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u n bciiu siijel de meditations et de reciierches aux physiologistes ! Q u a n t à l'analogie qu'on a voulu établir entre les
effets des maladies lymphatiques et l'albinisme, elle ne nous paroît rien moins que fondée. Tl y a sans contredit plus
d e rapport entre cet état et ce qu'on observe chez les animaux qui blanchissent durant l'hiver, où ils vivent à l'abri de
l'inlluence de la chaleur et de la lumière, et qui reprennent leur couleur au retour de la belle saison; ce changement
n'est autre que celui produit par l'étioleraent sur les plantes et sur l'espèce humaine elle-même, et on ne peut nier qu'il
n'ait avec l'albinisme toute la ressemblance que l'art et les modificateurs externes peuvent donner avec d'autres effets
qui ont une cause originelle ou organique.
ARTICLE IV.
DES EXANTHEMES EN GENERAIDCCCCLVIII.
Nous comprenons sous ce titre toutes les maladies éruptives dont l'enveloppe tegumentaire peut
devenir le sie'ge, eu !e.s distinguant par leur marche aiguii ou chronique. Celles-ci ont e'té de'crites sous toutes les
formes qu'elles sont susceptililes de revêtir, et avec tout le soin qu'elles méritoient. H seroit donc superflu de revenir
suj- une exposition descriptive épuisée, et nous croyons devoir nous arrêter seulement au parallèle intéressant de ces
deux ordres de maladies. Une circonstance bien digne de remarq\ i e dans la nature des exanthèmes chroniques, c'est
cette lenteur de leur mode inllammatoire dont il ne liiut chercher la cause que dans ta présence des vaisseaux lymphatiques
qui existent en si grand nombre dans la peau. A quelque profondeur que pénètre dans le tissu tcgumen-
. t.ure l'altération qui constitue l'exanthème chronique , il est certain que finllammation des vaisseaux blancs y joue le
principal rôle. L'exhalation est interrompue aussi dans ce cas , noii plus par iin simple obstacle mécanique, mais par
l'altération des organes mômes qui l'exécutent. Tel est le principe dont l'évidence est établie par cette longue et
[jrécieuse série d'observations plus intéressantes les unes que les autres dont le tableau est sans cesse olïert à nos
yeux dans l'hôpital Saint-Louis, et qui est devenu, après une grande expérience, la règle constante de notre
thérapeutique.
DCCCCLlK.Mais il nesuft îsoi tpas de connoi t r e ce résultat majeurd'une observation attentive, qui permet néanmoins
d'apprécier la véritable nature des exandièmes; notre investigation s'est encore dirigée vers le but de préciser plus exactement
qu'on ne l'avoit fait jusqu' àpr é s ent , le siège que chacuii d'eux occupe dans leselémcns de l'enveloppe tégumentaire.
il y a , comme on Ta vu, des différences bien importantes à noter sous ce rappor t , et qui miîritent plus de considération
qu'on ne le croit généralement dans la direction des méthodes curatives. Les dartres elles-mêmes, qui,
au premier aspect, semblent se confondre daus un centre commun d'origine, ont cependant des traits de ilissemblaneebien
prononcés. Aussi, tandis que les unes développent un sentiment de cuisson, de pruri t , ou de douleur
insupportable, les autres envahissent l'épaisseur entière des tégumens, sans produire d'autre incommodité, pour
ainsi dire, que le malaise et la gêue inséparables de toute altération organique un peu considérable. L'afiinité,
s'il est permis de s'exprimer ainsi, que chaque espèce d'éruption herpétique a pour telle ou telle autre partie des
membranes muqueuses, méritoit aussi une étude spéciale , et cependant il n e paroît pas que ce sujet eût encore fixé l'attention
des hommes de l'art qui s'étoient livrés avant nous à la pathologie cutanée. Ain.si que nous l'avons observé ,
la dar t r e jMycténoïde rongeante a été reconnue et constatée plusieurs fois dans la membrane muqueuse de l'estomac
et des intestins ; et aujourd'hui que la connaissance des phlegmasies abdominales a acquis tant de précision, il sera
facile de vérifier ce que nous avons dit de la modification qu'elles reçoivent du caractère herpétique. On rencontre
aussi la plupart de ces maladies à l'orifice ou au point de jonction des deux surfaces tégumentaires, et cette particularité
s'obsei-ve également chez les animaux.
