qu'utiles; qu'ils suscitent le dévoiement, la foi blesse, les spasmes, sans
jamais apporter le moindre soulagement.
CCCCLXXV. Ce qui déconcerte le médecin dans le traitement des maladies lépreuses, c'est qu'il survient
par fois d'auU-es maladies qui peuvent êti-e considérées comme des épipliénomènes; telles sont les fièvres, inilammatoii
es -et adynamiques, les petites véroles, etc. Dans ce cas, il est urgent de remédier aux symptômes de
la maladie aiguë; on a recours sans délai aux anti-plilogistiques; c'est le précepte que donnent les praticiens
exercés. Si la fièvre est d'un genre très-putride, on a recours aux anti-septiques les plus forts. On met c\ contribution
Técorce du Pérou. Il n'est pas rare de voir les mouvemens fébriles être très-favorables à la curation
de la maladie lépreuse. Il n'en est pas de même, lorsque la Lèpre se complique avec d'autres maladies chroniques,
particulièrement avec des maladies qui atteignent pins ou moins pi-ofondément les glandes et le système lymphatique;
ces affections se fortifient alors l'une par i'auU-e , et les lépreux sont dans un danger imminent.
A R T I C L E VIII.
Du traitement interne employé pour la guérison des Lèpi
jLii;
CCCCLXXYI. On est dans un gi-and embarras, quand on veut déterminer quels sont les remèdes intérieurs
qui conviennent dans le traitement des diverses Lèpres : on n'a rien acquis de positif sur ce point. Il faudroit, dit
Pallas, que ces maladies fussent observées pendant plusieurs années, par des médecins instruits; alors on parviendroit
peut-être à anêter lem-s funestes progrès et à les détruire entièrement : je l'ai déjà fait remarquer.
La Lèpre semble ne s'èti-e développée, jusqu'à ce jour, que sur le sol de l'empyrisme. Aussi l'a-t-on traitée sans
méthode et sans discernement. Pom- trouver, en conséquence, les rcmèdes les plus propres à combattre ses
accidens, n'est-il pas utile de bien noter les cas dans lesquels la nature a agi salutairement, et a triomphé de
l'intensité du mal? 11 faut connoître les procédés curatifs que le hasard a fournis ; car c'est ainsi que la plupart des
remèdes ont été découverts, et qu'on est parvenu h perfectionner le traitement de presque toutes les maladies.
CCCCLXXVII. En attendant que l'expérience ait mieux prononcé, je me bornerai à citer quelques faits.
ÎSous avons déjà parlé plusieurs fois du nommé Fourrât, chez lequel la Lèpre s'étoit portée au plus haut degi-é
d'intensité. Lorsqu'il arriva de l'Egypte en Fi-ance, il étoit dans im état de maigreur difficile à décrij-e ; ses
yeux étoient caves et plombés; ses lèvres gi-osses et livides; ses fosses nasales gonllées ; son visage étoit
sillonné par des rides hideuses; son Jialeine étoit empestée; ses mains et ses pieds engourdis et presqu'insensibles;
sur ses genoux et sur ses coudes, s'élevoient des croûtes tuberculeuses qui rccouvroient des ulcères
affreiLv; le malade étoit dévoré de mélancolie : tel étoit son état, lorsque M. Larrey entreprit de le traiter.
On lui administra d'abord quelques légers laxatifs; il fut mis ensuite à l'usage d'une décoction de racine de
bardane et de patience. Le matin, Fourrât prenoit du vin de quinquina à des doses plus ou moins fortes;
le soir, on lui adininistroit une petite dose de sirop de salsepareille pour provoquer la transpiration, et pour
appaiscr les douleurs de la nuit, le camphre et l'opium trouvoient leur emploi. Par fois, on substituoit à ces
moyens , quelques sudorifiques plus actifs, comme, par exemple, le soufre doré d'antimoine, etc. On donnoit
des extraits amers; celui de fumeterre étoit préféré. Quant aux ulcères, ou avoit d'abord provoqué la chûte
des croûtes par des applications émollientes, et les pansemcns se faisoient avec la pommade anodine. Quelque
temps après , M. Larrey eut besoin de recourir au cautère actuel, pour rétablir la sensibilité dans les parties
qui envn-onnoient les ulcères lépreux, etc. C'est par ces moyens simples que Fourrât parvint, dans la suite, àxme
mtière guérison. Depuis ce temps, les cicatrices dont tout son corps est parsemé, sont restées fermes et solides.
