
les foins qu'on pourrait prendre d'ailleurs, 8c cela
demande, de la part de ceux qui en font chargés ,
beaucoup d'attention & d’habitude.
C e foin principal n’eft cependant pas le feul
qu’exigent les efpèces de menu gibier qu’on peut
conferver avec le moins d’inconvéniens ; je parle
des perdrix grifes, des perdrix rouges & des
faïfanss.
Chacune de ces efpèces demande un pays dif-
pofé d’une manière particulière, 6c des foins
propres que nous allons indiquer féparement.
En réunifiant c§s difpofitions & ces foins, on
peut réunir & ^conferver les trois efpèces en-
femble.
Les perdrix grifes fe plaifent principalement dans
les plaines fertiles, chaudes ,un peu fabloneufes ,
8c où la récolte eft hâtive. Elles y fuient les terres
froides , ou du moins elles ne s’y multiplient
jamais à un certain point. Cependant fi des terres
naturellement froides font échauffées par de bons
engrais, fi elles font marnées, & c . l’abondance
des perdrix peut y devenir très-grande : voilà
pourquoi les environs de Paris en font peuplés à
un point qui paraît prodigieux. Tous les engrais
chauds que fournit cette grande v ille , y font
répandus avec profufion, & ils favorifent autant
la multiplication du gibier, que la fécondité des
terres. En fuppofant Tes mêmes foins , les meilleures
récoltes en grains, donneront la plus grande
quantité de gibier.
La terre étant bien cultivée, les animaux dëf-
trufteurs étant pris avec foin, il faut encore
pour la sûreté & la tranquillité des perdrix grifes,
qu’une plaine ne foit point nue ; qu’on y rencontre
de tems en tems des remifes plantées en bois ,
ou de fimples buiflons fourrés d’épines : ces remifes
garantirent la perdrix contre les oifeaux
de proie, les enhardi fient à tenir la plaine, & leur
font aimer celle qu’elles habitent. Quand on n’a
pour objet que la confervation, il ne faut pas
donner une grande étendue à ces remifes? il
vaut mieux les multiplier 5 des buiflons de fix
perches de fuperficie feraient très-fuffifans , s’ils
Û’étoient placés qu’ à cent toifes les uns des autres
; mais fi Ton a le deflein de retenir les perdrix
après qu’elles ont été chafiees & battues
dans la plaine, pour les tirer commodément pendant
Thiver 3 on ne peut pas donner aux remifes
une étendue moindre que celle d’ un arpent. La
manière de les planter eft différente aufli , félon
l ’ufage qu’on en veut faire.
On peut être-sûr que dans un pays ainfî dîfpefé
&: gardé, on aura beaucoup de perdrix ? mais
l ’abondance étant une fois établie, il ne faut
pas vouloir la porter à l’excès. II faut, tous les
ans ôtèr une partie des perdrix, fans quoi elles
s’embarrafleroient Tune l’autre au tems de la pont
e , & la multiplication en fe ra it moindre. C ’eft
un bien dént on eft contraint de jouir pour le
conferver. La trop grande quantité de coqs eft
furtout pernicieufe. Les perdrix grifes s’apparient
5 les coqs furabondans troublent les ménages
établis, & les empêchent.de produire. Il eft
donc néceflaire que le nombre des coqs ne foit
qu’égal à celui des poules ; on peut même laiffer
un peu moins dè ct>qs: quelques-uns fe chargent
alors de deux poules, & leur fuffifent 5 elles pondent
chacune dans un nid féparé, mais fort près
Tune de l’autre 5 leurs petits éclofent dans le
meme temps, & les deux familles fe réunifient
en une compagnie fous la conduite du pere & des
meres. Voilà ce qui concerne la confervation des
perdrix grifes.