DCCCCLX. Tous les exanthèmes chroniques sont loin d'exercer la même influence, comme il étoit aisé de le pressentir,
sur l'état général d u système, ou sur l'en-semble de l'économie animale. La simple éphélide^ ou même la dartrefurfuracca,
qui intéressent à peine le corps muqueux de la peau, pourroient-elles avoir des eliets aussi étendus ù cet égard que ces
désorgani.sations également repoussantes et cruelles qui conslituent les différentes lèpres, le.s pians et tous les autres
exanthèmes enfin qui attaquent si profondément le système lymphaticpie? Une autre condition qu'il n'est pas moins
l'acile d'apprécier , c'est l'existence de telle ou telle évacuation purulente , sanieuse , dont la quantité seule peut être
déjà d'une conséquence funeste pour l'économie ; mais l'influence des exanthèmes méri toi t d'être considérée sous un
autre point de vue : nous voulons parler de cette action directe qu'ils paroissent avoir sur les fonctions de tel ou
tel autre appareil organique. Chacun connoît l'observation très-ancienne du stimulus de l'éruption herpétique relativement
à la cohabitation des sexes; mais nous avons rapporté quelques faits qui établissent des exceptions à celte
règle générale. Un autre rapport qui n'est pas moins digne d'intérêt, est celui que la présence des c.xanthèmes chroniques
a sur la direction des facultés intellectuelles. Plusieurs des infortunées victimes de ce cruel fléau ne trouvent
de terme à leurs longues souffrances (pie dans le suicide ; et l'explication de co nouveau rapport n'est pas u n des
moins obscurs problèmes offerts à la physiologie par les maladies cutanées.
DCCCCLXI. Il y a deja long-temps que nous nous sommes efforcés de porter les lumières de cette science dans la
M A L A D I E S DE LA PEAU.
thérapeutique générale , et à plus forte raison dans l'ordre des maladies que nous étudions. «Étrange traitemeni
« (disions-nous dans la i"livraison de cet ouvrage), que celui qui ne mot pas les moyens en rapport avec l'état des
« organes! » Lexclusion de toutes ces recettes mystérieuses, de ces arcanes infaillibles, que le charlatanisme colporte
et livre à l'avidité de l'ignorance crédule, ne pouvoit dès lors trouver grâce devant l'inflexibilité du principe
qui nous dmgeoit. Détruire l'élément inflammatoire constituant des exanthèmes, à quelque degré d'ailleurs qu'il se
presente, a donc été le but constant de nos moyens curatifs dans les j)remicrs momens de toute affection exanthématique
; et c'est à cette règle fondamentale que nous devons incontestablement nos plus beaiLx succès Mais alors
même que les progrès de la dégénérat ion organique, ou l'état de débilité consécutif des malades rend l'emploi de la
methode adoucissante impraticable, nous n'avons eu garde de nous jeter dans les procédés empiricpes. L'ignorance
et la paresse intellecUielles peuvent seules vanter les spécifiques ; mais fe praticien éclairé par une sage expérience,
n e s'abandonne point k <le pareilles chimères. On se dirige encore en effet par des principes rationnels dans le traitement
des exanthèmes qui ont résisté aux premiers moyens, en changeant, par l'application judicieuse et convenablement
graduée des divers caustiques , le mode innaramatoire de la peau , ainsi que cela se prat ique journellement avec
succès dans beaucoup d'autres phlegmasies. Malheureusement, trop de cas restent encore au-dessus de cette ressource
puissante ; mais le médecin philosophe sait s'arrêter à propos, et ne méconnoît jamais les bornes de son art.
ARTICLE V.
DES EXANTHÈMES AIGUS OU MAÎ.ADIES ÉRUI'TIVES.
