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dont ils ont jugé , ou des foupçons que le cerf
dont ils veulent faire rapport n'eft pas bien détourné
, ils fe déterminent à le lancer* c'eft pour
lors qu'il eft avantageux que toutes les voies du
matin, aient été rayées & 'brifées. L'un des deux
fe met au coin de l'enceinte 3 du côté qu'ils imaginent
que le cerf doit naturellement fortir , &
l'autre pouffe 1a voie 8c croife l'enceinte , fi les,
voies font trop vieilles pour que le chien puiffe
fuivre : fi le cerf eft lancé 8e que le valet de limier
qui l'a vu le juge de taille à être détourné, les
routes des environs ayant été faites dès le matin,
toutes les voiès rayées & brifées, il leur fera
facile de le détourner. Mais, on le répète, un
cerf effrayé & détourné fur le haut du jour , eft
inquiet & fouvent même fe met für pied fans
être effrayé de nouveau : ainfi il faut l’obferver
long-tems & mieux encore, dire , en en faifant
rapport, que l’on a été obligé de le lancer j mais
la crainte que l'on ne vienne pas à fes brifées ,
empêche fouvent le valet de limier d’avoir cette
franchife, ' - ’ ' :.. * , P i -. : :1 ’ i { "
Quoiqu'un cerf n'ait pas été inquiété, les valets
de limier doivent l'obferver le plus tard qu'ils
peuvent, parce qu'il eft très-ordinaire qu'ma cerf
remue fur le haut du jour. Il y a plufieurs caufes
qui l'y déterminent. Lorfqu’il eft mis fur ie ventre
le matin , il étoit à l’ombre de quelque cépée ou
de quelque grand arbre j le foleil tourne 3 il s'y.
trouve expofe, il cherche un autre abri : il peut
en trouver à quelques pas de-fà s mais il peut
très-bien aufti paffer une route ou le chemin par
lequel on raccourcit l'enceinte. Les mouches les
inquiètent aufli, fur-tout quand leur tête n’eft pas
faite. Dans le printems , i l eft très ordinaire que les
■ cerfs fortent dans les plaines dans lé milieu du jour j
il y a encore en outre mille autres événemens qui
les font remuer. En général , les veneurs ont remarqué
que^uand Jes pies & les geais crient dans
l'enceinte, c'eft une preuve qu’il y a des animaux
fur pied.
Pour obferverjjn cerf qui eft bien détourné, les
deux valets de limier fe mettent chacun à un des
carrefours des routes qui entourent l'enceinte, &
autant que le local le permet, aux deux angles
oppofés : & de demi-heure en demi-heure , celui
qui a manoeuvré 8c détourné le cerf, en prend les
devants , parce que fon limier en ayant connoif-
fnnçe, il doit moins le laiffer aller : il n'y a pas de
mal cependant d’en prendre les devants aufli avec
l’autre ; un limier fatigué peut fur-aller , 8e.d'ailleurs
on 112 doit négliger aucun des moyens de confirmer
fa manoeuvre. Bien des valets de limier fe
contentent d’obferver > mais il eft fi aifé qu'un
animal forte de l'enceinte, oiï que d'autres, y entrent
fans qu'on s'en apperçoive , qu’il eft très-
imprudent d'écouter fa pareffe. Il n’eft pas poflible !
d'avoir les yeux fixés fur les routes pendant deux *
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heures 8c quelquefois plus : il eftrprefqu.'aufli effen«
tiel de favoir s'il n'entre pas d'autres animaux
dans l’enceinte , que de favoir fi le cerf détourné
en fort.
Si le valet de limier ne fait rapport -que d’un
c c r ffeu l, 8e qu'il paroiffe un jeune cerf., on foup-
çonne que c ’eft celui dont il a fait rapport , 8e
fouvent ce jeune cerf fera entré pendant, qu'il
étoit encore au coin de. l'enceinte. Comme nce
jeune cerf qui entreroit dans l'enceinte du g ro s ,
pourroit l'inquiéter 8e l’emmener avec lu i , pu
même refter dans l’enceinte, 8e empêcher qu'on
ne vienne y attaquer, parce qu'on préféré toujours
d’attaquer un 'cerf feul, on emploie quelquefois un
moyen très-délicat, 8e dont on ne doit ufer que
lorfque le jeûné' Cerf ne 'fait que* .d’aller, qu’il fe
rembuche dans de bonnes demeures, & loin des
brifées du gros : 011 pouffe la voie de ce jeune cerf,
8e du moment qu’ on s’apperçoit qu’il eft lancé ,
on fe retire le^jplus doucement qu'il eft poflible.
