
concilier la faveur de cette puissance; la moindre tentative
d’extension te rrito ria le , de sa part, serait semée de périls.
Tout ce qui.se passe à Hayel est inévitablement connu tôt ou
ta rd à Bagdad, à Médine et même à Damas; mais les nouvelles
d’Arabie franchissent rarement les frontières mahométanes,
et encore le gouvernement et les fonctionnaires sont-ils-à peu
près les seuls auxquels elles parviennent; les pachas en apprenn
ent quelque chose,la masse des habitants un peu moins;.quant
aux Européens, ce sont les plus mal renseignés. .Pour mon
compte, pendant mon long séjour en Orient, j ’ai recueilli.bien
peu de données sur l’Arabie centrale dont 1 exactitude ait été
confirmée surplac e par les ¡faits.
L ’habile et prudent Télal fait re te n tir .chaque .vendredi dans
les p rières publiques !e nom du sultan avec son cortège .de titre s
insignifiants et sonores; il déclare en même temps qu’il est ¡son
vice-roi et qu’il tire de lui toute son autorité-Ce n’est pas que. le
tré so r de Constantinople reçoive du Djébel-Shomer un seul para,
ni que, de toute l ’étendue des domaines de Télal, il parte jam ais
un.soldat pour .grossir l’armée tu rq u e . Mais il n ’est permis de
p a rle r qu’en termes respectueux ¡d’Abdel-Aziz, que l’on désigne
toujours sous le nom de sultan ou de maître ; ¡et si les-Wahabites
le tra ite n t d ’infidèle.et les Shomérites de mulet, : ces propos, g r a cieux
ne peuvent être .tenus que .dans l’intimité. Un officier
tu r c à son retour du pèlerinage passe-toi par Hayel,ou traverse-
t-il,cette ville.pour se rendre à Médine, il n ’entend que paroles
courtoises, protestations de fidélité ..Enfin, si Télal s’empare ¡de
Kheybar et.de Teyma qui se trouvent en deçà des limites imaginaires
de la ¡Porte, s’il attaque e t soume t les trib u s occidentales
de Médain-Saleh à Kérak, il fait tout cela pour.servir S a
Majesté ottomane et assurer, la tranquillité de la frontière tu r que..
S’il nomme des gouverneurs dans laprovince de Djowf sans
en demander l’autorisation à Constantinople, s’il envoie des
expéditions sous,les .murs de Meshid-Ali, c’est au nom d’Ahdel-
Aziz, et uniquement.dans l’in té rê t du.sultan.
Étroitement surveillé p a r des rivaux.et des ennemis, ayant à
diriger sa. barque fragile, entre Gharybde et Scylla, c est-.à-dire
entre les Wahabites et les .Turcs, Télal doit songer à se m énag
e r des alliés puissants,, capables de le secourir à l ’heure d u
danger, que malgré sa prudence.il ne peut espérer d’éc arte r
longtemps encore. Il refuse sagement de s’appuyer sur les Européens,
l’expérience lui ayant appris que leur intervention, est
la plupart du temps inutile ou même dangereuse. Il entretient
avecd’Égypte et la Perse des relations étroites et fréquentes ; la
première lui ¡prêterait aubesoin une assistance énergique, e t.il
tire .de ses rapports avec la seconde de grands avantages commerciaux.
La conduite de Télal envers ses sujets est en général propre ¡a
lui concilier leur obéissance et leur attachement. ¡Une fois p a r
jour, souvent même deux fois, il donne audience à la foule,
écoute avec patience les dépositions, les procès-verbaux les
plus minutieux et résout lui-même les questions avec un rare
bons sens. Quant aux Bédouins, qui sont assez nombreux dans
ses États, il rachète la rigueur avec ¡laquelle il les oblige, à re s pecter
les lois et à payer le trib u t, par une généreuse hospitalité
que les nomàdesme trouveraient nulle.part.ailleurs en Arabie.
Son palais leur est toujours o u v e rt; j ’en ai plus d’une fois
compté ju sq u ’à deux cents dans la salle où les hôtes.prenaient
le repas du soir. Ils reçoivent en outre de riches présents
d’armes et de vêtements. Un Européen s’imaginerait difficilement
combien un prince asiatique s e rend populaire p a r de
semblables libéralités. La population sédentaire chérit en Télal
le roi qui donne au pays la tranquillité intérieure, la gloire militaire,
un commerce florissant, des agrandissements de te r r itoire.
La peine capitale est rarement infligée dans le Djebel-Shomer ;
la prison ou l’exil punissent les criminels d’État ; les.meurtriers
eux-mêmes peuvent racheter leur vie en payant le prix du sang
à la famille de leu r victime, et souvent le trésor royal vient en
aide à ceux que la pauvreté p riv e de ce moyen de salut.« Enfin,
quand u n homme est m is à m o rt, la décapitation, selon la coutume
arabe, est le seul supplice auquel il soit condamné,.car
les barba re s tortures en usage dans la Turquie et ¡lai Perse1sont
ici l’objetde la-réprobation générale.Le Nedjed seul se rapproche
de la cruauté orthodoxe des vrais 'Musulmans. Les Arabes néanmoins1
appliquent fréquemment la peine du fouet ; c est le c h â timent
ordinaire du vol, du blasphème, des rixes e t des querelles.
'Télal se montre d’une extrême indulgence envers ses-servi