CCCCLXXVIII. Au surplus, dans une maUère aussi nouvelle et aussi peu avancée que la Lèpre, chaque
médecin a, pour ainsi dire , proposé sa recette, sa plante ou son remède de préférence. Schilling pi-éconiso
la décoction d'un bois et d'une racine qu'on appelle Tondin, et que l'on dit appartenir au genre des Paulinia :
c'est un arbrisseau qui croît dans les marais de la colonie de Surinam, et qui est remarquable par son amertume
et son astrmgence. En Crimée, on cherche à guérir cette maladie avec la décoction d'une espèce de raisin de
luerianapnsap/ijila), qm vient dans ce pays, ainsi que sur les bords du Jaik, où il a été employé de même,
mais sans succès.
CCCCLXXIX. Toutes les plantes toniques et sudorifiques ont été citées avec éloge. On a loué avec exagération
la saponaire, la salsepareille, la contrayci-va, la serpcnlaire de Virginie, la zédoaire, etc. Odliélius
recommande le ledum palustre; Calliscn le trèllc d'eau et l'écorce d'orme pyramidal ; Crichton, médecin de
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M A L A D I E S DE LA PEAU. i5r
l'hôpital de Westminster, a procédé à quelques essais sur les effets de la douce-amère, et il assure avoir obtenu les
plus grands succès de l'administration de cette plante. M. de Pons a vu guérir à Saint-Domingue, une maladie
qui avoit tous les caractères de la Lèpre. Le malade avoit le corps couvert de pustules, et les phalanges de
ses doigts rongées; les ongles s'en détachoient déjà. Un régime convenable et un sirop comjiosé de sassal'i-as,
de gayac, de salsepareille et de scjuine, firent disparoître tous ces hideux symptômes. Dans l'espace de deux
mois, le malade recouvra une santé pariaite. Cette cure honorable fut dirigée par M. llaiflèr, médecin Irançais.
CCCCLXXX. Le docteur j\r!ingor, qui s'est beaucoup occupé de la Radesyge ou Lèpre du Nord, donnoit
six grains d'extrait de ciguc à prendi-e deux fois par jom-; il soumettoit en même temps les malades à uno
diète très-rigoureuse. JJruce, dans son voyage en Nubie et en Abyssinie, fait mention des expériences cpi'il
a inutilement tentées avec l'exti-ait de ciguë préparé à la manière de Stork. .11 rapporte lui-même qu'il eut
occasion de voir dans une maison voisine de la sienne, un homme affecté de l'Éléphantiasis, et qu'il fut à
même de l'observer consécutivement pendant deux années; c'est alors qu'il fit l'essai de ce remède, soit extérieurement,
soit intérieurement, d'après l'indication du célèbre Kussel, médecin d'Alep , sans procurer le
moindre soulagement au malade : les expériences furent faites dans l'Abyssinie. Bruce , pendant son séjour à
Goiidar, avoit obtenu du roi et du raz Michael, la permission de procéder à tous les essais qu'il jugeroit convenables
afin d'éclaircir ce point intéressant de médecine-pratique.
CCCCLXXXI. Pour combattre une maladie aussi terrible que la Lèpre, il est probable néanmoins qu'on
pourroit tirer quelque parti des plantes vénéneuses, si on étoit fixé sur leur mode d'administration. Le fait suivant
prouve que leur action perturbatrice seroit d'une grande utilité. M. de Stc.-Croix a ouï dii-e dans l'Inde
qu'un malheureux lépreux souffroit tant, qu'il avoit résolu de se détruire. Il eut recours, pour y parvenir,
aux branches d'une espèce de tbitimale, dont le suc laiteux et corrosif passe dans le pays pour un poison
très-violent; au Heu de trouver la mort, il éprouva une commotion extraordinaire qui fît disparoiti-e la Lèpre.