DCCCCLXII. Il n'entre pas dans le plan de cet ouvrage de tracer en détail l'histoire de ces maladies, qui d'ailleur.'^
sont décrites dans tous les traités généraux de médecine. En vain la physiologie s'est-elle eilbrcée de pénétrer la cause
primitive et la nature de quelques-unes d'entre ces affections, et particulièrement de l'éruption variolique. Celle-ci
peut sans dout e servir de type pour toutes les aut res ; mai s elle a de plus certaines particularités de forme et de développement
qui doivent être sévèrement distinguées. On chercheroit inutilement, par exemple, dans beaucoup de maladies
éruptives, pour ne pas dire dans toutes, cette fixité de caractères extérieurs et d'élémens producteurs qui, bien qu'inconnus
dans leur principe, n'en conservent pas moins leur physionomie dans tous les temps et dans tous les l ieux, au
milieu derinfiuence sans cesse agissante des modificateurs physiques les plus variés. Les différentes espèces d'érysipèle,
les mille nuances d'éruption miliaire sont assez souvent erratiques et jiresque toujours en rapport dans leur apparition
avec la nature des vicissitudes atmosphériques que les malades ont éprouvées. La variole n'échappe pas entièrem
e n t , sans doute, à cette cause puissante de modification dont les effets acquièrent même quelquefois, ainsi que l'a
démontré une expérience récente, la plus grande évidence ; il est seulement digne de remarque qu'elle est le résidtat
d'un agent aussi insaisissable dans sa nature que constant dans sa manifestation et dans ses formes, et susceptible de
neutralisation par la vaccine, autre agent non moins puissant et jusqu' à ce jour pareillement impénétrable.
DCCCCLXJII. On sait que l'apparition de toutes les maladies éruptives est précédée d'accidens variés plus ou moins
intenses, à l'ensemble desquels le nom de période d' incubat ion a été donné par les pathologistes. Ce n'est pas sans fondement
qu'on a dans ces dernières années attribué à l'irritation des membranes muqueuses la série des phénomènes qui constitue
les prodromes de ce genre de maladie. L'observation prouve en effet que cette surface tégumentaire est toujours
alors le siege de l'irritation primitive; ce qui n'établit pas néanmoins que la rougeole ne soit qu'un catarrhe pulmonaire,
et la variole une gastrite. La circonstance dont nous parlons manque totalement dans les exanthèmes chroniques, et c'est
u n des caractères qui les distinguent des maladies éruptives proprement dites. On peut y voir également que l'influencc
sympathique ne s'exerce pas dans ces dernières, suivant la même direction que dans les autres; elle est néanmoins
réciproque pour les deux ordres de maladies; nous ferons seulement une remarque qui n'a pas encore été présentée;
c'est que dans les dernières, la sympathi e s'exerce généralement du dedans au dehors, et dans le sens contrail
î pour
les premières, ce qui nous paroît comporter très-peu d'exceptions importantes.
DCCCCLXIV. Ce n'est pas seulement à l'espèce humaine qu'est échu en partage le triste lot des maladies
éruptives. Ainsi que les exanthèmes chronicpies, on les observe cliex les animaux qui vivent avec l'homme, en
partageant ses t ravaux et sa misère. L'un des patriarches de la médecine française, M. Paulet, nous a communiqué le
cas fort intéressant (l'une rougeole observée par lui sur un jeune singe. Prodromes, fièvre concomittante, éruption
d e taches rouges analogues à des piqûres d'épines, très-rapprochées à la partie interne des extrémités antérieures et
postérieures, ainsi que sur toutes celles dépourvues de poils, comme les joues et les abajoues, le cou, etc. ; aucun
des caractères de ce genre d'aiiection ne manqua à celle-ci. Elle se termina heureusement pour l'animal, qui devint
pendant son cours, un objet d'étude intéressant pour plusieurs médecins. Ce n'est pas d'ailleurs la seule analogie en
ce genre existant entre l'homme et les différentes espèces animales. La clavelée^ dont sont particulièrement affectées
les bêtes à laine, présente la plus grande analogie avec la variole de l'espèce humaine, bien que les expériences de
Camper, de Voisin, et celles plus récentes de la Faculté de Médecine de Paris, aient prouvé qu'on ne pouvoit point
reproduire fune de ces maladies par l'autre. Il existe probablement à cet égard la même difiérence qu'on observe dans
la même éruption comparée à celle, d'ailleurs fort analogue, que présentent quelques autres animaux; ce sont , pour ainsi
d i r e , des spécialités de races.
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