
, 0 H Y E
C et animai féroce eft folitaire;-il habite dans
les cavernes des montagnes , 8c dans les fentes
des rochers ; il v it de proie comme le loup ,
mais il a plus de hardieffe que lui ; il fe jette fur
le bétail , rompt pendant la nuit les clôtures de bergeries , égorge les enfans 3 8c lutte contre
F homme même. L7iyenc fe défend avec fuccès
contre le lion , attaque la panthère , & terraffe
Tours. Quand la proie vivante lui manque , elle
tire par lambeaux- les cadavres des hommes 8c
des animaux 3 8c s’en nourrit. C et animal féroce
fe trouve dans prefque tous les climats chauds
de TAfie 8c de l’Afrique. Uhyene a le col ex-
ceffivement roide.
Le cri de Vhyene reffemble au mugiffement du
veau. Son corps eft court 8c rama S e , fa tête^eft
quarrée, fes oreilles font longues * droites 8c nues.
L e poil du corps eft long 5 elle a une crinière de
couleur gris obfcur.
Uhyene qui fit tant de ravages , il y a quelques
années dans le Gévaudan avoir trente-deux pouces
de hauteur , cinq pieds fept pouces' 8c demi
de lo n g , 8c trois pieds de groffeur.
E lle 'avoit quarante dents : fes côtes étoient
difpofées de façon quelle avoit la facilité de fe
plier de la tête à la queue : fes yeux étoient fi
étincelans 3 qu’il fembloit impoffible d’en fou-
tenir l’afpeét : fa queue-étoit large 8c hériffée,
& fes pieds armés de griffes d’une configuration
& d’une force fingulière.
Cette bête féroce qu’on a appellé bête du Gévaudan
à caufe des défaflres qu’elle a eau fes dans
cette-province 3 a promené auffi fes fureurs dans
l’Auvergne. A la fin de 1764 elle étoit déjà fi
connue , qu’ on fut obligé d’envoyer un détachement
de dragons à fa pourfuite.
- Au commencement.de ij6 y elle attaqua une
bande d’enfans dti village de Villeret 5 les trois
plus âgés avoient environ onze ans -, 8c il y avoit
deux garçons 8c deux filles qui n’en avoient que
huit : la bête vint les furprendre 3 8c ils ne s ap-
perçutent d’elle que lorfqu’il leur fut impoffible
de l’éviter ; ils fe raffemblèrent alors. 3- 8c fe mirent
en défènfe : le combat commença par l’effort
que fit Vhyene pour s’emparer du plus petit de la
bande : le bataillon de jeunes héros fondit alors
fur elle , armés de bâtons où ils avoient attaché
une lame de fer de quatre pouces de longueur ;
ils la piquèrent à pluficurs reprifes 3 fans pouvoir
lui percer la peau , mais à force de 1a tourmenter
ils lui firent lâcher prife r elle fe retira à deux
pas pour manger un lambeau de chair qu’elle
:avoit arraché à la joue d’un des jeunes athlètes.
Quelques momens après 3 ce monftre revint
*veç de nouvelles forces & une nouvelle fureur 4
H Y E
faifit par lè bras le plus jeune des combattans,
8c l’emporta dans fa gueule. On tint alors con-
feil un inftant pour délibérer fi on s'enfuir oit
pendant que la bête dévoreroit Ta proie ; mais
le parti le plus courageux l’emporta 3 8c il fut
réfolu qu’on délivreroit ce m a l h e u r e u x 3 ou qu’on
périroit avec lui. On pourfuit alors cette hyene
avec vigueur j & on La pouffe dans un marais
avec fa proie : la bête arrêtée par la fange fie
voice - face , fe défendit contre fes -affaillans,
tenant toujours fous fa patte l’enfant qu’elle
avoit enlevé j heureufement elle n’eut pas le
tems de Je mordre 3 parce qu’elle étoit trop
occupée à efquiver les coups qu’on lui portoit :
enfin on la harcela avec tant de confiance 8c d’intrépidité
3 qu’on l’obligea à lâcher prife une fécondé
fois > l’animal furieux 3 mais vaincu 3 prit
la fuite 3 8c alla à quelques lieues de ce champ
de bataille dévorer des hommes quelle furprit
fans défènfe.