Si on voyoit cependant qu’ il fallût pénétrer trop
avant dans l’enceinte , il faudroit abandonner le
projet,, car il vaut mieux détourner un jeune cerf
avec un gros -, que de n'en pas détourner du tout :
aufli on ne fait qu’indiquer cette manoeuvre , 8c
on ne confeille point du. tout aux jeunes gens de
la mettre en pratique.
Des relais.
Il eft bien difficile, pour ne pas dire impofli-
ble , de chaffer le cerf fans relais. Dans la vene-
r ie , comme dans prefque tous les équipages du
,cerf 3 on fait trois; relais , fans y comprendre les
chiens de meute : le premier fe nomme la Vieille
meute : le fécond fe nomme la fécondé vieille
meute , ou tout Amplement la fécondé : 8c le troi-
fième , les fix chiens. On ne fait pourquoi ce dernier
relais fe nomme les fix chiens : on pourroit
croire qu'il ne feroit réellement compofe que de
fix chiens } mais pour l'ordinaire, il eft auffi
nombreux que les autres. Pour former 8c entretenir
les relais de vieille meute , on prend ceux
des chiens de meute qui font les plus fages &
les moins allans ; pour la, fécondé, on prend
de ceux de la vieille meute : & pour les fix
chiens de ceux de la fécondé. Lorsqu'un chien
de meute n’eft pas affez léger pour tenir à la
vieille meute, on doit, s'il eft fage , le mettre à
la fécondé & même aux fix chiens j 8c lorfqu’un
autre chien eft trop vite & trop vigoureux pour
fon relais, on d o it , par la même rai fon , le remettre
un relais au-deffus, c'eft-à-dire , à la
vieille meute 5 s'il eft trop fo r t , à la fécondé,
8c ainfi des autres : cette attention eft d’autant
plus néceffaire, que fi les chiens d'un relais ne
font pas à-peu-près du même pied , les plus vîtes
laiffent le gros de la meute derrière eux , for-
iongcnt un cerf 3 & fouvent le font manquer. Il
faire b o irè les chiens quand on le peur. Sans
toutes ce s a t te n tio n s , un relais de vien t d ’autant
plus inutile , que des chiens qu’ on d é cou ple fon t
fou ven t plus fatigués que peux qui ch affen t, & que
d'ailleurs on s ’cxpdfe à les. faire cre ve r , ou du
moins à les efiropïe r ; on v o it moyennant cela que
la réuflïte d’une chaffe & la coiifervation d ’une
meute dépendent beaucoup de la façon dont on
cond uit les relais.
çft certain d’ailleurs' que c’ tft ne pas chaffer,
ou du moins très-mal chafler, que de prendre <
iim ce>f avec trois ou quatre chiens, quand on -,
cii a quatre-vingts à la chafl'e. Jamais »n ne doit
mettre au relais des chiens qui ne gardent pas le j
change ou qu’on n’arrête pas aifément : il faut les ,
laiffer de meute jufqu’à ce qu’ils deviennent fages
} & s’ils ne le deviennent pas, il faut les ^réformer
, parce qu’ ils font toujours pernicieux dans
Un équipage.
Le nombre des chièns de relais doit être proportionné
à la totalité dé ceux qui compofent la 1
méti-te i fi elle eft de' cent v in g t , on en peut î
mettre à chaque relais vingt ou vingt-deüxTur la
■ lifte : mais on n’en doit mener que quatorze ou
fcize à la chaffe, parce qu’én mettant plus de
huit chiens à chaque harde, on court rifque de les
éftropier ou de les étrangler , lors fur-tout qu’on :
eft obligé de les- avancer long-tems avant que de '
les découpler.
Chaque relais , compofé de deux hardes , eft
mené par deux valets de chiens , l’ un -'à chëyal &
l’autre à pied | lorfque la chaffe tourne d ’un côté
oppoXe à celui o u i ’ on à1 placé le relais , un valet
de limier à' cheval l’avertitk & prend la harde
du valet-de chien à pied , lequel ne pourroit marcher
allez vite ni affez long-tems pour rejoindre la
chaffe.
