
nous rendre dans sa demeure. Il nous fallut marcher deux
heures encore, gravir, puis redescendre des collines de sable
fort escarpées, sur lesquelles le soleil dardait ses rayons b rû lants.
Jamais je n’avais été si fatigué que quand j ’arrivai, couvert
de sueur et de poussière, à la porte de notre guide.
Là, dans une agréable e t commode habitation, assez semblable
à celle des paysans de l ’Italie méridionale, vivait Moubarek avec
ses frères et le reste de sa famille. La maison était entourée
d’un joli ja rd in , rafraîchi p ar une citerne et rempli de cotonniers,
d’arbustes en fleurs, de dattiers chargés de fruits. Auprès
de la citerne s’élevait un berceau, protégé contre le soleil par
l’épais feuillage d’une belle vigne. Notre hôte, loin de suivre le
maladroit usage des Druses du Liban, — qui commencent par
demander au voyageur ce qu’il désire e t mettent sa discrétion
à une fâcheuse épreuve, — apporta des nattes et des coussins,
et plaça devant nous un plat de dattes succulentes, produit de
son verger. Puis tous les membres de la famille, jeunes <et
vieux, vinrent nous souhaiter la bienvenue, à l’exception cependant
des femmes auxquelles l’étiquette ne permet pas une telle
hardiesse. Bien que le beau sexe ne soit pas en Arabie, comme
dans les autres pays mahométans, condamné à une réclusion
complète, qu’il puisse avoir sa p art d’activité, acheter, vendre,
et même parfois marcher sous les drapeaux, les femmes,
dans la Péninsule, sont reléguées au second p la n , et il
n’existe pas, entre elles et les hommes, ces relations de société
qui distinguent l’Europe. Elles ne s’asseoient pas à la table de
leurs frères ou de leurs maris, ne partagent pas leurs plaisirs,
et surtout les convenances leur interdisent de s’entretenir avec
les hôtes qui sont admis dans la maison. Mais si l’étranger
séjourne longtemps et devient en quelque sorte membre de la
famille, elles finissent p a r se montrer plus sociables. Il va sans
dire, que dans les étroites habitations des pauvres, hommes et
femmes vivent en commun, la misère ayant étendu su r eux son
inflexible niveau. Le long voile dont s’enveloppent les musulmanes,
quoiqu’il soit d’un usage général, n’est pas strictement
obligatoire en Arabie; les Omanites même le portent fort ra re ment.
Quant aux femmes des Bédouins, elles ne jugent jamais
à propos de couvrir leu r visage rechigné, et pourtant, oe s e ra it
là une coquetterie bien entendue.'Ghe-z les Wahabites 'séuls,¡ie
voile et le harem sont encore en pleine faveur, ces fanatiques
sectaires ayant étouffé l ’esprit d’indépendance naturel aux
Arabes pour se courber sous la servitude de l’islamisme.
Notre après-midi et notre soirée s’écoulèrent agréablement au
milieu des Moubarek; la nuit venue, nous nous étendîmes sous
la tonnelle pour reposer, e t le lendemain, nous reprîmes gaiement
notre route. Le groupe d’habitations qui composent le
faubourg de Doweyrah, où se trouvait la maison de notre guide,
est éloigné de Bereydah d’une lieue à peine ; cependant les buissons
d’ithels nous cachaient entièrement les remparts et les
tours de la ville. Nous avions alors l’intention de ne faire qu’une
courte halte à Bereydah, puis de nous re n d re , sans perdre de
teihps, au Nedjed; mais l’homme propose et Dieu dispose, nous
devions apprendre, à nos dépens, qu’en dépit de toutes les p ré cautions
et de toutes les combinaisons imaginables, la porte de
la forteresse wahabite s’ouvre difficilement aux étrangers.
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