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confondre , avec les véritables musiciens , les personnes q u i, par
routine, ont une grande facilité pour jouer d’un instrument. Souvent
on a l ’air de me dire que je dois trouver chez certaines personnes ,
surtout chez certaines dames, un organe de la musique très-dé veloppé;
et je ne leur trouve que de la routine pour l’exécutiou. De semblables
artistes se trahissent par le genre même de leur jeu qui est bien plutôt
l’ouvrage de leurs doigts que de leur esprit. Leur physionomie n’exprime
nullement ce laisser-aller, cette douce volupté qui pénètrent
lame toute entière du vrai musicien.
Jusqu’ici, j’ai vu l’organe du sens des rapports des tons très-déve-
loppé chez tous les musiciens créateurs dans leur art; il affecte deux
formes particulières. Ou bien, l ’angle extérieur du front, placé immédiatement
au-dessus de l’angle externe de l’oeil, s’élargit considérablement
vers les tempes ; de manière que dans ce cas les parties latérales
du front débordent l’angle externe de l’oeil; alors, toute la région
frontale au-dessus de l’angle externe de l’oeil est, jusqu’à la moitié
de la hauteur du front , considérablement bombée. Ou bien , il
s’élève, immédiatement au-dessus de l’angle externe de l’oeil, une proéminence
en forme de pyramide , dqnt la base est appuyée au-dessus de
l’oeil, et dont la pointe s’étend sur le bord extérieur antérieur du front,
jusqu’à la moitié de sa hauteur. Delà, il arrive que les musiciens ont
la partie inférieure du front ou très-large ou carrée. Le célèbre dessinateur
d’animaux Tischbein , à Hambourg , sans penser à l’existence
d’un organe de la musique, avoit fait la même observation sur les
têtes des grands musiciens. Ils ont des fronts de boeuf, nous dit-il.
Souvent les fronts des musiciens paroissent fortement enflés au-dessus
de l’angle externe de l’oeil.
Mozart, père et fils, Michel Haydn, M. Paër, MM. les frères Nader-
mann, Dussek, PI. LX X X V I, fîg. 1 ; Marchesi, fig. 2 ; Viotti, fig. 3;
Blasius , Daleyrac, Delavigne, Zumsteeg , Crescentini, servent d’exemples
de la première conformation. MM, Bethoven, Lafont, Neukoin ,
Joseph. Haydn, J.-J. Bousseau, Benucci, fig. 4 j Crétry, fig. 5 ; et
Gluck , fig. 6 , de la seconde.
Je n’ai encore aucune idée de la différence du talent qui résulte de
cette différence de conformation. Il est cependant à présumer qu’un
musicien qui seroit en même temps instruit dans l’organologie, décou-
vriroit une nuance du talent de la musique; ce qu’il y a de certain
c’est que l ’une ou l’autre de ces deux conformations se rencontre
constamment chez toutes les personnes douées d’un grand génie
musical.
Je connois personnellement un grand nombre de musiciens célèbres
soit pour le chant, soit pour la composition; j ’ai examiné avec soin
les dames Mara , Sessi, Canabich, Schwalz, G ail, Bigot, Catalani,
Barilli, Bertinotti , Voitus, Bills, Albert, etc., etc. MM. Rrebs,
Himmel , Beichard, Gloegle, Gara, Dulong, Boyeldieu, etc., etc.;
chez tous, le développement de la partie cérébrale indiquée est tellement
saillant que, si on pouvoit ranger tous leurs bustes dans une
ligne, les observateurs les plus médiocres ne manqueroient pas de se
convaincre que c’est-là la marque constante et caractéristique du génie
de la musique.
Je n’ai jamais non plus rencontré une exception dans les portraits ou
bustes de grands compositeurs de musique, dont il ne nous reste plus
que leurs ouvrages. Qu’on examine les bustes de Haydn, de Gluck, de
Mozart, deGrétry,de Lulli,deSacchini, deBameau , de Philidor, etc.
A Vienne, un ecclésiastique vint me trouver; et sans vouloir se
nommer, il me pria de lui donner quelques éclaircissemens sur l’organologie.
Après que je lui en eus exposé les principes généraux, il demanda
à voir quelques organes. Je lui en montrai plusieurs, tant dans
des crânes que dans des plâtres. A l’occasion de l’organe des localités,
je lui dis qu’il en étoit doué à un haut degré, et qu’il devoit aimer beaucoup
les voyages. Il me dit, avec joie, qu’il en étoit effectivement ainsi.
Lorsque j’affirmai qu’il avoit aussi l’organe du sens des nombres et des
mathématiques très-développé, il s’élança de sa chaise, et me dit qu’il
étoit professeur de mathématiques. Cependant, continuai-je, vous vous
seriez distingué davantage dans la musique, surtout dans la théorie;
alors, il me sauta au cou, et me dit qu’il étoit l’abbé Vogler. Lui-même