
coup de respect. Les hommes ont eu , outre ces absurdes divinités
nationales, divers objets particuliers de culte, desquels ils attendoient
une protection individuelle et spéciale. Tels furent les Marmousets de
Laban, les Dieux Pénates chez lesRomains. Dans le royaume d’Issini, l’un
choisit pour son Fétiche un morceau de bois, l’autre les dents d’un chien,
d’un tigre, d’un éléphant. Lesmers furent peuplées deTritons, de Néréides,
de Divinités de différens ordres. Les campagnes le furent de Nymphes,
de Faunes;les forétsde Dryades et d'Hamadryades. Chaque ruisseau,
chaque fontaine, chaque village et chaque ville avoit sa divinité.
Tous s’accordoient à penser que ces divinités exigeoient des honneurs,
quelles s’irritoienl aisément, mais qu’elles s’appaisoient par des sacrifices
sanglans.Labarbariefutpousséepresque partout jusqu a leur immoler des
victimes humaines. Ajoutez à tout cela l’adoration des arbres, les idoles,
des Chinois, le palladium des Troyens, le bouclier sacré des Romains;
la confiance universelle qu’ont les hommes dans les talismans et les
amulettes, dans la divination, dans les songes, dans les oracles, dans la
rencontre de différens objets présentés par le hasard, par exemple, la
rencontre inopinée d’un corps mort, d’un chat, dans le cri des oiseaux
nocturnes, dans le vol des oiseaux, dans les pénitences et les mortifications
de toute espèce.
Ce tableau rapide nous fait assez voir que de l’orient à l’occident,
du nord au midi, on observe non-seulement les mêmes objets d’adoration,
mais à-peu-près la même manière de les honorer et une pratique
constante des mêmes maximes. « La divinité ne s’offre sous les rapports
moraux qui en font l’essence, qu’aux hommes éclairés par une instruction
relevée; mais l’homme grossier sera partout et dans tous les temps
naturellement idolâtre, naturellement adorateur des images , et des
images extraordinaires, parce qu’elles l’arrêtent, le contiennent, le
maîtrisent, parce quelles frappent son esprit beaucoup plus long-temps
encore que ses yeux; parce qu’enfin elles le font penser et réfléchir » .1
Cependant quelque dégradé que l’homme paroisse dans cette con1
Poétique des Arts, par J. F. Sobry, pag.36.
duite, il .mérite peut-être aussi bien notre pitié que notre blâme. Son
ignorance et son penchant naturel à la superstition ont converti en
images sensibles des idées et des vérités abstraites qui sont hors de la
portée de 1 intelligence ordinaire des hommes grossiers, et ont fait
vouer à la créature le culte du au créateur. La pusillanimité a fait a utant
d’idoles qu’il y a d’objets de terreur et de crainte. Mais, l’article essentiel,
qui est le sentiment d’un Être suprême et d’un culte religieux, est
toujours demeuré invariable.
Le soleil honoré d’un culte particulier au Pérou, chez tous les peuples
de l’Amérique, chez le peuple choisi, fut toujours regardé comme
le symbole de Dieu le plus expressif. Dieu leur devenoit sensible en ce
globe qui anime le monde et porte partout une heureuse fécondité. Le
soleil étoit tellementle symbole hiéroglyphique de la divinité chez toutes
les nations, que tous les noms qu’on y donnoit aux dieux du paganisme,
se rapportent au soleil. Il fut le premier des ouvrages de Dieu qui
attira l ’attention des hommes , et dans lequel ils étoient naturellement
entraînés à honorer le souverain maître. Le peuple choisi se tournoit vers
le soleil levant pour adresser ses prières au Très-Haut. L’Ecriture même
se sert de l’expressoin que Dieu a placé son tabernacle dans cet astre.
Comment des nations si différentes de moeurs entre elles, si éloignées
dans leur manière de penser, qui, dans les choses les plus nécessaires
à la-vie, ont conçu des idées si disparates, auroientelles cependant pu
s’accorder sur-l’existence d’un être suprême et sur un culte religieux,
si l’auteur de l’univers n’en eût gravé le sentiment dans les ccéurs de
tous les hommes ; si Dieu n’en avoit pas empreint l’organisation de
l’espèce humaine ?
Malgré ces preuves irrécusables de la généralité de la croyance en
Dieu et du penchant à un culte religieux , on rencontre encore des
hommes qui nient que ces deux sentimens soient innés à l’espèce humaine.
II existe, disent-ils, des peuples chez lesquels on ne découvre pas
la moindre trace de religion, pas la moindre trace d’une idée relative à
une divinité.
Je ne contesterai pas la possibilité du fait. Le climat et le concours