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professeur Sabatter^ et nous l'employâmes de la manière suivante : on formoitj avec cette poudi-e et le
cérat de Gallen, une pâte dont on recouvi-oit la partie ulcérée. Le lendemain , il sui-venoit de la rougeur
et du gonflement dans les parties environnantes. On conibattoit cette irritation accidentelle par les émoliiens.
L'escarre tomboit, et l'Ulcère paroissoit être de meilleure nature. Trois ou quatre jours après, on faisoit une
nouvelle application. Peu-à-peu, l'Ulcère diminua d'étendue, et son état s'améliora. Dans dix-sept jours,
la piérison fut complette : il n'y avoit plus, ni dureté, ni douleur. La cicatrice i-essembloit aux cicatrices
ordinaires. Le malade sortit de l'hôpital 'après un mois et demi de traitement, parfaitement déli\Té de son
Ulcèitî carcinoraateux.
Cinquième observation. — Henri-Christophe Torbicr, ciseleur, âgé de cinquante-quatre ans , d'un tempérament
sanguin, et d'une assez bonne constitution , s'appcrçut qu'il se fbmioit un petit bouton à la partie
latérale moyenne et droite du nez. Il n'y ressentoit aucune douleur. H s'y ibrmoit, de temps en temps,
une petite croûte qui se desséclioit et lomboit au moindre frottement. Au bout de sept années, ce mal fit
des progrès inquiétans. Il sur\nnt une ulcération qui occupa rapidement tout le côté du nez. Sa surface présentoit
uue infinité de petites végétations bourgeonneuses. On y appliqua successivement de l'eau forte ,
d'autres caustiques liquides , et divers onguens, etc. Ces moyens ne purent arrêter les progrès de l'ulcération
, q\ii avoit déjà envalii Ja moitié de la paupière supérieure, lorsque le malade se rendit i\ l'iiôpilal
St.-Louis, plutôt poin* éviter h ses enfans le désagrément de le voir moiu-ir , que pour y trouver sa guérison.
On le traita par la poudre de Rousselot, ainsi cpie le précédent. On combattit aussi l'infiainmation qui survint,
par le même procédé. Au bout de cinquante jours, l'Ulcère étoit parfaitement -cicatrisé. Mais des végétations
blanchâtres étant survenues vers l'angle interne de l'oeil, et vers la caroncule, i-etardèrent quelque temps la
parfaite guérison. Je crus qu'il étoit convenable de les déti'uire par un caustique liquide , ne pouvant faire
usage de la poudre. Ces végétations se renouvelèrent à plusieurs i-eprises , en causant toujours de petits
élancemens. On a continué le même moyen ; et maintenant il n'existe plus rien de semblable. En sorte que
le malade se trouva en deux mois parfaitement délivré d'un Ulcère cai-cinomateux qui avoit duré plus de
quatre ans.
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. M A L A D 1 E s D E LA 1' E A U.
LES LÈPRES.
CONSIDERATIONS GENERALES SUR LES LÈPRES.
CCCLXXIII. Comment dissiper la confusion qui règne encore dans l'IIistoire des Lèpres! Cette maladie
tcn-ible offre Î\ l'esprit des images si repoussantes, elle épouvante à un tel point l'imagination et la pensée,
elle réveille des souvenirs si tristes et si déplorables, qu'on a souvent appliqué son nom à d'autres affections
cutanées, lorsque leurs progi-ès étoient allarmans. De-là, sont proveuues uue foule de méprises sur sou véritable
caractèi-e. Des teignes hideuses qui s'étoient étendues sur tout l'appareil tégiimcntaire, des dartres squamuieuses
très-invétérées et ti'ès-intenses, ont été fréquemment désignées sous le nom de Lèpres dans les écrits de
quelques auteurs. Avouons même, que de nos jours, malgi-é les lumières répandues dans la science par une
nosographie exacte, malgi-é les avantages procurés par la méQiode analytique, on n'a que des notions insullisantes
sur un iléau si formidable pour la nature humaine.
