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T70Î.T cela. lendemain ce Prince fe rendit chezi
J' janvier» Monfieur le Réfident Hulft, au fortir de quelques
autres endroits. Ce Miniftre me fit l ’honneur
de m’y in v i t e r , après avoir parlé de moy
à Sa Ma je f té, à la recommandation de Mon-,
fleur y'ruitjèn, Bourguemaître ôc Confei ller de
la v i l le d’Amfterdam. On me plaça dans une
chambre où le Cza r devoit pafler. Le h azard
y conduifit le Knèes ou Prince de Troebetskooy ,
qui ne me connoiflant pas , ôc vo y an t bien,
que j ’étois Etranger , me demanda en Italien
ii j ’entendois cet te langue. Je lui répondis
qu’o ü y , dont il parut fort fa t is fa i t , ôc m’entret
int allez long- tems fur le fujet de l ’Italie,
Sc de plufieurs autres Païs , où il avoit été,
auf lb bienque moy. l i e n alla rendre compte
à Sa Majefté , qui eut la curiofité de venir ,
L’Auteur a v e c toute fa fu i te , au lieu où j ’étois. Comparé
du me j e ne J’attendois pas f î - tôt , je fus un peu
interdi t ; mais m’étant remis je m’addreflay à
lui avec un très-profond refpeéi:. Ce Prince
en parut furpris , ôc me demanda en Hollan-
dois , hoe njwetgy rtjruie ik ben ? en boe komt gy my
te kennen? „ Comment fçavez-vous qui je fuis?
„ ôc comment me connoiffez-vous ? Je répondis
que j ’ avois vu fon portrait à Londres,
chez le Ch ev a lier Kneller s ôc qu’ il avoit fait
trop d’ impreflion fur mon efprit pour ne le
pas reconnoître. Comme il fembla n etre pas
DE C o R H E I IL 'E LE B r ü Y N . €9
trop fatisfait de cette réponfe, j ’ajoutay que
j ’avois eu , outre cela , l’honneur de le v o ir
fortir de la Cour , comme i l alloit chez M. .
Brants ; dont il parut plus ’content* Il me demanda
de quelle V i l le j ’étois ; quels étoient
mes parents ; ôc s'ils v iv o ien t encore , ôc fi
j ’avois des freres ôc des foeurs. A y an t répondu
à tout cela , il me fit plufieurs queftions fur
mon premier v o y a g e , ôc me demanda en
quelle année je l ’avois entrepris ; combien j ’y
avois employé de tems ; de quelle maniéré je
J’avois fait ; ôc comment j ’en étois revenu.
Ce Prince me parla enfuite de l ’Egypte , du
N i l ôc du Grand Caire ; de fon étendue ôc de
fes bâtiments. Il me demanda en quel état fe
trouvoient les quartiers détachez de l ’ancien
Ca ire ; il me parla aufli d’ Alexandrie ôc de
plufieurs autres lieux , ajoutant â cela qu’il
n ’ ignoroi t pas qu’ il y avoit un autre endroit
nommé Alexandret te. Je répondis que cet te
derniere Place fervoit de Port à A l e p , ôc lui
dis-à quelle diftance elle en étoit. Le Czar
me fit toutes ces queftions en Ho l la ad o is , ôc
voulut que je continuafle à parler de même,
difant qu’il m ’entendoit très - bien. Il parut
bien qu’ il d i f o i t v r a y , puis qu’il expliqua aux
Seigneurs Ruifiens qui l’accompagnoient tout
ce quéje lui avois di t , avec une exadtitude,
dont le Réfident ôc les autres Hollandois furent
l y o t f
. J a n v i e r .