2.8 V o y a g e s
1701. maniéré ils les furprennent. Ils s’a v anc ent
ji-Sepiemb. |a g l a c e ^ qUj s’é tend quelquefois en mer
à une demi- lieuë de terre , armez d’un bâton
g a rn y d’un harpon , attaché à une corde d’environ
douze brades de long ; 8c auifi-tôt qu’ils
apperçoivent ces animaux , ils fe g l i i fen t fu r
le v e n t r e , aufli près d’eux qu’ il eft poflîble,
dansle tems qu’ ils s’a c couplent , 8c s’arrêtent
d e s .q u’ ils trouvent qu’ ils s’ apperçoivent de
leur mouvement. Enfuite ils s’en rapprochent
e n c o r e , 8c Iorfqu’ ils en font à p o r té e , ils leur
lancent leurs harpons , dont ces animaux fe
fentant atteints fe je t tent à l’eau. Alors le. Sa-
moïede file la c o rd e , q u ’il tient attachée à fa
c e in ture , jufqu’à c e q u e l ’animal b le f fé ,n ’en
pouvant plus, tombe entrefies mains. Quelquefois
cet animal fe fentant blelfé , par la douleur
que lui caufie l ’eau falée , s’élance fur la
g l a c e , où il eft percé de coups. Sa chair fer t
de nourriture, & lapeau de v ê temen tau chaf-
Dsnger de feur , qui en vend l ’hurle. Il arrive cependant
c e t te chai- auqj ^ que ce chien marin percé s’élance dans
l ’eau ave c tant de v iolence , qu’ il entraîne
après lui le pauvre chaffeur , qui ne pouvant
fe débarraffer affez - tôt de la corde , qu’ il a
autour du co rps , périt miférablement . Ils fe
fervent à peu près du même ftratagème pour
prendre les Ren n e s , fe gliffant,, couverts de
leurs p e au x , 8c fans être re con n us ,en t re ceux
d e C o r n e i l l e l e B r u y n . t p
iqüi font a p p r iv o i fe z , puis s’approchant des
fau v a g e s , ils les percent de leurs dards : mais
.il faut qu’ ils fe tiennent fous l è v e n t , parce
qu’autrement ces animaux, qui ont l’odorat
admirable , ne manqueroient pas de les découv
r ir , 8c ainfi ils parviennent à leur but 8c
.font de bonnes prifes..
J’appris ces circonftances de la femme du
Samo ïed e , qui accompagna fon m a r y , lors
que je fis fon portrait. C ’étoit la plus jolie 8c
la plus agréable de toutes celles que j ’ay vùë-s
parmy eux. Je tâchay aufli de me mettre bien
dans fon efprit , pour apprendre d’elle ce
que je fouhaitois favoir d’une nation , dont
les moeurs 8c les coutumes font fi différentes
de celles des autres peuples. Rien n’y co n t r i bua
davantage qu’une bonne provif ion d ’eau-
de - v ie que j ’a v o i s , 8c dont les femmes de c e
païs-là fe faoulent comme les h omme s , iuf-
qu’à tomber par terre.. C e la ne manqua pas
auifi d’arriver à c e l l e - c y , dont le marypenfa.
fe pâmer de rire en la v o y a n t . Elle fe releva
p our tan t , 8c fe mit à pleurer amèrement , s'étant
reffouvenuë en ce moment , qu’elle n ’a-
vo i t point d’enfants-, 8c q u e l le en avoit perdu
quatre , à ce que me dit la maîtreffe de la
maifonvréflexions qu’ern fait quelquefois dans
la boiffon. Difcourant un jour a v e c elle fur.
le chapitre des enfaiïts , elle m ’apprit leur
maniéré
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