
femmes et les enfans ne trouvant plus une nourriture suffisante ,
l homme est forcé de s’attacher particulièrement à une seule femme, et de
partager avec elle les soins domestiques. C’est là la première origine du
mariage et de la société, qui devient de plus en plus nombreuse. Maintenant
naissent tous les besoins; l’on veut se garantir contre l’inclémence
de l’a ir, et l’on invente l’art de faire des habits et de bâtir des
maisons et des palais. Dës-lors naissent aussi les besoins factices, tous
les désirs, toutes les passions, fruit de l’inégalité des conditions, la
vanité, l’amour des distinctions et de la gloire, l ’ambition, l’avarice,
la guerre, le luxe avec les excès auxquels il sert d’aliment, les lois,
une police, la religion, le goût des émotions vives, la musique, l’éloquence,
la poésie, les spectacles.
Si des causes accidentelles extérieures sont la source de toutes ces
inventions, pourquoi les mêmes causes ne produisent-elles pas les
mêmes effets chez les animaux? Pourquoi le chien ne construit-il pas
de cabane pour se garantir de l’inclémence des saisons ? Pourquoi la
perdrix et le corbeau périssenjt-ils de froid plutôt que d’émigrer comme
l ’hirondelle? Comment se fait-il que chaque animal satisfait ses besoins
d’une manière à lui particulière? que même chaque individu humain
a d’autres besoins, quoique les circonstances extérieures soient à-peu-
près les mêmes pour tous ?
En traitant des forces fondamentales de l’homme et des brutes, j’ai
répondu à ces questions de la manière la plus satisfaisante. La véritable
source de nos arts et de nos sciences, ce sont nos instincts, nos
penchans, nos facultés innées, nos besoins intérieurs.
Qui est-ce qui a inventé la toile de l ’araignée, la cabane du castor,
le nid de la penduline, les cellules de l’abeille, le chant du rossignol?
Qui est-ce qui a donné l’idée de la république des fourmis, de la tactique
des singes, des sentinelles des chamois, des voyages des cicognes,
de la chasse des loups, des provisions du hamster, du mariage de presque
tous les oiseaux, et d'une grande partie des mammifères? Tout
le monde fait dépendre toutes ces choses d’un instinct, d’une impulsion
intérieure, et nullement de circonstances extérieures. La cause
de ces inventions gît donc dans les organes, ou en d’autres termes les
animaux ont reçu de la nature, au moyen des organes, certaines forces
certains penchans, certaines aptitudes industrielles, certaines facultés
déterminées, dont résultent leurs habitudes qui ont si souvent l’apparence
d’actions spontanées et réfléchies.
Il en est précisément de même de l’homme : tout ce qu’il fait tout
Ce qu il sait, tout ce qu il peut faire , tout ce qu’il peut apprendre il
le doit à l’auteur de son organisation ; Dieu en est la source ; les organes
cérébraux sont les instrumens intermédiaires dont il se sert. Le même
organe qui, dans le rossignol, produit le chant, dans le castor la
faculté de bâtir, dans le hamster, le penchant à faire des provisions
produit dans l’homme la musique, l’architecture, l ’amour de la propriété.
Le poète, l’orateur, le législateur, le ministre delà religion ,ctc.
sont l’ouvrage de Dieu.
Le hasard peut fournir à une faculté existante l’occasion de déployer
son activité ; mais il est perdu toutes les fois que la faculté n’existe
pas. Pythagore, en passant devant l ’atelier d’un forgeron, fut surpris
de la gradation des divers sons des marteaux ; il les examina avec attention,
fit une des plus belles découvertes sur les sons, et qui contribua
beaucoup à perfectionner la musique. La chute d’une pomme de
l ’arbre devint pour Newton l’occasion de découvrir les lois de la gravitation.
Combien de fois avoit-on entendu le bruit des marteaux - combien
de fois avoit-on vu tomber les pommes des arbres sans le
moindre pressentiment que ces phénomènes ont lieu en vertu de certaines
lois de la nature.
En traitant de chaque force fondamentale en particulier, j ’ai fait
voir que souvent les premiers essais instinctifs du génie sont des
chefs-d’oeuvre. Ce n’est qu’après avoir, pendant des siècles, construit
des machines et des demeures, parlé le langage, soit articulé soit des
signes, exercé la peinture, la sculpture, la musique, la poésie, l’éloquence,
que l’homme eut l’idée de s’occuper de la recherche des
règles de ces arts et d’en fixer les lois. L'homme, pendant des siècles
a raisonné j uste, sans s’enquérir des règles de la logique ; il compa