Le trait, fuivant eft encore plus admirable.
Au mois de mars i j 6$ , une femme du Rouget,
âgée de 27 ans , étant vers Te midi avec trois de
fes enfans fur le bord de fon jardin, fut attaquée
brufquement par la bête du Gévaudan, qui fe
jetta fur l’aîné de fes fils , âgé de dix ans , lequel
tenoit entre fes bras le plus jeune encore à la
mamelle. La mère épouvantée , ne s’apperçoit
pas qu’elle eft foible 8c fans armes , elle ne con*
fuite que fon amour , 8c vole au fecours de fes
enfans ; elle lutte contre ce monftre , 8c lui
arrache tour-à tour fes deux proies : mais dès
qu’on ôtoi-t à la bête un des enfans, elle fe fai-
fiffoit de l’autre ; c’étoit fiiD-tout le plus jeune
qu’elle attaquoit avec le plus d’ acharnement. Le
combat fut d’abord à l’avantage de la mere, qui,
armée des feules forces de la nature , réuffit à
mettre fes deux fils hors de danger. Uhyene
voyant qu’on lui enlevoit les deux enfans, alla
fe jetter fur le troifième , âgé de fix ans., qu’elle
n’avoit pas encore attaqué , 8c dont elle engloutit
la tête dans fa gueule. Notre héroïne ne fe décourage
p oint, elle monte fur le doVdu ravif-
feur , elle faifit le monftre par les parties de la
génération, elle le harcelle comme fi elle eût
eu fa vigueur ; mais enfin laffée de tant d’efforts,
elle tombe fans force 8c prefque fans connoif-
fance.
Uhyene emportoit fa proie , dont perfonne ne
lui difputoit la jouiffance , lorfqu’ un berger , témoin
de la fin de ce fpeétacle terrible , accourut
fuivi d ’un mâtin de la plus haute taille : la bête
contrainte à un nouveau combat., craignit une
défaite ; elle laiffa tomber l’enfant de fa gueule ,
enleva le chien d’un coup de tête qui le porta
à vingt pas au-delà , 8c prit la fuite.
Pendant que la bête du Gévaudan faifeit tant
ed
de ravages , le gouvernement faifoic faire des
chaffes générales : 8c dans une occafion , trente
paroiffes de l’Auvergne 8c foixante - treize du I
Gévaudan formèrent un corps de vingt mille
chaffeurs pour détruire ce fléau public.
Cependant les peuples gémiffoienf, fe'commerce
étoit interrompu , les chemins abandonnés
; enfin Le fleur Antoine, lieutenant-general
des chaffes , à h .tété de plufieurs bons .tireurs
& d ’exce:l.. ns limiers vint pour for,cer Vhyene dans
fes. derniers retranchemens. .
Le 20 feptembre 176y , étant informe que la j
bête du Gévaudan s’était retirée dans les bois de j
Pommiers, il les fit inveüir par quarante tireurs ;
& par les garde-chaftes q u il avoir amenés : des j
chaffeurs de boane volonté fe réunirent aufli a
lu i , & partagèrent fes périls.
A peine les valets, de limiers etoient entres
dans le bois avec , les chiens de la louyeterie ,,
que le fleur Antoine vit p a r a î t r e à cinquante
pas de diftance l’ animal formidable ; fl n aL"
tendit pas que le m o n f t r e s ’ é l a n ç â t fur l u i ^ n
fe hâta de lui tirer un coup de canardiere
chargée de cinq coups de poudre , de trente-
ciriq polies à loup 8c d’une balle de calibre : la
bête reçut la balle dans T oe i l droit , 8c toutes
les poftes dans le côté ; la vigueur 3u coup
fit reculer de plufieurs pas le chaffeur. Il
femblé que l’animal auroit dû fuccomber, mais
Vh)ene en fut à peine ébranlée : cette béte féroce
recula un moment comme pour s elancer
fur fon ennemi j le péril devenoit urgent, 8c le
fleur Antoine n’avoit point d’armes égalés pour
lutter contre un monftre qui étoit fi terrible.
