
avois toujours quelques-uns. Pendant la journée, ils escaladoient les
murs et les maisons pour courir dans les jardins du voisinage. Le soir, ils
rentraient à la maison en toute hâte pour passer la nuit dans une boîte
garnie de'coton. On remarque à leurs crânes deux belles proéminences
ovai.es, placées immédiatement derrière et au-dessus du grand bulbe du
nerf olfactif, et un peu en arrière de l’oeil. L écureuil na pas de sinus
frontaux.
Les lemmings (mus lemmus Lin.'), s’assemblent à certaines époques
en troupes, et en forment d’innombrables à l’approche de l’automne.
Ils sortent, en ordre de bataille, des montagnes, se rendent dans la
plaine, et continuent leur marche en ligne droite, sans se laisser déranger
ni par les obstacles ni par les périls. Cela se conçoit-il, demande
Gceze 1, si ces animaux ne sont pas poussés par un instinct particulier,
s’ils ne sont pas doués de quelques facultés intellectuelles?
En examinant la tête du lemming, on doit être frappé de la cause
intérieure de ce penchant. Sa tête est, sur le devant et immédiatement
derrière les yeux .très-large, renflée et non point rétrécie en pointe
sur le devant, comme celle de la plupart des animaux; voilà pourquoi
le penchant à voyager est absolument irrésistible chez ces animaux;
ils ne sont arrêtés ni par l ’eau ni par le feu : ils franchissent les ruisseaux,
les rivières, les marais, les lacs, quoiqu’il en périsse des milliers :
ceux qui surviventà l ’expédition retournent l’été prochain , et s’établissent
de nouveau dans leurs Alpes.
Comme le sens des localités diffère si singulièrement d’un ipdividu
à l’autre chez les chiens, on peut faire une collection fort instructive de
crânes de ces animaux. Toutes les têtes de chiens que je conserve concourent
à confirmer ma découverte, relativement à l’organe des localités.
Le crâne de la chienne qui n’a jamais pu retenir l’étage où j’étois
logé, est rétréci par devant et sur les côtés. PI. LX X X I , fig. i. Celui
1 Europæische Fauna oder Naturgescliiclite der europæischen Thiere. (C’est-à-
dire Faune européenne, ou Histoire naturelle des animaux de KEurape). Vol. I I ,
p. 268.
de la chienne, au contraire, qui, âgée seulement de quatre mois sut
retrouvef la maison de sa maîtresse de la barrière extérieure où on
l ’avoit perdue, et qui parcourait seule toute la ville sans s’égarer jamais,
est dans la même région très-large et très-bombée, tant latéralement
que vers le haut, même planche , fig. 2. Du vivant de l’animal, j etois
dans le doute si cette proéminence n’étoit pas formée peut-être par les
sinus frontaux; mais en examinant son crâne, je vis que toute la boîte
osseuse étoit remplie par le cerveau, et qu’il n’existoit pas de sinus.
Tous les crânes de chiens sont plus larges ou plus étroits dans la
région indiquée, selon que ces animaux ont le sens des localités plus
ou moins actif.
Après toutes ces preuves qui se confirment chez toutes les espèces
d’animaux et chez tous les individus doués d’un sens de localité très-
actif, pourroit-on douter encore que ce sens ne soit une faculté fondamentale,
dont l’organe est placé dans la région que, d’après des observations
multipliées, je lui ai assignée.
Exposition ultérieure de l’organe du sens de localité et
de sa sphère d’activité chez l’homme.
La faculté de juger les rapports de l’espacé s’étend encore chez l’homme
à dautres objets. Elle lui donne la facilité de s’orienter; elle donne
ce qu’on appelle le coup d’oeil ; elle sert à juger le terrain , à déterminer
la position des armées, et à régler les marches; elle fait choisir à l ’officier
le chemin leplus court, ou le conduit par des détours cachés, au
point qu il doit occuper. Lorsque le général en chef manque du sens
des localités, il a besoin d’un aide-de-camp qui en soit éminemment
doué. C’est ainsi, dit-on, que Villars suppléoit à cette faculté qui man-
quoit à Turenne. J’ai trouvé constamment l’organe du sens des localités
très-développé chez tous les militaires dont on m’a dit qu’ils excelloient
dans l’art de s’orienter. Cette faculté joue, par conséquent, un grand