Les rouges cherchent naturellement un pays dif-
pofé d’une manière différente 5 elles fe, plaifent
dans les lieux élevés, fecs & pleins de gravier ;
elles cherchent les bois , fur-tout les jeunes taillis
& les fourés de toute'efpéce. Dans les pays
où la nature feule les a établies , on les trouve
fur les bruyères , dans les roches ? & quand on
n’a d’elles que des foins ordinaires , elles ne pa-
roiffent pas fe multiplier beaucoup. Les perdrix
rouges font plus fimvages & plus fenfiblesau froid
que ne font les grifes : il leur faut donc plus de
retraites qui les raflurent, & plus d’abris , qui
pendant Thiver les garantiflent du vent 6c du
froid. Les perdrix grifes ne quittent point la
plaine lorfqu elles y font en sûreté ; elles y couchent
& font pendant tout le jour occupées du
foin de chercher à vivre. Les perdrix rouges ont
• des heures plus marquées pour aller aux gagnages ;
elles fortent le foir deux heures avant le foleil
couchant ; le matin lorfque la chaleur fe fait fen-
tir s c’ eft-à-dire. pendant Tété vers neuf heures,
elles rentrent dans lej bois 6c fur-tout dans les
taillis, que nous avons dit leur être néceflaires.
Il faut donc que le pays où Ton veut multiplier
les perdrix rouges, foit mêlé de bois & de plaines;
il faut encore que ces plaines, quoique voifi-
nes des b o is , foient fourrées d’un affez grand
nombre de petites remifes, de buiflons, de haies,
qui établifient la sûreté de ces oifeaux naturellement
farouches. Si quelqu’ une de ces chofes manque
, les perdrix rouges défertent. Les grifes
font tellement attachées au lieu où elles font
nées , qu’elles y meurent de faim plutôt que de
l’abandonner ; il n’y a que la crainte extrême
des oifeaux de proie qui les y oblige. Les perdrix
rouges ont befoin d’une fécurité plus grande;
fi vous les faites partir fouvent de leurs retraites,
cet effroi répété, les chaffera , 6c elles
courront jufqu'à ce qu’elles ayent trouvé des lieux
inacceflîbles. On voit par-la que le projet de
multiplier dans une terre les perdrix rouges à un,
certa-i»
G I B G I R m
certain p o in t , entraîne beaucoup de dépenfe &
de .foins , qui peuvent 6c doivent peut-être en
dégoûter ; c ’eit un objet auquel il faut facrifier
beaucoup , 6c n'en jouir que rarement. Les perdrix
rouges s'aparient comme les grifes , & il eft
elfenticl auifi que le nombre des coqs ne foit
qu’égal à celui des poules. On peut tuer les coqs
dans le courant de Tannée, à coups de fufil ;
avec de Th ibitude, on les diftingue des poules en
ce que celles-ci ont la tète 6c le cou plus p etits ,
& la forme totale plus légère: fi Ton n ’a pas pris
cette précaution avant le tems de la p onte, il
faut au moins la prendre pendant ce tems pour
Tannée- fuivante. Dès que les femelles couvent,
elhs font abandonnées par les mâles, qui fe réunifient
en compagnies fort nombreufes. On les
voit fouvent vingt enfemble. On peut tirer hardiment
fur ces compagnies ; s’il s'y trouve quelques
femelles mêlées, ce font de celles qui ont
pafie l’âge de produire. Cette opération fe doit
faire depuis la fin de Juin jufqu’ à celle de Septembre
: après c e la , les vieilles perdrix rouges
fe mêlent avec tes compagnies nouvelles , 6c les
méprifes deviennent plus à craindre.
Les faifans fe plaifent affez dans les lieux humides
; mais avec de l’attention oh peut en retenir
partout où il y a du bois 6c du grain. U faut aux fai-
fans des taillis qui les couvrent, des arbres fur
ïefquels ils fe perchent, des plaines fertiles qui
les nourriflent, dans ces plaines des buiflons qui
les aflurent, 6c autant que tout Cela une tranqui-
lité profonde, qui feule peut les fixer. Si je vou-
lois peupler d’une grande quantité de faifans un
pays nud , je planterais des bofquets de vingt
arpens, à trois cents toifes- les uns des autres.
Ces bofquets feraient divifés en quatre parties,
dont chacune ferait coupée à l’âge de feize ans ,
afi.i qu’il y eût toujours des taillis fourés 6c de
quoi percher. Les entre-deux de ces bofquets
feraient cultivés comme la terre Teft ordinairement
: une partie ferait femée en blé , l’autre en
mars , pendant que la troifième refteroit en jachère.