Heureufement un des chaffeurs dont il étoit accompagné
, 8c qui ne perdoit point de vue
Vhyene, lui tira un fécond coup de canardiere
dans le derrière, qui lui fit une bleffure très^■
profonde > l’animal épouvanté prit la fuite jufqu’a
la diftance de vingt-cinq pas , y tomba 8c mourut.
HYPPOPOTHAME. Quadrupède amphibie ,
qui eft auffi connu Tous le nom de cheval de
rivière ou de cheval marin : lés Anciens le con-
noiffoient, mais ils l’ont défiguré dans leurs def-
criptions.
L’ Italien Zerenghi eft le premier qui en 1603,
ait donné une notice exaéte de l’kyppopothame.
Étant fur le bord du Nil , il en vit deux fortir
du fleuve-: il fe hâta de faire une grande foflfe
dans l’endroit où il jugeoit qu’ils dévoient re-
paffer ; 8c la fit recouvrir de bois léger , de terre
8c d’herbages : le foir ces animaux en revenant
au fleuve , tombèrent tous deux dans le p ièg e ,
& on ne put les tuer qu’à coups d’arquebufe :
Chasses.
•en expirant, ils firent un cri de douleur qui
reffembloit au mugiffement d’ un buffle.
Zerenghi a donné lés proportions d’ un de ce«
hÿppopothames y fa longueur prife de la lèvre
fupérieure , jufqu’ à la naiffance de la queue ,
étoit de onze pieds deux pouces : la groffeur
de fon corps en circonférence de dix pieds , 8c
la hauteur de quatre pieds cinq pouces. S a queue
avoit onze pouces quatre lignes de lo n g , 8c un
pied de circonférence à fon origine.
La peau de Y hyppopotkjme eft impénétrable , fi
on ne la iàiffe long-tems tremper .dans l ’eau , Zù
quand elle eft deflechée on ne peut la percer
en entier d’ un coup d’arquebufe : les Egyptiens
fe fervent de cette peau, pour faire des boucliers.
Sa gueule eft d’une grandeur énorme, 8c fa
queue qui a quelques rapports, avec celle d e là
tortue , eft a aplatie depuis le milieu jufqu’ au
bout.
La tête de Vkyppopothame ordinaire a jufqu’ à
cinq pieds huit pouces de circonférei c e , & la
! gueule ouverte a alors un pied fix pouces 8c
quatre lignes de largeur : cette gueule, dont la
forme eft quarrée:, eft garnie de quarante-quatre
dents , d’une fubfiance fi dure , qu’ elles font leu
quand on les frappe fur le fer.
U kyppopothame ne produit qu’un petit , il vit
de poiflon, de crocodiles , 8c de cadavres.
Il eft à remarquer que Y hyppopo-ikamc, dont
Zerenghi fait la defeription , étoit une femelle :
le mâle doit au moins avoir un tiers de hauteur
8c de groffeur de plus. Avec d’auffi puiiTantes
armes 8c une taille auffi prodigieufe , ce quadru-
• pède pourroit devenir le plus redoutable des
animaux : mais ordinairement il n’attaque point
les hommes, il eft fi lent à la courfe qu’il ne
peut atteindre aucun quadrupède , il nage beaucoup
plus vite qu’il ne court 5 & fa voracité ne
ftmble fatale qu’ à des animaux deftruéteurs, tels
que le crocodile. 11 prend la fuite lorfqu’ on va
à fa chaffe , 8c fi Ton vient à le bleffer, il s’ irrite
, fe retourne avec fureur , fe lance contre
les barques , les faifit avec les dents , en enlève
fouvent des pièces , 8c quelquefois les fubmerge.
Quand les nègres vont à la pêche dans leurs
canots , loin d’attaquer les hÿppopothames , ils
leur jettent du poiffon , 8c alors ces animaux fe
retirent fans les troubler.
Uhyppopctkame fe trouve dans le N i l , dans le
Sénégal, fur le Zaire , fur la Zambra 8c dans
plufieurs lacs d’Afrique ; il femble que le climat
K k