
téral les vagues indications fournies sur les contrées voisines
p a r les Arabes, les Égyptiens ou les Syriens. L’emploi fréquent
des synonymes et des périphrases est pour l’explorateur une
source d’erreu rs fréquentes; c’est seulement en questionnant
beaucoup d’individus, en confrontant les renseignements r e cueillis
dans un pays avec ceux qui ont été donnés dans un
autre, que l’on peut obtenir des informations à peu près exactes;
encore vaut-il beaucoup mieux, si cela est possible, en vérifier
l ’exactitude p a r ses p ropres yeux. Ce qu’il y a de confus dans les
réponses des Arabes doit être attrib u é non au désir de tromper,
mais au défaut de précision du langage, circonstance que cependant
ils mettent parfois malicieusement à profit; ainsi aucun
Nedjéen ne consentirait à donner su r son pays des détails
trop précis, aucun surtout ne voudrait y laisser pénétrer un
Européen, s’il pouvait l’empêcher.
Le mot Toweyk est le diminutif de Towk (guirlande, enchevêtrement)
; il signifie p a r conséquent « petite guirlande. » Les
Arabes ont une affection singulière pour les diminutifs ; ils les
composent en remplaçant la première voyelle p a r le son o, la
seconde p a r une lettre qui, dans notre langue, correspondrait à-
la diphtongue ey; ainsi, de Kelb, chien, ils font Koleyb, petit chien,
de radjel homme, rodjeyl, petit homme, etc. Les Nedjéens emploient
cette forme à tout propos, souvent même hors de propos.
La familiarité, l’affection, le mépris, l’estime, leu r servent
to u r à to u r de prétexte pour modifier les noms; le u r seul caprice
au besoin est une raison suffisante. Le Towk a , paraît-il,
été transformé en Toweyk à cause de l’admiration passionnée
q u ’il inspire aux habitants ; l’idée radicale, celle de guirlande,
s’applique du reste assez heureusement à ces montagnes, en
forme de croissant, qui offrent aux regards un étrange labyrinthe
de vallées, de précipices, d’anfractuosités, de brusques saillies.
La plus grande partie du plateau nommé Toweyk ou Nedjed
est de formation calcaire, mais à Test e t au sud, on rencontre
quelques roches de g ran it; le basalte, a u ta n t que j ’ai pu en ju ger,
n’existe nulle p a r t, e t sous ce rapport le Toweyk diffère
essentiellement de la chaîne du Shomer. Dans cette dernière,
dominent le granit rouge et le basalte, qui forment des pics et
des sierras de l ’aspect le plus fantastique ; ici, ce sont des p la teaux
blanchâtres, superposés comme les marches d’un escalier ;
le bord extrême est presque toujours abrupte; il s’élève, comme
une muraille gigantesque, à une h au teu r de cinq ou six cents
pieds ; puis vient un plateau d’une étendue variable, suivi d’un
nouveau mur calcaire, que surmonte u n second p la te a u ; un
troisième couronne parfois celui-ci. Ces montagnes renferment
d’excellents pâturages, qui restent verts pendant toute l’année^
des arbres, parfois isolés, parfois réunis en groupes, accidentent
le paysage ; ce sont d’abord les sidr, ou selon le dialecte
nedjéen, les sedeyr, qui donnent leu r nom à une vaste province;
les markh, avec leurs larges branches semblables à celle du
chêne ; puis les talh dont le tronc épineux porte des rameaux
touffus, capricieusement entrelacés. L’eau paraît fort ra re ;
j ’aperçus plusieurs bassins qui, au printemps, avaient dû former
de petits lacs, mais ils étaient complètement desséchés; quant
aux sources, je n ’en rencontrai qu’une seule.
Les plateaux sont coupés par des vallées innombrables, les
unes très-larges, les autres étroites et immenses, presque toutes
fort escarpées. C’est au milieu de ces excavations que se concentrent
la vie et la richesse du pays ; des ja rdins, des villages,
des champs de culture, cachés à la vue du voyageur qui p a rcourt
les sommets a rid e s , apparaissent to u t à coup à ses re gards
charmés, quand une déchirure du chemin élargit la perspective.
On dirait que deux climats différents, l’un sauvage e t
désolé, l’autre, riant et fertile, sont en lutte l’u n contre l’autre.
Le sol des vallons est fort lég e r; il renferme de la marne, du
sable et des cailloux que d’impétueux to rren ts font descendre
du sommet des montagnes ; car la chaîne du Toweyk est sillonnée
p a r de nombreux courants qui se réunissent en hiver
pour se précipiter avec fracas dans les ravines profondes. Les
étangs et les lacs auxquels ils ont donné naissance d u ren t to u t
le printemps; mais la plus grande partie des eaux absorbée
par le sol, forme les inépuisables réservoirs qui alimentent
les puits pendant les chaleurs de Tété; quelques ruisseaux
limpides prennent, il est vrai, leur source sur le versant oriental
de la montagne, arrosent des plaines, en se dirigeant vers
les côtes de la mer. Malheureusement ils se perdent bientôt,
à l’ouest dans le Nefoud, à Test et au sud dans le Dahna,
dont les sables profonds engloutiraient sans peine le Rhin ou
l ’Euphrate.Les géographes qui ont doté l’Arabie de fleuves allant