CCCCLXXXII. Depuis fort long-temps on avoit vanté les effets de la teinture de cantharides pour le
li-aitement de la Lèpre; mais M. llobert "VVillan, qui l'a combinée avec l'écorce du Pérou, prétend n'en
avoir retiré aucun effet avantageux. N'est-ce pas ici le cas de parler d'un médicament dont-Fadministration
inspiroit d'abord do vives craintes, et que les médecins de l'Inde ne craignoient pas d'opposer aux progi-ès
dévastateurs de l'Éléphantiasis : c'est l'arseniate de potasse qui forme la base de la solution si connue de Fowler?
Les docteurs John lledman Coxe et Thomas Gii-dlastone affu-ment avoir opéré des cures merveilleuses par
cette préparation : la dose est de dix ou douze gouttes qu'on augmente successivement, et qu'on administre
dans un véhicule quelconque. Quelques praticiens ont proposé l'arseniate de soude qu'on fait dissoudre
dans quelque eau spiritueusc , comme l'eau de fenouil, de menthe, etc. Je ne puis dire à quel point ce
remède a pu être favorable. J'ignore sur quels faits s'ajjpuyent de semblables observations.
CCCCLXXXHI. On ne s'est pas contenté de recourir aux sels neutres arsenicaux. On a osé introduire
rarsenic même dans les diverses recettes qu'on a proposées pour combattre un mal aussi redoutable que Ja
Lèpre. Je crois devoir consigner ici l'exti-ait d'un Mémoire Persan, rédigé par le fils du médecin de Thamas-
Kouli-Kan. 11 avoit accompagné ce célèbre conquérant dans son expédition fameuse pour l'Indoustan ; et,
il raconte lui-même comment ce secret lui fut révélé. Ce fut, dit-il, en 1783, qu'il reçut la visite du sage
Maulavi-Mir-Muhamet Hussai'n, homme très-versé dans toutes les connoissances utiles, lequel étoit accompagné
de M. Richard Jolmson , et se rendoit de Lac'linan à Calcuta. 11 se fit un plaisir de communiquer à
l'auteur du mémoire que je cite, une ancienne foi mule des médecins Hindous, qu'il disoit n'être pas seulement
utile pour combattre le Jud'ham ou Éléphantiasis, mais encore toutes les maladies lymphatiques du même
genre. La préparation s'elfcctue ainsi qu'il suit. On prend un tolà {loSgrains) d'arsenic blanc nouvellement
préparé, et six ibis autant de poivre noir; on les triture et pulvérise ensemble pendant quati-e jours consécutifs
dans un mortier de fer ; on les réduit ensuite en poucbe impalpable dans un mortier de pierre, avec un
pilon de même matière, et on ajoute une quantité suffisante d'eau pure pour composer des pilules de la
grosseur d'un grain d'ivraie ou d'un petit pois : on en prend une soir et matin , dans une feuille de bétel
ou dans de l'eau froide. Le fils du médecin de Thamas-Kouli-Kan, conformément aux conseils de son savant
et respectable ami Maulavi-Mir-Muhamct Hussai'n, l'administra à plusieurs malades très-dangereusement attemts.
Dieu est témoin , ajoute-t-il, qu'ils se trouvèrent mieux, qu'ils furent complètement guéris, et qu'ils sont maintenant
vivans , à l'exception d'un ou deux qui moururent par d'autres accidens. On peut consulter les faits
qu'il rapporte au sujet de plusieurs individus qui ont été rapidement guéris du Jud'ham, par l'emploi d'un
toi remède. Ext rails of Asiatic Researches, or Transactions of the society, institutes in Bengal, sor
inquiring into th(^ history and aritiquitics, the arts , sciences and littérature of Asia.
CCCCLXXXIV. Quelquefois, les moyens les plus doux sont plus elïïcaces que les remèdes énergiques
dont nous venons de parler. A l'Ile de France, un individu attaqué de la Lèpre, ayant oui dire que file
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