Je voudrais outre cela planter à cent toifes
de chacun de ces grands bofquets , des buiflons
alongés en haies, qui établiraient la sûreté des
faifans dans la plaine ; ces buiflons ferviroient à
les faire tuer. Le terrein ainfi difpofé , on ne
toutmenteroit jamais les faifans dans les grands
bofquets dont j’ai parlé ; ils y trouveraient un
azile afluré, lorfqu ort les auroit chafles à la faveur
des buiflons. Si vous faites partir deux ou
trois fois les faifans , ils s’effrayent & défertent.
On efpère en vain d’ en retenir beaucoup partout
où Ton chaffe fouvent. Ce feroit dans ces
haies intermédiaires dont nous avons parlé ,
qu’on donnerait à manger aux faifans pendant
Thiver. L’orge & le farrafin font leur nourriture
ordinaire ; iis font très-friands des féverolles : on
peut auffi leur planter des topinambours 5 c ’eft une
j(BASSES^
, efpècede pomme de terreqii’ils aiment, &quifert
; à les retenir , parce qu’ils leur faut beaucoup de
j temps pour tla déterrer. Dès qu'on s apperçoit
; que la campagne ne fournit plus aux faifans b;au-
; coup de nourriture , dès que les coqs commencent
à s’écarter , il faut leur jetter du grain :
on ne leur en donne pas beaucoup d’abord ; mais
j en plein hiver il ne faut pas moins qu’un boiffeau
mefure de Paris par jour , pour une centaine de
î faifans ; s’il vient -de*-Ta neige , il en faut davin-
; tage. Pendant la neige la confervation du gibiec
| en général demande beaucoup d'attention.
j II faut découvrir le gazon de près pour les per-
| drix grifes. Pour cela on fe fért de traîneaux
; triangulaires qui doivent être fort pefans, & ar-
! més par devant d’une efpèce de foc de fer qui
{ fende la neige. On y attele un ou deux chevaux 3
) & on attache fur le derrière , pour faire l’office
du balai, une bourrée d’épines fort rudes , qu on
I a foin de charger. Il faut que des hommes ba-
« layent le long des buiflons au m id i, des places
! pour donner à manger aux perdrix rouges. Il faut
pour les faifans répandre dans différentes places
du fumier, fur lequel on jette du grain. Il eft
néceflaire qu’ ils foient long.tems à le trouver.
Si on ne leur donne pas de cette manière , il feroit
dévoré fur le champ ; & après cela leur o -
fiveté 6c leur inquiétude naturelle les feraient
déferter. Malgré tous ces foins on perd encore
beaucoup de faifans , fur-tout par les brouillards
qui font fréquents à la fin jjljp. I automne. Vo ilà
ce que nous conncifTons de plus effentiel pour la
confervation du gibier. Les détails de pratique ne
peuvent point être écrits ;mais ils ne feront ignorés
d’ aucun de ceux qui voudront s en inftruire par
l ’ufage. Nous en avons peut-être trop dit , v û le
peu d’importance de la matière. Nous ne devons
pas finir fans avertir les laboureurs, qu en fumant
leurs terres un peu plus , & en lemant leurs blés
quinze jours plutôt, les faifans , 6c les perdrix
ne leur feront qu’un léger dommage. A Tégard
des lièvres H des lapins, leur abondance fait un
tort auquel il n’y a point de remede ; on ne les
multiplie qu’aux dépens des autres efpeces de
gibier 3 6c à la ruine des récoltes,
GIBOYER ; c’eft chafler avec le fufil à pied
& fans bruit. On employé aufli ce terme en
fauconnerie lorfqu’on chane a I oifea.u > 6c qu on
vole le gibier.
GIRAFFË , f. f. Nom d’un quadrupède , qui
(emble tenir du chameau 6c du léopard , 6c que
lçs Grecs 6c les Latins ont connu fous le nom de
Camelo -pardalis. On remarque que la girafe ne
peut ni fuir fes ennemis dans l état de liberté j
Ini fervir fes maîtres dans celui de domefticité.
Cet animal a les parties pofté hCeuSres du corps