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vaincu que les opérations intellectuelles dépendent de l'état de l’organisation
animale. . . .
Quant à l’examen des têtes en particulier, je crois devoir recommander
les précautions suivantes :
L’on croit d’ordinaire qu’il suffit d’avoir sous les yeux un petit
nombre de crânes, pour être à même d’en tirer des inductions ; il
en seroit effectivement ainsi, si le caractère moral et intellectuel de
tous les individus composant une nation, étoit le même. Selon mes
observations et celles de M. Spurzheim, il y a à cet egard la plus
grande différence d’individu à individu, même chez les peuples auxquels
on attribue avec raison un caractère national prononcé. M. Spurz-
lieim vit à Londres douze Chinois , et il les trouva tout aussi différens
l ’un de l’autre que le sont entre eux les Européens. La ressemblance
de l ’un avec l’autre n’avoit lieu que pour la figure et surtout pour
la position des yeux. M. Diard m’a donné deux crânes trouvés à
Coulpi , sur les bords du Gange. Si j’excepte les organes de l’amour
de la progéniture et du sentiment de propriété qui ont acquis un
degré égal de développement, tous les autres offrent des différences
frappantes. Nous voyons les mêmes différences chez les Nègres quoiqu’ils
se ressemblent toujours par la bouche et par le nez , surtout
lorsqu’ils sont de la même contrée. Au nombre de trois Nègres que
M. Spurzheim vit à Londres dans l ’établissement pour l’enseignement
mutuel, se trouvoit un jeune homme de dix huit ans , doue de talens
peu ordinaires , et d’une figure très - agréable ; j’ai vu, moi-même
plusieurs Nègres, de l’un et de 1 autre sexe, dont les traits n ont rien
que d’agréable. Je vois les mêmes formes chez les individus de différentes
nations, de manière qu’il seroit impossible de distinguer,
par cela seul, si un homme est François, Allemand, Italien, Espagnol
ou Anglois. C’est précisément par cette raison que l’on trouve
des individus de toutes les nations qui ont le même caractère moral
ou intellectuel. L ’on porte donc des jugemens précipités, toutes
les fois que l’on croit pouvoir déchiflrer le caractère général d’une
nation dans un petit nombre de crânes.
Il faut, pour découvrir ce caractère général, être à même d’étudier
un grand nombre d’individus, des régimens entiers, toute la nation
autant que possible. Avec de semblables facilités, il seroit aisé à l’or-
ganologiste de découvrir, dans la structure de la tête, la cause matérielle
du caractère propre d’un peuple. Il est vrai que, généralement,
le Nègre est inférieur à l’Européen pour les facultés intellectuelles ;
aussi, généralement parlant, les Nègres ont la tête plus petite, et une
masse cérébrale moins considérable que les habitans de l’Europe. Il est
yrai, généralement, que les Anglois et les François ont moins de dispositions
pour la musique que les Italiens et les Allemands; aussi,
généralement parlant, l’organe des tons est-il moins développé chez les
premiers que chez les derniers. L’on peut expliquer encore , en comparant
les formes des têtes, pourquoi, généralement, les Anglois et les Allemands
sont disposés à rechercher la liaison entre la cause et l ’effet
tandis que, généralement, les François s’en tiennent aux faits individuels
, et méprisent les abstractions et les généralisations , etc.
C’est sous ce rapport que l ’étude des formes de têtes nationales peut
être utile à l’organologie ; et dès à présent l’on pourvoit faire sur cette
matière un traité fort intéressant. Peu importe au physiologiste que
le Caractère général d’une nation dépende de l’influence du climat,
du genre de vie et des occupations habituelles , de la nourriture de
la forme du gouvernement, de la religion ou de la souche originaire;
car, dans la plupart des cas, la question pourroit bien être insoluble.
Souvent il sera facile de nier que le climat exerce une influence très-
majeure. L’histoire de tous les temps et de toutes les nations nous
apprend que partout les contrastes les plus frappans, tant sous le
rapport de la beauté physique, que sous celui des facultés intellectuelles,
se trouvent placés tout près l’un de l’autre. Tel peuple vit
pendant des milliers d’années, dans un pays, sans prendre ni la civilisation
, ni le caractère des indigènes. D’nn autre côté, l’on seroit
quelquefois tenté de dire que le changement de la forme du gouvernement
et de la religion a changé aussi le caractère d’une nation ,
tandis que, dans le fait, son caractère n’est point changé; qu’il n’est