Celui qui mène un relais, ou qui le fait avancer
, doit ne le mener qu’ au t r o t , fans puoi il
crève fes chiens ou les étrangle > il doit s'arrêter
de tems en tems 8c écouter, parce que fi , au lieu
d'aller en avant, la chaffe retourne fans qu'il s'en
apperçoive , il eft obligé de revenir lui* fes pas,
8c par conséquent de faire le double du chemin
} il doit ëbnnoître. le pays 8c les refuites , 8c
juger par ce moyen où il pourra donner fon relais
, én prenant le chemin le plus court s'il
fuit toujours la chaffe par derrière , comme cela
n'arrivé cfue trop fouvent, il n'en donne fon relais
que plus tard, 8c d’ailleurs les chiens font ou
étouffes par la peuflière , ou couverts de boue par
les chevaux qui vont devant eux. Il eft vrai qu’une
refuite extraordinaire embarràffe 8c trompe un
valet de limier 5 mais Ton intelligence, en ce cas
doit lui donner des reffources que ne peut avoir
celui qui ne fait qu’aller droit devant lui.
Ceux qui mènent les relais , doivent connoître
les chiens qui ne vont pas bien à la harde , 8c les
découpler lorfqu'il faut avancer.;’ parce que ces
animaux, en fe faifant traîner , tomberoient fur le
côté 8c s'étrarigleroient : on en a vu des exemples.
Lorfqu'il y a loin à avancer, il faut deharder
8c mener les cniens couplés , fauf à les reprendre
à la harde quand on rejoint la chaffe. En avançant
un relais * on ne doit pas manquer l'occafion de
Lfcrfqu'un cerf eft attaqué , on donne les chiens
d e m e u te , & peu de tems après la v ie ille meute ,
[ pa rce que les chiens de c e relais , plus fages que
le s chiens .de meute , maintiennent 8î réparent
aufli plus aifément leur 'cterft O n fait donner fuc-
| ceffivement les, autres re la is , c’e ft-à -d ire la fe-
| cou de après la v ie ille m e u te , & les fix chiens
I après la fécondé. O n eft cependant o b lig é en ce r-
i tainé snce afions.dé donner la fécondé & même le s
fix chiens avant la v ie ille meute ; lo r s , par e x em ple
J qu’ un cerf fait une refuite extraordinaire 3 &
qu'ayant manque les deux premiers r e la i s , on
pafle au trpifième , il faut! neceffairement le faire
donner ; mais , à ce tte circonftance p r è s , on d o it
toujours commencer par les plus forts î les chiens
par c e moyen fon t toujours enfêmble , 8c le s
vieux-ne fe forc en t pas. C e lu i qui place les relais
d o i t , ainfi que celu i q ui les fait a v an c e r , con-
noîpre le pays & les refuites ; plus il y a de bons
chiens découplés; j. plus il y a de reffources
pou r faire une belle chaffe. O n do it donc placer
les relais de façon qu/on puiffe le s donner en, peu
de tem s , pourvu neanmoins qu'ils foien t d é cou plés
à p ro p o s , & les uns ap rè s . les autres. O n
dira fans d o u te , que dans le printems & 1 é té ,
les cerfs, [ont v igoureux , qu’ils font difficiles a
chaffer , 8c que par eonféquent fi on ne ménage
pas les r e la is , les chiens fe rendront & finiront
par ne rien prendre. Il eft cèrtain qu’ en ces deux
faîfens , il eft bon de réferver quelques chiens
en cas d e : beforn ; mais il n 'en eft pas moins vrai
qu'on ne chaffe réellement bien qu’ avec des chiens
fa g e s , & que pour en avoir , il faut donner des
relais; d ’ailleurs lorfqu’ une ch affetire en lo n gu eu r ,
les v alets de limier & les v a le tsd e chien reprennent
I à la harde les chiens qui tra în en t, les fon t b oire &
le s redonnent enfuite : ces chiens repris & rafraîchis
fe rven t fotivent autant qu’ un r e la is ,& fon t prendre
. un cerf.
On ne d o it jamais donner un relais que lo r s qu'un
cerf eft f e u l , parce qare s'il eft accompa-
i g n é , l’ animal pour donner le change fa it uti
'r e to u r 6a fe - je t t e 1'fur le ventre : au moyen de
qu o i les chiens qui fortênt du cou ple & qui
n’ ont pas encore g oû té la v o ie du cerf chaffe ,
attaquent infailliblement ce lu i qui fu it de vant
eu x. O n ne d o it Suffi donner un relais q u e
lorfque tqüs les chiens ehaffans fon t pâlies ,a(m
que ceux qu’ on d é cou ple ayent le tems de goû