
d’éléganee irrégulière, de fraîcheur et de jeunesse qui nous
avait frappés dans les villages voisins. Mais c e la it une ville
complétementformée, dont l’enceinte aurait pu renfermer trois
cents mille habitants, si les maisons avaient été aussi rap p ro chées
que celles de Paris ou de Vienne. En réalité, la population
n’excède pas vingt mille âmes, grâce aux immenses jardins, aux
plantations, aux terrains vacants qui couvrent la plus grande
partie du so l; le palais de Télal, le parc, les bâtiments qui en
dépendent, occupent à eux seuls u n dixième de la superficie totale.
Une haute tour, de construction récente e t de forme ovale,
bâtie au milieu de cet édifice, frappe de loin les regards et an nonce
la demeure du souverain. La plaine qui entoure Haye
est p arsemée de jolies villas, appartenant à de riches habitants
ou aux membres de la famille royale. Plus loin, au V ^ ie s
montagnes, on apercevait les riants bosquets de Kefar, dA
wah e t de plusieurs autres villages. Les murailles de la cite, ses
monuments, ses maisons resplendissaient sous les rayons de
pourpre et d’or du soleil couchant: c’e ta itu n spectacle de pai
et d’abondance, délicieux à contempler, bien t a f l g & A
la richesse de végétation que nous avions admiree d a n l a vaHée
du Diovvf. Plusieurs tentes de Bédouins étaient dressees auprès
des rempa rts; des cavaliers, des piétons, des chameaux des
ânes, des paysans, des enfants, des femmes, se pressaient aux
portes de la ville, formant le tableau le plus pittoresque et le
P lNouSTraversons la plaine et nous entrons dans la ville. Nos
montures, fatiguées et effrayées, refusaient d’avancer au milieu
de la ru e encombrée de monde; nous les décidons, non sans
neine à continuer leu r ro u te e t nous arrivons sur une grande
place ou cour extérieure, située devant le palais. Elle était rem plie
d’oisifs,car le jo u r touchant à salin, chacun avait terminé ses
affaires. Nous faisons agenouiller nos chameauxà coté d u n e quaran
ta in e d’autres, puis nous allons reposer nos membres fatig
u é s s u r u n b a n c , en face du porche et nous attendons.
Un proverhe arabe p ré ten d que le soir est 1 heure des accidents
fâcheux ; avant de vous apprendre si l’événement lui donna ra ison,
permettez-nous, cher le c teu r, de je te r un regard su r les
monuments qui nous en to u ren t, monuments étranges pour un
Européen, m ais to u t à fait en harmonie avec le génie arabe. G est
d’abord le palais de Télal, édifice long au moins de quatre à cinq
cents pieds, haut de trente, et percé près de la to itu re de meurtrières
plutôt que de fenêtres; ses murailles, construites en pisé,
protégées p a r des bastions demi-circulaires, ont une épaisseur
énorme ; la porte principale est, selon l’usage du pays, flanquée
de tours carrées ; des bancs de pierre adossés à l’ombre contre
le rempart, invitent le promeneur au repos ; enfin, le milieu de
la façade est occupé par une sorte de trône, plate-forme élevée
où se place le monarque quand il donne audience à ses sujets.
Le palais de Metaab, second frère du ro i, est aussi compris dans
ce vaste édifice.
Des magasins et de petits appartements séparés bordent l ’autre
côté de la cour; les premiers servent de dépôt pour les marchandises
appartenant à l’Etat, les seconds sont destinés aux hôtes
de Télal, car nul étranger ne doit résider dans l’in té rieu r du
château; plus loin, faisant face à la résidence de Metaab, s’élève
la grande mosquée ou Djamia ; non loin de là, nous apercevons
le marché, que nous visiterons demain, puis la somptueuse demeure
de Zamil, premier ministre et gran d trésorie r du roi. Je
ne prétends pas qu’il soit très-constitutionnel de confier au
même homme d’Ëtat ces importantes fonctions, mais en Arabie,
elles ne semblent pas s’exclure, e t le cumul a l’avantage d’économiser
les deniers publics, ce qui est fort important dans u n pays
pauvre. Une haute porte ferme la cour e t conduit à la grande
rue, qui traverse la ville dans toute sa largeur. A l’au tre b o u t de
la place se trouve la seconde porte, par laquelle nous sommes
en tré s; elle ouvre su r une large ru e aboutissant dans la plaine.
Tout auprès sont les habitations des principaux dignitaires du
palais, et enfin une porte basse « l’orgueil qui affecte l ’humilité »
donne accès dans les spacieux jardins d’Obeyd, oncle du roi,
dont nous avons déjà parlé en racontant la conquête du Djowf ;
nous n’en dirons rien maintenant, mais plus ta rd, nos relations
avec lui ne deviendront que trop fréquentes.
Près du porche, assis su r une plate-forme de p ie rre , se tenaient
plusieurs officiers subalternes vêtus de longues robes blanches
et de manteaux no irs; les uns portaient l’épée à poignée d’argent,
les autres u n bâton, symbole de fonctions plus pacifiques, e t qui
ressemblait fort à la verge de nos bedeaux. Les bancs sont occupés
p ar une foule de riches habitants qui ont quitté leurs bou