
ne pas les adopter. Les troisièmes enfin, c’est-à-dire les événements
légendaires transmis p a r les Arabes, sont toujours précédés
d’une explication qui en indique l’origine, et chacun p eut
ju g e r du degré de créance q u’ils méritent. Le seul point q u ’il m ’ait
paru utile d’établir, quand je cite des autorités de cette nature , c’est
de savoir si le n a rra te u r appartient au pays, et s’il a été témoin
oculaire des faits qu’il raconte. Mais, en général, j ’ai supprimé
les noms propres, car il ne m’a pas semblé nécessaire de remplir
mes pages du catalogue fatigant des Mohammed, des Hazan,
des Ali, énumération qui, en Europe, se ra it une faible garantie
de véracité.
Je n ’ai pas non plus consigné au bas de chaque page les noms
des auteurs orientaux d o n tje me suis inspiré; si quelque orientaliste
désire les connaître, je mentionnerai parmi les principaux
ouvrages que j ’ai eu l’occasion et le loisir de consulter,
YHamasah d’Abou-Temmam, le Mollakat d’Amroul-Keys, les
oeuvres d’Aboul-Feda, de Makrizi, d’Ebn-K.hallikan, d’Ebn-Khal-
doun, de Makari, les proverbes de Meydani, le fameux Alf-Leyl-
Leylah, ou les Mille etune nuits (livre dans lequelsouvent le poète
donne à entendre plus q u ’il ne dit en effet), les Légendes d'Anta-
rah, Benou-Hilal, et du vaillant Zir; les poèmes ou « divans »
d’Omr-ebn-Abi-Rabiah, de D jerir, Aktal, Ferazdak, El-Moghrebi,
Motenebbi, Ebn-Farid, Aboul-Ola; les Commentaires du Coran par
Beydawi, Zama-Khshari, Djelal-ed-Din, les écrits ascétiques
d’El-Ghazali, les traités de Mohid-Din, et d’autres auteurs dont ii
ne reste que des fragments ; enfin plusieurs collections de manuscrits
anonymes su r l’histoire et la morale que m’avaient confiés
des amis de Syrie et d’Égypte, et qui ont été détruits ou
volés par les Druses lorsque en 1860, ils saccagèrent Zahleh et
b rûlèrent ma maison. Je renvoie donc aux sources indiquées plus
haut les savants qui voudraient vérifier les citations, les faits ou
les théories que j ’ai tirés de ces ouvrages.
J ’avoue avoir lu fort peu les relations des voyageurs européens
qui ont visité la Péninsule ou les contrées voisines, non faute
d ’éprouver le désir de les connaître, mais le temps m’a manqué.
Le style calme et impartial de Niebuhr m’a cependant engagé à
PRÉFACE. 5
donner une attention spéciale à son Voyage en Arabie, et je dois
rendre pleine justice à la grande véracité, à l’esprit d’observation
de l ’éminent explorateur. 11 m’a semblé que su r certains points
il s’était légèrement trompé, et j ’ai relevé des e rreu rs avec toute
la déférence due à une telle autorité, laissant au lecteur le soin
de prononcer entre les assertions contradictoires qui lui sont
soumises.
Depuis mon retour en Angleterre, la Société Royale de Géographie
a bien voulu mettre à ma disposition les Mémoires du
capitaine Welsted e t la relation de M. Wallin ; autant que j ’en
ai pu j uger, leurs observations confirment les miennes ; mais
leurs études ayant été purement topographiques, ils se sont occupés
fort peu des hommes et des événements ; c’est cette la cune
que je désire aujourd’hui combler.
Je n’ai pas assez étudié les voyages de Pococke, Burckhardt et
autres voyageurs pour savoir si je dois confirmer ou contredire
leurs récits. Je crois que l’ouvrage de Burckhardt, comme,
du reste, beaucoup d’autres, renferme une appréciation fausse
des Bédouins et de leu r manière de vivre; je l’accuserais aussi
de man q u era la fois d’exactitude et de clarté quand il retrace la
condition sociale du pays, ou q u ’il dresse un tableau statistique.
Peu d’auteurs, selon moi, sont arrivés à se faire une idée ju s te
des nomades de l’Arabie, bien moins encore ont-ils pu ju g e r de
la population sédentaire ; on a trè s-m a l compris ju sq u ’ici l’influence
qu’exerce sur une société sa division en clans ou tribus ;
on ne s’est rendu compte ni des éléments de force du pays, ni
des principes de désorganisation qui peuvent causer sa ru in e .
Les vues d’ensemble sont souvent trop vagues, les détails isolés,
partiels et insuffisants. Néanmoins, considérant la difficulté de
la tâche, nous sommes beaucoup plus disposés à loue r les voyageurs
européens de ce qu’ils ont fait, qu’à les blâmer de ce qu’ils
ont omis.
Mais si les travaux de la génération passée m’ont été d’un
faible secours, j ’ai trouvé une aide puissante dans l’érudition et
les conseils de plusieurs orientalistes distingués que j ’ai le bon heur
de compter au nombre de mes amis. Je dois, sous ce rap