CCCLXXIV. Il est \Tai que la Lèpre est devenue plus rare de nos jours; et, si les méthodes manquoient
aux anciens, les cas d'observation manquent aux modernes; c'est ce f[ui fait que la phipart d'entr'eux, n'ont ])u
décrire les symptômes de la maladie avec précision et exactitude ; ils ont souvent été réduits à n'en parler
cpie sur la foi d'autrui. De-là sont nées tant de discussions futiles parmi les érudits : on s'est vainement disj>uté ,
et ou n'a répandu que de l'incertitude sur ce genre d'alfection.
CCCLXXV. Dans une matière qui a lui si puissant intérêt pour notre art, on ne sauroit s'imagiacr com])icn
les conti-overses nombreuses sur la valeur et la signification des mots ont été préjudiciables; combien sur-tout
elles ont entravé la marche progressive de nos connoissances ! Elles ont infecté la Pathologie de mille ci-i'eurs.
Ce n'est donc qu'après avoir attentivement contemplé la nature malade, qai'on peut, sans crainch-e de s'égarer,
•chercher dans les livres les caractères distinctifs de cette étonnante dégi-adation du système hunuiin. Ce procédé
est celui que j'emploie pour la publication de ce travail; et, d'après l'autorité des meilleurs écrivains <n-ccs
je n'appliquerai la dénomination de Lèpres cpi'aux maladies qu'ils ont eux-mêmes ainsi désignées.
CCCLXXVI. Un médecin, ti-ès-habile philologue, s'est donné beaucoup tie peine pour prouver que la
Lèpre décrite par le Législateur des Hébreux, n'est autre chose que l'Éléphantiasis, ou la Lèpre tuberculeuse.
11 pense que les traducteurs ont mal reudu le texte. J'avoue qu'il m'est absolument impossible d'adopter sou
opinion. Car, pourquoi les Israélites n'auroient-ils pas été également sujets à la Léprc squammeuse, puisque j'en
trouve la description la plus lîdt'le dans les Livres saints ? Les paroles du Lévitique, qui font entendre que les
tégumens ne couserveut pas le même niveau, indiquent précisément l'un des caractères les plus irappans de
cette maladie, que je me propose de décrire avec beaucoup d'exactitude. Si quelqu'autre passage de l'ouvrage
que je viens de citer, signale l'-Élépliantiasis, je prélère penser que les deux alfcctions ont pu avoir la
même patrie ; ne voyons-nous pas jourucUement plusieurs espèces de dartres se développer daus nos climats
tempérés ?
CCCLXXYII. Le but auqtiel j'aspire, n'est point, du reste, d'ofTrir à mes lecteurs un traité complet
sur la Lèpre , mais seulement de ranger dans un ordre méthodique des phénomènes dont lo plus grand
nombre ont été sous mes yeux. .Te montrerai la chaîne des rapports qui les lie à ceux déjà consignés dans
d'auh-es ouvrages. L'expérience est un trésor qui doit se grossir par la masse des faits , à mesure qu'on
les rassemble.
CCCLX XVIII. La Lèpre est la plus redoutable des maladies cutanées ; elle tient une des premières places
dans l'histoire des malheurs du genre hmnain. Nos pères la rcgardoient comme un signe non équivoque de la
vcugcanee céleste ; sou nom seul inspiroit l'horreur à tous les peuples. 11 est peu de désastres qui ayent
fait autant de vielimes ; et, ce qu'il y a de plus triste, c'est que la mort ne temiine que lentement les
soulh-ances des infortunés qui on sont atleinls. «Il semWe que ce mal , dit énergiqucnu-nt il. de Pons, en
« veiulle moins 4 l'cxistcnee de l'Iionuue qu'il ses formes, et qu'il fasse plus consister son triomphe il dcgi-ader
" qu'i délruire. » Le lablcau que nous en présenterons, suffu-a pour meltre au jour celte vérité. En diet,
pendant que la peau se flétrit et se décolore, pendant que le tissu cellulaire s'altère et se lumélic ii un point
extrême, pendant que lo eoi-ps entier se détériore , jusqu'il devenir méeonnoissable, les foncUons intérieures
•ic maintiennent souvent dans l'intégrité la plus complète.